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Et le Zaïre redevint Congo …

L'enseigne est si peu visible qu'elle surprend le voyageur : «Bienvenue en République démocratique du Congo» ! Côté Kinshasa, la pancarte fatiguée annonce la fin de la traversée du fleuve qui constitue la frontière naturelle entre chaque Congo.

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Pour passer d'un bord à l'autre de cette immense voie d'eau qui, baptisée aussi Congo, est le deuxième fleuve du monde par sa densité hydraulique et le cinquième par sa longueur, il faut plus de vingt minutes. Le Congo, c'est la veine jugulaire de ces deux Etats qui se regardent en chiens de faïence. On quitte côté Brazza…un calme relatif et l'on retrouve de l'autre côté de la rive une agitation sans commune mesure avec la placidité et l'indolence laissée derrière. C'est le premier trait qui distingue les deux peuples…

Les douaniers, des liasses de formulaires dans les mains s'agitent, furieux d'être pris à partie par une foule qui se bouscule, baluchons ou bébés accrochés au dos , pour embarquer sur un vieux tanker dont la couleur bleue d'origine n'est plus qu'un souvenir sous la croûte de rouille.

Un quai de fortune, des grues affaissées, le tout datant probablement de l'ère Mobutu mais portant encore les stigmates des ravages de la guerre. Partout, l'impact des balles et des roquettes fait foi. " Bienvenue en République démocratique du Congo " ! Malgré la discrétion de la pancarte l'accueil est chaleureux, dépouillé de toute velléité cérémonieuse . C'est que le Congo du président Joseph Kabila, affranchi en effet des oripeaux susceptibles de rappeler ce qu'on appelle la dictature de Mobutu, inspire désormais un regard différent.

Le branle-bas de combat, éprouvant pour les étrangers et ordinaire pour les Congolais, ne traduit pas autre chose que l'effervescence qui, à l'instar d'une forte fièvre, s'est emparée du pays depuis 1997, date à laquelle le Zaïre s'était effondré à l'image d'un colosse aux pieds d'argile et avec lui le régime du maréchal Mobutu Sessé Seko .L'accès à la province de Kinshasa nous plonge immédiatement dans l'intensité d'une nation qu n'en finit pas, de débattre de son destin.

Vaste territoire planté au cœur du continent, la République démocratique du Congo (RDC) possède une superficie de 2.345 410 millions de kilomètres carrés, soit 80 fois la Belgique et cinq fois la France, et une population de 60 millions d'habitants. On imagine, comme le souligne un confrère congolais, un Etat qui s'étendrait de Tanger jusqu'au-delà da la Cyrénaïque en largeur et jusqu'à Bamako en longueur , regroupant des ethnies parlant plus de 250 langues. Colonisé par le Royaume de Belgique, il a commencé à connaître une vague de protestations indépendantistes dès les années quarante, focalisées dans la capitale Léopoldville (Kinshasa) .

Les gens " d'en bas" (Bas Congo) et les gens d'en haut, originaires de l'Equateur, dont Mobutu, mais la première tendance dirigée alors par Joseph Kasavubu l'emporta pour arracher " l'indépendance" en 1954. Une indépendance formelle qui ne régla pas pour autant le problème dans son intégralité.
Après quelques années d'ébullition, ponctuées de violences et de répression, une table ronde est réunie à Bruxelles du 20 janvier au 20 février 1960. Elle déboucha sur la proclamation le 30 juin de la même année de l'indépendance, Joseph Kasavubu étant devenu le premier président de la république congolaise et Patrice Lumumba, qui symbolisera plus tard le visage emblématique d'une " Afrique douce et acharnée " , premier ministre .

La parenthèse fut courte, suffisamment pour ouvrir une nouvelle ère d'instabilité qui déboucha par l'assassinat en 1961 de Patrice Lumumba et la reprise du Katanga et du sud Kasaï qui avaient fait sécession en 1960. Mobutu Sessé Séko, entama alors son ascension qui le conduira en 1965 à s'emparer du pouvoir. Il réorganisera l'Etat, instaura un régime à poigne, n'hésitant pas à recourir à une féroce répression contre les populations de l'est. Un règne sans partage qui durera de 1965 à 1997…En 1971, remodelant le visage du Congo, il le rebaptisera Zaïre…

Ce que Laurent Désiré Kabila, leader des rebelles de l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL), soutenu par le Rwanda et l'Ouganda , débaptisera à son arrivée au pouvoir le 17 mai 1997 après avoir chassé Mobutu du pouvoir. Un an plus tard, ce sont quasiment les mêmes qui avaient soutenu Laurent Désiré Kabila, qui conclurent une alliance et se révoltèrent contre lui . Il s'git d'officiers tutsis congolais et de militaires rwandais, concentrés à l'est, mais bénéficiant d'un soutien logistique du Rwanda. D'une tentative de réconciliation avortée à une médiation vouée à l'échec, le nouveau Congo fut enserré dans une emprise politico-militaires, les appétits étant à la fois nombreux et ouverts.

Une nouvelle guerre implique six Etats de l'Afrique centrale, c'est-à-dire le Congo, le Rwanda, l'Ouganda, l'Angola, la Namibie, et le Zimbabwé…Il aura fallu la conférence de Lusaka le 10 juillet 1999, pour proclamer un cessez-le-feu d'autant plus fragilisé qu'il n'aura aucune portée, les violents combats continuant toujours à opposer Ouganda et Rwanda pour le contrôle de la province de Kisangani au nord ouest du Congo, connue pour l'immensité de ses richesses en diamant, lorgnées par les Etats-Unis.

La tension régionale avait une conséquence directe sur la vie des populations jetées dans l'œil du cyclone. Ce qui incita alors les Nations unies en février 2000 à faire voter par le Conseil de sécurité la résolution 1291 pour l'envoi de 5537 hommes pour le respect de l'application du cessez-le-feu signé à Lusaka. Cependant, dans la foulée des tractations, Laurent Désiré Kabila est tombé sous les balles d'un de ses gardes du corps le 16 janvier 2001, remplacé le lendemain par son propre fils, Joseph Kabila, à la tête de l'Etat.

En mars 2001, la MONUC ( Mission des Nations unies en république démocratique du Congo), dont font partie qelque 850 Marocains installés dans la difficile province de Bunia, au nord est, s'implante dans les provinces du Nord est. Mais il faudra attendre juillet 2002, pour q'un engagement soit pris à Prétoria par le président rwandais Paul Kagamé de retirer ses 30.000 soldats du Congo, ensuite septembre de la même année pour que l'Ouganda en fasse autant.

Ce qu'on appelle l'accord militaire de Lusaka est complété par un autre accord à caractère politique en décembre 2002, signé à Pretoria, relatif au partage du pouvoir pendant une période transition de deux ans entre Joseph Kabila, chef de l'Etat, et quatre vice-présidents incarnant chacun une des composantes des négociations et des forces en présence. Il y a donc le chef d'Etat, les deux mouvements rebelles (MLC et RDC –Goma) de Azarias Ruberwa et soutenu par le Rwanda, l'opposition non armée et la société civile. En gros ce sont quatre personnalités qui se partagent l'exécutif en attendant la nouvelle donne : Jospeh Kabila; E.Tshiskedi; Ruberwa et J.P. Bemba…

Le désarmement et l'instauration d'un Etat de droit constituent depuis lors l'objectif central du gouvernement congolais. que les Congolais de tous âges, quelle que puisse être leur condition, ne parlent que de changement, n'hésitent pas à exprimer leurs attentes et à formuler leur espoir que la vie reprendra son cours normal et que la future configuration palliera au vide d'aujourd'hui, synonyme de précarité et d'incertitudes, à l'absence décriée de l'Etat , de l'armée et de des forces pouvant assurer sécurité et stabilité.

L'éditorialiste du quotidien " Le Potentiel ", qui sert d'aiguillon de critique à Kinshasa, que les diplomates s'arrachent, commentant la situation politique nationale à sa manière n'a pas hésité à écrire "qu'il s'agit tout simplement là d'un combat d'arrière-garde, car le cours de l'histoire est irréversible .Tous ceux qui s'opposeront à l'avènement d'un nouvel ordre politique seront balayés par l'ouragan de l'histoire".

Le peuple congolais n'aspire qu'à une seule chose : récupérer son identité, usurpée et s'assurer le contrôle des richesses de son pays que les autres convoitent non sans avidité et sans scrupules. De la démocratie sortira la justice économique et sociale…
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