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Zaouia Boutchichia : le soufisme modéré

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A l'occasion de la fête du Mouloud, des milliers de pèlerins, de différentes régions du Maroc et de l'étranger, se dirigent vers le village de Madagh, lieu de la zaouia Boutchichia.

A l'accoutumée, cet événement est célébré en présence du Maître de la confrérie, Cheikh Hamza Al Qadiri Al Boutchichi, " un descendant par le sang du Cheikh Moulay Abdelkader al Jilali, (470H /1077-1166), l'un des saints soufis les plus populaires dans le monde musulman ". La généalogie de la famille al Qadiri remonte jusqu'au Prophète Mohammed par son petit fils Hassan.
Comme le décrit l'auteur du livre " Sidi Hamza Boutchichi ", la soirée de la fête de Mouloud commence par des lectures rituelles du Coran, des causeries et du " Samaâ " (chants).

Divers orateurs interviennent également " dissertant à propos des différentes significations de l'événement et en profitant pour présenter la tariqa, sa vocation spirituelle et ses objectifs éducatifs… ".
Cette année, il y a lieu de s'attendre à la participation de personnalités connues dans divers domaines et de différentes sensibilités, tels Ahmed Taoufiq, ministre des Habous et des Affaires islamiques, Faouzi Skali, directeur du Festival des musiques sacrées de Fès, Khalid Jamai, journaliste et ancien membre du Comité exécutif du Parti de l'Istiqlal.

Bien que relativement récente, la zaouia Boutchichia peut être considérée comme l'une des plus importantes confréries du Maroc. Avec ses 100.000 disciples, les moyens dont elle dispose et ses ramifications au niveau des différentes strates de la société, particulièrement parmi les fonctionnaires et les cadres moyens, elle peut être qualifiée comme l'une des plus importantes organisations d'encadrement des citoyens.

A plus de vingt kilomètres de la ville de Berkane, Madagh, chef lieu de pèlerinage des membres de la Zaouia Boutchichia, se situe au bout d'une route secondaire entourée de plaines verdoyantes de l'embouchure de la Moulouya et de fermes d'agrumes connues pour leur haute qualité. Sa réputation est due, en partie, aux liens de parenté (réels ou supposés) de son maître avec le Prophète et de son itinéraire soufi. La littérature de cette confrérie rapporte que Cheikh Hamza al Qadiri al Boutchichi, fût lui-même et son propre père, al Hajj al Abbas al Qadiri al Boutchichi, disciple du cheikh Sidi Abou Madienne al Qadiri.

Mais pour plusieurs observateurs, cette confrérie rayonne surtout par la flexibilité de ses positions et de son comportement. Contrairement à d'autres confréries, qui ont composé avec les forces d'occupation, la zaouia Boutchichia eu un rôle honorable lors de la période dite de " pacification " des régions marocaines. En 1907, Sid al Mokhtar, soutenu, par son cousin Sidi Boumadiane, anima la résistance des tribus Ben Znasse, contre la pénétration coloniale française dans la région du Nord.

A la fin de décembre de la même année, et au vu des rapports de forces inégaux, les forces de l'occupation capturèrent Sid al Mokhtar et mirent fin à la résistance. Rapportant l'épisode de cette capture, le lieutenant Boullé a noté dans son rapport ce qui suit : " le 31 décembre 1907, au cours des manœuvres dans la région de Beniznasen, des unités du Général Filinau ont arrêté le wali Sidi Mokhtar Boutchichi, un de nos adversaires les plus coriaces et le véritable instigateur de la lutte contre la présence française ".

Après sa reddition, il s'installe à Madagh et y fonda une zaouia. Celle-ci a connu un renouveau à la fin du protectorat, mais c'est depuis le début des années soixante-dix, qu'elle connaît son véritable nouveau départ, aidée en cela par une conjoncture qui allait favoriser l'essor des mouvements religieux.

D'ailleurs, plusieurs dirigeants de la mouvance islamiste ont fait leur apprentissage au sein de la zaouia Boutchichia. Même s'il n'est qu'un des aspects apparents de l'iceberg, le cas de Abdessalem Yassin, ancien cheikh ayant constitué sa propre association, ne traduit guère la tendance modérée de cette confrérie, ni de ses disciples, ni de ses maîtres.
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