Menu
Search
Vendredi 19 Décembre 2025
S'abonner
close
Vendredi 19 Décembre 2025
Menu
Search

Cheikh Abdelwadud Gouraud, imam de la mosquée de Milan : «Notre présence à Bruxelles veut aussi dire que la coexistence pacifique est possible»

L'une des recommandations du Congrès de Bruxelles porte sur la formation des jeunes hommes de religion, afin de barrer la route aux extrémistes. La relève qui portera la paix sur les épaules est aujourd'hui réincarnée par tous ces jeunes qui prônent le di

No Image
C'est un jeune imam de la mosquée de Milan, qui voit en le Congrès de Bruxelles « une occasion d'échange d'idées et de dialogue ».

Sayyed Cheikh Abdelwadoud, comment peut-on devenir imam de la mosquée de Milan à 25 ans ?

Je suis passé par des études théologiques classiques, de Fiqh, sciences humaines… en France, à l'Institut des hautes études islamiques, avant d'aller à Milan et de commencer à travailler avec le COREIS (Communauté religieuse islamique italienne) à Milan. Ce dernier fait partie de la Commission nationale pour l'éducation interculturelle auprès du ministère de l'Instruction publique, depuis 1998 et organise dans toute l'Italie des cours de mise à jour pour les enseignants musulmans italiens). Je fais partie des représentants de l'Islam autochtone qui n'ont pas reçu d'éducation dans les pays orientaux.

Qu'est ce qui a motivé votre participation au Congrès de Bruxelles ?

J'ai déjà pris part à des rencontres inter-religieuses avant. Ce congrès s'inscrit, donc, dans la continuité de ce que nous faisons au sein du COREIS. Nous avons d'ailleurs été plusieurs à être invités pour notre expérience afin de venir témoigner de cette convergence spirituelle qui existe entre nos différentes religions. Il faut, à ce titre, ne jamais oublier que la base commune à notre foi est la tradition monothéiste hébraïque. Le Congrès de Bruxelles a eu lieu dans un cadre exceptionnel, offrant un espace de rencontre et de réflexion de grande envergure.

Ayant expérimenté dans le domaine, comment sortez-vous de cette rencontre ?

Très satisfait. Nous avons pu échanger entre hommes de foi, pas de sujets diplomatiques ou politiques mais de questions sacrées. Tout était propice à la discussion, les tables rondes comme les simples pauses repas. Le simple fait de repartir avec les contacts de tous les participants est un résultat probant en soi.

Quel rôle pensez-vous que les religieux devraient jouer aujourd'hui sur la scène publique ?

Ils doivent transmettre la parole authentique. Je trouve qu'on ne donne pas assez la parole à tous ces gens qui représentent la religion, y compris en Europe. Souvent, ceux qui sont sous les feux de la rampe ne sont pas réellement représentatifs des communautés musulmanes. Les intellectuels qui ont fait des études et des recherches, et qui savent donc de quoi ils parlent, sont marginalisés.

Ce dont découlent tous les amalgames qui créent les confusions. Tous les musulmans sont arabes, et tous les arabes sont des terroristes. Voilà le genre de mauvaises interprétations qu'on pourrait éviter si les extrémistes n'étaient pas seuls à avoir la parole en public. Notre présence à Bruxelles veut aussi dire que la coexistence pacifique est possible. C'est un contre-exemple pour casser les préjugés nourris par les fondamentalistes de tous bords.

En parlant d'amalgames, souvent les jeunes musulmans sont pris pour cible, par ceux qui voient en eux des dangers potentiels. Comment pensez-vous que cette jeunesse peut prendre la relève ?

En dehors de ce que les autres peuvent penser de nous, il faut noter que nous faisons face dans nos sociétés et communautés musulmanes à deux catégories distinctes de jeunes. Ceux qui ont choisi le repli identitaire, menant à l'exclusivisme et au fondamentalisme. Ceux-là tentent de reproduire des schémas du passé qui n'ont plus lieu d'être. D'un autre côté, on retrouve des jeunes qui préfèrent oublier leurs traditions, une voie qui les mène aussi à une autre forme d'intolérance.

Mais heureusement qu'il existe aussi, une catégorie de modérés, même si on ne les entend pas souvent.
Des jeunes qui cherchent à connaître leur religion, tout en étant engagés dans la vie publique et au sein de leurs communautés. Une chose qui leur permet d'être actif pour casser les préjugés et surtout ne pas tomber dans le piège de l'ignorance, source de tous les maux.

Quelle est la recommandation qui vous semblait être la plus concrète en repartant de Bruxelles ?

Le projet de création d'un centre de formation, d'information et de recherche sur les religions. C'est un outil important pour former les jeunes, mais aussi pour communiquer avec les médias et les populations. Si jamais il venait à être commis un acte de violence quelque part dans le monde, au nom de la religion, ce centre sera une référence doctrinale et théologique, vers laquelle on peut se tourner pour avoir des réponses précises.

Il pourra aussi condamner ces actes au nom des trois religions qu'il va représenter. Pour cela nous avons besoin du soutien de tous les pays et gouvernements qui ont déjà l'habitude de travailler dans ce sens là. A ce sujet, le Maroc est un bon exemple, puisqu'il représente, à mes yeux, une valeur symbolique forte dans la coexistence pacifique entre différentes religions.
Lisez nos e-Papers