Nouveau concept au cinéma : le blanc-bec blond qui se prend pour un beur. Parti d'un morceau du groupe de rap 113 racontant le retour au bled d'un adolescent pour l'été, Djamel Bensalah brosse une fable sociale, mordante parfois, légère et politiquement correcte souvent, avec, comme toile de fond, la crise identitaire des jeunes Français de banlieue.
Evoquer en riant le parcours estival de la cité au bled, c'est, plus qu'une tradition familiale, bientôt un genre. En 1999, le groupe de rap 113 a sorti un single, Tonton du bled, qui racontait, sur le ton de la blague, les vacances en Algérie d'un adolescent rechignant à quitter sa cité pour un pays où tout est bancal. Finalement séduit, il décide de s'installer là-bas. Djamel Bensalah s'est servi de cette chanson pour donner vie à un nouveau concept, entre le phénomène social et la figure de l'emmerdeur (Jacques Brel, Michel Blanc, Jacques Villeret) : le Johnny Bachir. Soit le gaulois blanc-bec blond qui se prend pour un beur pour faire comme les copains de son HLM. Interprété par un Julien Courbet en grande forme (Hommes, femmes : mode d'emploi, Chouchou, Alive, Raid), Johnny Leclerc fait le Ramadan chez Yacine (David Saracino), son voisin de palier et meilleur ami depuis la maternelle. Malgré les sarcasmes de ses parents " françaouis " prolos - elle, Normande et lui, Alsacien - Johnny alias Abdel Bachir clame à tout va préférer la chorba à la choucroute, le maillot vert de l'équipe de foot algérienne à celui de l'équipe de France, les filles aux formes avantageuses et les mariages à l'ancienne. Alors que Yacine déprime à l'idée de passer pour la énième fois l'été au bled, Johnny s'embarque clandestinement dans la voiture des Sabri pour voir (ou revoir ?) l'Algérie. Sur le pont du bateau qui traverse la Méditerranée, il brandit, fier comme un coq, la photo (trouvée aux puces selon Yacine) d'un petit village " entre Alger et Oran " dont il serait originaire… Son gentil processus d'intégration à l'envers qui ravit ses aînés algériens balance entre le délire mythomane et la réalité cachée. Johnny est-il un peu fou ou dit-il un peu vrai ? Cette hésitation instille un trouble dans le film.
Partisan du genre "La banlieue a la banane "au cinéma, Djamel Bensalah, le réalisateur de Le ciel, les oiseaux et… ta mère ! et du Raid, arrime sa comédie légère sur un sujet de poids : la crise identitaire de la jeune génération dite " des cités ". Il en tire une fable sociale riche en gags qui s'essaient à changer les clichés en objets de satire. Tout y passe: les Peugeot pleines à craquer, la queue sur l'autoroute en plein mois de jeûne par 40°, l'embarquement rocambolesque face aux douaniers soupçonneux et pas pressés, le raquet' des cousins algériens qui convoitent les basquet et les jeans dernier cri, les pauvres hères de l'administration comme les serveurs " blédards " qui vendent " du jus d'orange d'abricot ", jusqu'à la circoncision tardive et l'incontournable mariage arrangé avec la fille du Hadj du désert….
Une comédie française à l'humour algérien
S'inspirant de classiques américains du type Sergio Leone, et greffant de l'humour algérien sur le canevas des comédies françaises, Djamel Bensalah joue plutôt dans la cour d'un Alexandre Arcady ou d'un Jean-Pierre Sinapi (Camping à la ferme) ayant invité des copains comiques comme Elie Semoun et Eric et Ramzy à la fête. De bonnes idées (une parodie de La Boum à Alger, une colère justifiée contre une chorba industrielle dans un restaurant prétendument authentique) croisent un certain nombre de maladresses estampillées téléfilm. En fait, Djamel Bensalah est surtout bon dans les petits détails qui moquent les différences culturelles. La crise identitaire ne s'en porte pas forcément mieux : celui qui "choisit son camp", Johnny donc, est accueilli en seigneur "décalé ". Son ami Yacine, qui n'aime ni le bled (où il fléchit sous les traditions) ni la cité (où il est poursuivi par des dealers) récupère le dossard du paumé. Tandis que le père de celui-ci (Sidi Ahmed Agoumi) s'applique à donner le change, revendiquant la vie dans la cité comme un privilège et le mariage arrangé en Algérie comme l'occasion d'éviter à son fils le sombre avenir qui guette les petites frappes en France. " Je souhaitais raconter à ceux qui sont prêts à l'entendre que rien n'est inéluctable. Je voulais aider à changer l'image de la banlieue, de l'immigration, et redonner de l'espoir, de la confiance et de la fierté à toute une génération qui en a bien besoin mais ne le réclame pas ", a déclaré Djamel Bensalah. Moralité : si Yacine finit par céder aux traditions, c'est parce qu'il y trouve finalement son compte. Ce dénouement politiquement correct surprend dans une fable pourtant féroce par endroit. Comme si Djamel Bensalah avait désespérément cherché un moyen de réconcilier tout le monde.
Il était une fois dans l'Oued, film français réalisé par Djamel Bensalah. Avec Julien Courbey, Sid Ahmed Agoumi, David Saracino, Karina Testa. Durée : 1h33.
Evoquer en riant le parcours estival de la cité au bled, c'est, plus qu'une tradition familiale, bientôt un genre. En 1999, le groupe de rap 113 a sorti un single, Tonton du bled, qui racontait, sur le ton de la blague, les vacances en Algérie d'un adolescent rechignant à quitter sa cité pour un pays où tout est bancal. Finalement séduit, il décide de s'installer là-bas. Djamel Bensalah s'est servi de cette chanson pour donner vie à un nouveau concept, entre le phénomène social et la figure de l'emmerdeur (Jacques Brel, Michel Blanc, Jacques Villeret) : le Johnny Bachir. Soit le gaulois blanc-bec blond qui se prend pour un beur pour faire comme les copains de son HLM. Interprété par un Julien Courbet en grande forme (Hommes, femmes : mode d'emploi, Chouchou, Alive, Raid), Johnny Leclerc fait le Ramadan chez Yacine (David Saracino), son voisin de palier et meilleur ami depuis la maternelle. Malgré les sarcasmes de ses parents " françaouis " prolos - elle, Normande et lui, Alsacien - Johnny alias Abdel Bachir clame à tout va préférer la chorba à la choucroute, le maillot vert de l'équipe de foot algérienne à celui de l'équipe de France, les filles aux formes avantageuses et les mariages à l'ancienne. Alors que Yacine déprime à l'idée de passer pour la énième fois l'été au bled, Johnny s'embarque clandestinement dans la voiture des Sabri pour voir (ou revoir ?) l'Algérie. Sur le pont du bateau qui traverse la Méditerranée, il brandit, fier comme un coq, la photo (trouvée aux puces selon Yacine) d'un petit village " entre Alger et Oran " dont il serait originaire… Son gentil processus d'intégration à l'envers qui ravit ses aînés algériens balance entre le délire mythomane et la réalité cachée. Johnny est-il un peu fou ou dit-il un peu vrai ? Cette hésitation instille un trouble dans le film.
Partisan du genre "La banlieue a la banane "au cinéma, Djamel Bensalah, le réalisateur de Le ciel, les oiseaux et… ta mère ! et du Raid, arrime sa comédie légère sur un sujet de poids : la crise identitaire de la jeune génération dite " des cités ". Il en tire une fable sociale riche en gags qui s'essaient à changer les clichés en objets de satire. Tout y passe: les Peugeot pleines à craquer, la queue sur l'autoroute en plein mois de jeûne par 40°, l'embarquement rocambolesque face aux douaniers soupçonneux et pas pressés, le raquet' des cousins algériens qui convoitent les basquet et les jeans dernier cri, les pauvres hères de l'administration comme les serveurs " blédards " qui vendent " du jus d'orange d'abricot ", jusqu'à la circoncision tardive et l'incontournable mariage arrangé avec la fille du Hadj du désert….
Une comédie française à l'humour algérien
S'inspirant de classiques américains du type Sergio Leone, et greffant de l'humour algérien sur le canevas des comédies françaises, Djamel Bensalah joue plutôt dans la cour d'un Alexandre Arcady ou d'un Jean-Pierre Sinapi (Camping à la ferme) ayant invité des copains comiques comme Elie Semoun et Eric et Ramzy à la fête. De bonnes idées (une parodie de La Boum à Alger, une colère justifiée contre une chorba industrielle dans un restaurant prétendument authentique) croisent un certain nombre de maladresses estampillées téléfilm. En fait, Djamel Bensalah est surtout bon dans les petits détails qui moquent les différences culturelles. La crise identitaire ne s'en porte pas forcément mieux : celui qui "choisit son camp", Johnny donc, est accueilli en seigneur "décalé ". Son ami Yacine, qui n'aime ni le bled (où il fléchit sous les traditions) ni la cité (où il est poursuivi par des dealers) récupère le dossard du paumé. Tandis que le père de celui-ci (Sidi Ahmed Agoumi) s'applique à donner le change, revendiquant la vie dans la cité comme un privilège et le mariage arrangé en Algérie comme l'occasion d'éviter à son fils le sombre avenir qui guette les petites frappes en France. " Je souhaitais raconter à ceux qui sont prêts à l'entendre que rien n'est inéluctable. Je voulais aider à changer l'image de la banlieue, de l'immigration, et redonner de l'espoir, de la confiance et de la fierté à toute une génération qui en a bien besoin mais ne le réclame pas ", a déclaré Djamel Bensalah. Moralité : si Yacine finit par céder aux traditions, c'est parce qu'il y trouve finalement son compte. Ce dénouement politiquement correct surprend dans une fable pourtant féroce par endroit. Comme si Djamel Bensalah avait désespérément cherché un moyen de réconcilier tout le monde.
Il était une fois dans l'Oued, film français réalisé par Djamel Bensalah. Avec Julien Courbey, Sid Ahmed Agoumi, David Saracino, Karina Testa. Durée : 1h33.
