Et une bande d'escrocs en moins. Du moins, le cerveau de la bande, puisque ses complices courent toujours, mais pas pour longtemps, vu qu'ils ont été identifiés et font l'objet d'une recherche implacable. La personne arrêtée se faisait passer pour un «saint» aux pouvoirs surnaturels et délestait les bonnes femmes crédules de leurs bijoux. Pas ceux qu'elles portent sur elle, mais bel et bien ceux gardés à l'abri dans la maison.
Sous prétexte de vouloir rendre service, l'escroc embobinait ses victimes grâce à un savant discours, basé sur des renseignements collectés au préalable.
Mais cela ne pouvait être possible qu'avec l'aide d'un degré avancé de naïveté dont faisait preuve les victimes.
Bien que des histoires pareilles relèvent de l'inimaginable, elles ne manquent pas de se produire et, surtout, de prêter au rire, en dépit du malheur qu'elles véhiculent. Certes, il faut être quelque peu sadique et plutôt misogyne pour avoir le front de se moquer face à pareille naïveté. Mais la crédulité de ces dames est telle que l'acte qui en découle peut être taxé d'impardonnable. Car, en effet, d'après les annales de la police, les victimes de ce subterfuge sont toutes des femmes.
A ce propos, comment arriverait-on à concevoir qu'une dame qui se respecte puisse exécuter à la lettre les instructions d'un inconnu, après une discussion hasardeuse, sans que le moindre neurone ne se mette à sautiller ?
La discussion en question tourne généralement autour d'un sort qui lui aurait été jeté… dans ses bijoux ! Allez savoir pourquoi les bijoux et pas les babouches ou le talisman qu'elle porte autour du cou. Pour le talisman, c'est compréhensible, il proviendrait d'un vénérable fqif du Souss, donc intouchable.
Bref, une discussion s'engage, suite à laquelle la bonne dame s'exécute selon les recommandations de son bienveillant interlocuteur. Elle rentre chez elle, déverrouille son placard verrouillé par définition - puisque les bijoux sont bien gardés dans un placard chez nous -, en sort son trésor pour, en fin de compte, le remettre à cet inconnu aux capacités divinatrices.
Il n'est pas question de parler d'offrande, mais plutôt de confiance aveugle, la démarche consistant à conjurer le sort implacable qui s'abat sur la bonne dame, grâce aux capacités du fqih croisé par hasard dans le quartier.
C'est ainsi que la dernière victime de notre escroc tombera dans les filets de ce dernier. Elle était à une dizaine de mètre de son domicile lorsqu'un homme d'un certain âge, en djellaba, s'approcha d'elle. « Excuse-moi ma fille, peux-tu m'indiquer le chemin du mausolée ? », lui demanda-t-il. Face à son air de bon père de famille sérieux, ayant quelque chose qui forçait le respect, la bonne dame commença à se repérer avant de lui indiquer le bon chemin.
A ce moment précis, un passant est interpellé par le fqih. «Tu as de grands soucis mon fils, mais tu n'as pas à t'inquiéter, le tribunal prononcera son verdict en ta faveur», lui lança-t-il. L'homme reste bouche bée. Le fqih amplifiera davantage le mystère en lui parlant de ses problèmes, ainsi que de l'affaire qu'il a en justice, en détail, comme s'il était son propre avocat. Le passant, qui n'en revenait pas, glissa sa main dans sa poche, en sortit un gros billet qu'il remit au «devin».
La bonne dame, non plus, n'en revenait pas. Tout un miracle s'est déroulé sous ses yeux. Le passant complice passa son chemin, laissant la femme entre les mains du fqih. Ce dernier lui dira que le bonhomme qui venait de passer s'en tirera à bon compte au tribunal, et que ses soucis cesseront à jamais. Au regard stupéfait de la victime, la première phase d'embobinage était un véritable succès et l'escroc pouvait aborder la phase suivante.
« Toi aussi ma fille, ton regard semble porter de l'angoisse et une profonde tristesse…», lance le fqih à ce moment, à l'attention de la femme. Avant qu'elle ne dise un mot, il se mit à lui parler d'elle, de sa famille, de son mari, de son travail, des récentes disputes conjugales… Bref, il lui étala sa vie en menu détail. Pour en savoir autant, soit il devait vivre sous le même toit qu'elle, soit il avait des pouvoirs de voyant.
La femme retiendra bien entendu cette deuxième option. Le fqih poursuit son discours magnétisant et annonça à la bonne dame qu'au sujet des disputes conjugales, ce sont des proches malveillants qui lui avaient jeté un sort, dans l'optique de ruiner son foyer. Une autre femme voulait, ainsi, mettre la main sur son mari.
«Le sortilège se trouve dans tes bijoux et il faut absolument conjurer le sort, autrement ta vie partira en fumée », lui déclara-t-il, l'invitant à lui ramener le petit trésor afin de psalmodier dessus quelques versets du Coran et d'annuler de la sorte le sortilège. Aussi impensable que cela puisse paraître, la bonne dame s'exécuta sans réfléchir, la peur au ventre par rapport à ces ennemis qu'elle ne connaissait pas et qui pourtant voulaient sa perte.
De retour de la maison, elle prit sa boîte à bijoux qu'elle remit au fqih, qui lui prit la main en prononçant une sorte de prière, avant de lui dire que le sort était en train d'être conjuré.
Il l'invita par la suite à prendre le chemin de la maison, et surtout de marcher sans se retourner, que c'était capital pour la réussite de «l'opération». Il n'avait pas tort, la réussite de l'opération en dépendait ! Quant à ses bijoux, il lui indiqua qu'elle les trouvera en chemin, avant d'avoir parcouru quelques mètres. Chose qu'elle fera, dans son immense crédulité, avant de se rendre compte que ça sentait le roussi et de se retourner. C'était trop tard, le fqih était déjà bien loin.
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Il s'agit du fameux passant qui intervenait toujours en première phase du « recrutement», ainsi que d'une femme chargée de collecter le maximum de renseignements sur les victimes. Elle usait de tous ses talents de questionneuse dans les épiceries du quartier, le hammam où se rendait la victime, certains voisins si possible, etc.
Aussi, la victime était prise en filature des jours durant, ses moindres faits et gestes étaient épiés, jusqu'à monter tout un «dossier» sur elle, avant de passer à l'acte. Le trio avait réussi plusieurs coups avant l'arrestation du fqih.
Ce dernier écopera de quatre ans d'emprisonnement pour escroquerie et association de malfaiteurs.
Sous prétexte de vouloir rendre service, l'escroc embobinait ses victimes grâce à un savant discours, basé sur des renseignements collectés au préalable.
Mais cela ne pouvait être possible qu'avec l'aide d'un degré avancé de naïveté dont faisait preuve les victimes.
Bien que des histoires pareilles relèvent de l'inimaginable, elles ne manquent pas de se produire et, surtout, de prêter au rire, en dépit du malheur qu'elles véhiculent. Certes, il faut être quelque peu sadique et plutôt misogyne pour avoir le front de se moquer face à pareille naïveté. Mais la crédulité de ces dames est telle que l'acte qui en découle peut être taxé d'impardonnable. Car, en effet, d'après les annales de la police, les victimes de ce subterfuge sont toutes des femmes.
A ce propos, comment arriverait-on à concevoir qu'une dame qui se respecte puisse exécuter à la lettre les instructions d'un inconnu, après une discussion hasardeuse, sans que le moindre neurone ne se mette à sautiller ?
La discussion en question tourne généralement autour d'un sort qui lui aurait été jeté… dans ses bijoux ! Allez savoir pourquoi les bijoux et pas les babouches ou le talisman qu'elle porte autour du cou. Pour le talisman, c'est compréhensible, il proviendrait d'un vénérable fqif du Souss, donc intouchable.
Bref, une discussion s'engage, suite à laquelle la bonne dame s'exécute selon les recommandations de son bienveillant interlocuteur. Elle rentre chez elle, déverrouille son placard verrouillé par définition - puisque les bijoux sont bien gardés dans un placard chez nous -, en sort son trésor pour, en fin de compte, le remettre à cet inconnu aux capacités divinatrices.
Il n'est pas question de parler d'offrande, mais plutôt de confiance aveugle, la démarche consistant à conjurer le sort implacable qui s'abat sur la bonne dame, grâce aux capacités du fqih croisé par hasard dans le quartier.
C'est ainsi que la dernière victime de notre escroc tombera dans les filets de ce dernier. Elle était à une dizaine de mètre de son domicile lorsqu'un homme d'un certain âge, en djellaba, s'approcha d'elle. « Excuse-moi ma fille, peux-tu m'indiquer le chemin du mausolée ? », lui demanda-t-il. Face à son air de bon père de famille sérieux, ayant quelque chose qui forçait le respect, la bonne dame commença à se repérer avant de lui indiquer le bon chemin.
A ce moment précis, un passant est interpellé par le fqih. «Tu as de grands soucis mon fils, mais tu n'as pas à t'inquiéter, le tribunal prononcera son verdict en ta faveur», lui lança-t-il. L'homme reste bouche bée. Le fqih amplifiera davantage le mystère en lui parlant de ses problèmes, ainsi que de l'affaire qu'il a en justice, en détail, comme s'il était son propre avocat. Le passant, qui n'en revenait pas, glissa sa main dans sa poche, en sortit un gros billet qu'il remit au «devin».
La bonne dame, non plus, n'en revenait pas. Tout un miracle s'est déroulé sous ses yeux. Le passant complice passa son chemin, laissant la femme entre les mains du fqih. Ce dernier lui dira que le bonhomme qui venait de passer s'en tirera à bon compte au tribunal, et que ses soucis cesseront à jamais. Au regard stupéfait de la victime, la première phase d'embobinage était un véritable succès et l'escroc pouvait aborder la phase suivante.
« Toi aussi ma fille, ton regard semble porter de l'angoisse et une profonde tristesse…», lance le fqih à ce moment, à l'attention de la femme. Avant qu'elle ne dise un mot, il se mit à lui parler d'elle, de sa famille, de son mari, de son travail, des récentes disputes conjugales… Bref, il lui étala sa vie en menu détail. Pour en savoir autant, soit il devait vivre sous le même toit qu'elle, soit il avait des pouvoirs de voyant.
La femme retiendra bien entendu cette deuxième option. Le fqih poursuit son discours magnétisant et annonça à la bonne dame qu'au sujet des disputes conjugales, ce sont des proches malveillants qui lui avaient jeté un sort, dans l'optique de ruiner son foyer. Une autre femme voulait, ainsi, mettre la main sur son mari.
«Le sortilège se trouve dans tes bijoux et il faut absolument conjurer le sort, autrement ta vie partira en fumée », lui déclara-t-il, l'invitant à lui ramener le petit trésor afin de psalmodier dessus quelques versets du Coran et d'annuler de la sorte le sortilège. Aussi impensable que cela puisse paraître, la bonne dame s'exécuta sans réfléchir, la peur au ventre par rapport à ces ennemis qu'elle ne connaissait pas et qui pourtant voulaient sa perte.
De retour de la maison, elle prit sa boîte à bijoux qu'elle remit au fqih, qui lui prit la main en prononçant une sorte de prière, avant de lui dire que le sort était en train d'être conjuré.
Il l'invita par la suite à prendre le chemin de la maison, et surtout de marcher sans se retourner, que c'était capital pour la réussite de «l'opération». Il n'avait pas tort, la réussite de l'opération en dépendait ! Quant à ses bijoux, il lui indiqua qu'elle les trouvera en chemin, avant d'avoir parcouru quelques mètres. Chose qu'elle fera, dans son immense crédulité, avant de se rendre compte que ça sentait le roussi et de se retourner. C'était trop tard, le fqih était déjà bien loin.
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Le trio infernal
L'escroc, après avoir réussi son coup aux dépens de sa dernière victime, n'ira pas aussi loin que ça. Il sera pris la main dans le sac quelques jours plus tard. Ses deux complices sont activement recherchés.Il s'agit du fameux passant qui intervenait toujours en première phase du « recrutement», ainsi que d'une femme chargée de collecter le maximum de renseignements sur les victimes. Elle usait de tous ses talents de questionneuse dans les épiceries du quartier, le hammam où se rendait la victime, certains voisins si possible, etc.
Aussi, la victime était prise en filature des jours durant, ses moindres faits et gestes étaient épiés, jusqu'à monter tout un «dossier» sur elle, avant de passer à l'acte. Le trio avait réussi plusieurs coups avant l'arrestation du fqih.
Ce dernier écopera de quatre ans d'emprisonnement pour escroquerie et association de malfaiteurs.
