Comment expliquer l'incapacité apparente du monde arabo-islamique à trouver sa place dans le monde actuel tel qu'il est façonné par la modernité ?
Comment appréhender la crise dont il est empêtré depuis au moins trois siècles et dont les effets sont encore aujourd'hui à l'œuvre ? Quel est le destin du monde arabe au vu de l'immobilisme dont il semble avoir fait le pari ?
Ce sont ces questions que le penseur tunisien Hicham Djaït propose d'analyser dans cet ouvrage intitulé «La crise de la culture islamique» et avec lequel Le Fennec inaugure sa rentrée.
Né en 1935, Hicham fait partie de ces intellectuels tunisiens, tels Mohamed Talbi ou Yahd Achour et bien d'autres, qui tirent leur autorité intellectuelle de leur enracinement dans une double culture. Lauréat du lycée Sadiqia où il suit son enseignement fondamental et secondaire, il est également agrégé puis docteur d'Etat en histoire à Paris.
Membre de plusieurs commissions internationales, de la société savante tunisienne et de l'Académie européenne pour les sciences et les arts, il est l'auteur de plusieurs ouvrages sur le même thème dont : «La Personnalité et le devenir arabo-islamique» en 1974 ; «L'Europe et l'Islam» en 1978 ; «Al-Kufa, naissance de la ville islamique» en 1986 et «La Grande discorde : religion et politique dans l'Islam des origines» en 1989.
Le présent ouvrage est un recueil d'une série d'études élaborées au cours de ces vingt dernières années et publiées dans différentes publications arabes et françaises.
Pour Hicham Djaït, la notion de crise, quoiqu'elle soit galvaudée, traduit une réalité indéniable qui secoue le monde arabo-musulman ; une lame de fond dont le mouvement s'est déclenché depuis trois siècles et dont les effets sont encore à l'œuvre aujourd'hui.
La méfiance, sinon la défiance dont se caractérise le monde arabe et musulman à l'égard des valeurs universelles qui fondent les sociétés modernes dont la démocratie, le respect de la dignité humaine, l'autonomie de l'individu ; sa marginalité de plus en plus criante par rapport au reste du monde, dans le domaine de la production du savoir et du sens en sont les grands traits.
Selon Hicham Djaït, la crise dont il est question témoigne du déclin en pente douce d'une culture, celle de la civilisation islamique, née au 7e siècle, sous l'impulsion des Arabes et qui connut son apogée en Iran et en Inde jusqu'au 15e siècle avant de s'installer dans une sorte de «stabilité apaisante», signe de sénilité et de déclin.
A la même époque, l'Europe barbare venait de faire son entrée fracassante dans l'histoire, C'est le commencement de l'ère de la modernité. Qu'est-ce la modernité pour Djaït ? «Elle ne se définit pas exclusivement comme l'émergence et l'essor d'une nouvelle civilisation qui se serait nourrie des autres et aurait fini par les dominer , mais plutôt comme un profond bouleversement dans le cours de l'histoire de l'humanité et comme un bond énorme qui ne saurait être comparé qu'à la révolution néolithique d'il y a 10 000 ans, quand l'homme inventa l'agriculture, domestiqua les animaux, construisit des villages et se sédentarisa».
Ce fut le commencement des civilisations agraires nées en Egypte et à Sumer puis en Grèce et jusqu'en Chine et l'Inde. La civilisation islamique faisait partie de cette civilisation qui a été à l'origine d'une grande culture et d'un art raffiné que la modernité a mis en branle.
Désormais, c'est une culture totalement nouvelle qui place l'Homme au centre de ses préoccupations comme être suprême. C'est un bouleversement d'une portée décisive qui ouvre des chantiers dans le domaine de la science, de l'art et de la philosophie. C'est cet humanisme qui devient au fil du temps à la base de toute philosophie politique et économique moderne. Les bouleversements politiques et sociaux dont l'Europe a été le théâtre ; le triomphe du libéralisme survenu au cours des trois derniers siècles sont le fruit de cette nouvelle culture qui oeuvrait en lame de fond.
Pour Djaït, il n'y pas une modernité européenne, et une autre musulmane ou chinoise, «la modernité est une dans ses multiple dimensions». Il est d'autant plus inutile de se poser la question comme le fit Mohamed Abdou au début du siècle dernier : «pourquoi les autres se sont-il développés et pas nous». Il est encore plus futile de considérer sa réponse, celle du retour à la pureté originelle de l'islam.
«La haute culture islamique est morte vers 1500». Pour accéder à la modernité, et participer au monde moderne, les Arabes se doivent de « se donner une haute ambition dans les domaines de la pensée, de la connaissance, de la science, de l'art et de la littérature, et décider sérieusement d'emprunter aux autres ce que la modernité a inventé dans tous les domaines.»
Pour ce faire, il est nécessaire de se concilier avec la logique de paix à l'intérieur comme à l'extérieur ; faire leurs les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté et de démocratie. C'est le grand défi de la modernité.
La crise de la culture islamique de Hicham Djaït, Ed. Le Fennec336 pages.
Comment appréhender la crise dont il est empêtré depuis au moins trois siècles et dont les effets sont encore aujourd'hui à l'œuvre ? Quel est le destin du monde arabe au vu de l'immobilisme dont il semble avoir fait le pari ?
Ce sont ces questions que le penseur tunisien Hicham Djaït propose d'analyser dans cet ouvrage intitulé «La crise de la culture islamique» et avec lequel Le Fennec inaugure sa rentrée.
Né en 1935, Hicham fait partie de ces intellectuels tunisiens, tels Mohamed Talbi ou Yahd Achour et bien d'autres, qui tirent leur autorité intellectuelle de leur enracinement dans une double culture. Lauréat du lycée Sadiqia où il suit son enseignement fondamental et secondaire, il est également agrégé puis docteur d'Etat en histoire à Paris.
Membre de plusieurs commissions internationales, de la société savante tunisienne et de l'Académie européenne pour les sciences et les arts, il est l'auteur de plusieurs ouvrages sur le même thème dont : «La Personnalité et le devenir arabo-islamique» en 1974 ; «L'Europe et l'Islam» en 1978 ; «Al-Kufa, naissance de la ville islamique» en 1986 et «La Grande discorde : religion et politique dans l'Islam des origines» en 1989.
Le présent ouvrage est un recueil d'une série d'études élaborées au cours de ces vingt dernières années et publiées dans différentes publications arabes et françaises.
Pour Hicham Djaït, la notion de crise, quoiqu'elle soit galvaudée, traduit une réalité indéniable qui secoue le monde arabo-musulman ; une lame de fond dont le mouvement s'est déclenché depuis trois siècles et dont les effets sont encore à l'œuvre aujourd'hui.
La méfiance, sinon la défiance dont se caractérise le monde arabe et musulman à l'égard des valeurs universelles qui fondent les sociétés modernes dont la démocratie, le respect de la dignité humaine, l'autonomie de l'individu ; sa marginalité de plus en plus criante par rapport au reste du monde, dans le domaine de la production du savoir et du sens en sont les grands traits.
Selon Hicham Djaït, la crise dont il est question témoigne du déclin en pente douce d'une culture, celle de la civilisation islamique, née au 7e siècle, sous l'impulsion des Arabes et qui connut son apogée en Iran et en Inde jusqu'au 15e siècle avant de s'installer dans une sorte de «stabilité apaisante», signe de sénilité et de déclin.
A la même époque, l'Europe barbare venait de faire son entrée fracassante dans l'histoire, C'est le commencement de l'ère de la modernité. Qu'est-ce la modernité pour Djaït ? «Elle ne se définit pas exclusivement comme l'émergence et l'essor d'une nouvelle civilisation qui se serait nourrie des autres et aurait fini par les dominer , mais plutôt comme un profond bouleversement dans le cours de l'histoire de l'humanité et comme un bond énorme qui ne saurait être comparé qu'à la révolution néolithique d'il y a 10 000 ans, quand l'homme inventa l'agriculture, domestiqua les animaux, construisit des villages et se sédentarisa».
Ce fut le commencement des civilisations agraires nées en Egypte et à Sumer puis en Grèce et jusqu'en Chine et l'Inde. La civilisation islamique faisait partie de cette civilisation qui a été à l'origine d'une grande culture et d'un art raffiné que la modernité a mis en branle.
Désormais, c'est une culture totalement nouvelle qui place l'Homme au centre de ses préoccupations comme être suprême. C'est un bouleversement d'une portée décisive qui ouvre des chantiers dans le domaine de la science, de l'art et de la philosophie. C'est cet humanisme qui devient au fil du temps à la base de toute philosophie politique et économique moderne. Les bouleversements politiques et sociaux dont l'Europe a été le théâtre ; le triomphe du libéralisme survenu au cours des trois derniers siècles sont le fruit de cette nouvelle culture qui oeuvrait en lame de fond.
Pour Djaït, il n'y pas une modernité européenne, et une autre musulmane ou chinoise, «la modernité est une dans ses multiple dimensions». Il est d'autant plus inutile de se poser la question comme le fit Mohamed Abdou au début du siècle dernier : «pourquoi les autres se sont-il développés et pas nous». Il est encore plus futile de considérer sa réponse, celle du retour à la pureté originelle de l'islam.
«La haute culture islamique est morte vers 1500». Pour accéder à la modernité, et participer au monde moderne, les Arabes se doivent de « se donner une haute ambition dans les domaines de la pensée, de la connaissance, de la science, de l'art et de la littérature, et décider sérieusement d'emprunter aux autres ce que la modernité a inventé dans tous les domaines.»
Pour ce faire, il est nécessaire de se concilier avec la logique de paix à l'intérieur comme à l'extérieur ; faire leurs les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté et de démocratie. C'est le grand défi de la modernité.
La crise de la culture islamique de Hicham Djaït, Ed. Le Fennec336 pages.