Il était tout content le Mahmoud, cette soirée là. En ces temps de canicule, où les dards de Râ ne prennent l'Ouest comme destination fatale qu'à une heure avancée de l'après-midi, Mahmoud, qui déambulait d'un bar à l'autre dans la capitale soi-disant économique, avait quelque 30.000 DH en poche(s). Trois millions de centimes rien qu'à lui tout seul et absolument libre d'en faire tout ce que pouvaient bien lui dicter ses cellules nerveuses.
Comment éviter d'être bien dans sa peau en pareille circonstance ? Au diable les éperons solaires qui prendront la relève le lendemain. Au diable, également, sa petite famille qui devait s'inquiéter de son absence, sa fillette d'une dizaine d'années notamment. Au diable - bis repetita placent*- ce réveil matinal désagréable sonnant l'heure d'aller au boulot… euh… comment dire… c'est qu'il n'avait pas de boulot, le Mahmoud, donc pas de bis repetita qui vaille. «Syntax error » dira l'ordinateur de service, pour ainsi dire.
Au diable, donc, tout ce qui pourrait s'apparenter au vocable «contrainte», car notre ami n'en a visiblement aucune, époux et père irresponsable qu'il est, doublé de sans emploi. Mahmoud n'allait ainsi pas rentrer chez lui de sitôt, lui qui avait tellement de fric à flamber, ou plutôt à liquéfier, avec à la clé de bons moments à savourer. Destination Aïn Diab alors, toujours dans la soi-disant capitale économique, là où bars et night-clubs offrent le meilleur de ce qui pourrait contribuer à édifier une soirée bien arrosée.
Bien arrosée, sa virée nocturne allait l'être en abondance. L'inconnu à la générosité débordante qu'il était, ce soir là, allait lui concéder le statut de client haut de gamme… et celui de canard à plumer sans modération. Hayat l'avait saisi au vol. De par son expérience, cette prostituée avait rapidement classé notre Mahmoud national parmi les espèces délestables à merci.
Un «haouli» de circonstance, dira-t-on. Elle n'avait pas tort, elle avait visé juste et elle allait être récompensée pour sa perspicacité. Elle usa ainsi de tous ses charmes, jusqu'à se faire inviter à la table de ce quadragénaire, qui dépensait sans compter à partir de toutes ses poches. Plusieurs discussions et une cascade de verres plus tard, Mahmoud et Hayat formaient subitement un couple qu'on aurait cru formé depuis des lustres. Main dans la main, ils quittèrent le night-club en question à destination d'un nid douillet où allait se terminer leur soirée.
Au réveil, il n'était plus question de se quitter. L'on se sentait tellement bien. Ils eurent à passer la journée ensemble, puis la soirée, puis la journée du lendemain, encore la soirée suivante, jusqu'au jour où ce qui devait arriver arriva.
Quatre jours plus tard, rien n'allait plus pour notre ami, lui qui avait financé, pourtant, cette rencontre idyllique du départ jusqu'à la case «arrivée chez les flics».
Richissime, le Mahmoud ? Rien de plus improbable. Sans emploi ni héritage, comment pouvait-il l'être ? C'est juste que… Au fait, Mahmoud, qui quittait un bar s'apprêtait à rentre chez lui ce soir là, quelques heures avant de rencontrer Hayat. Mais les quelques verres qu'il avait dans le nez, en plus de ses poches vides, lui dictèrent autre chose, celle d'aller faire un tour en ville, au cas où il trouverait une occasion d'exercer son métier.
Mahmoud était certes sans emploi à proprement parler, mais il avait un métier en bonne et due forme : celui de cambrioleur ! D'où sa petite randonnée au centre-ville en quête d'une opportunité d'affaires, alors qu'il était au point de héler un taxi pour rentrer cher lui. Il n'en reviendra pas bredouille, de cette virée au centre-ville. L'alcool qu'il avait dans les veines aidant, son audace finira par payer.
En effet, suite à une longue marche, entre deux ruelles, il décela une fenêtre d'un appartement dont le rideau n'était pas baissé. Une aubaine, puisque celui-ci se situait au rez-de-chaussée et, de plus, il n'y avait pas âme qui vive à l'horizon, ni veilleur, ni passant, ni qui que ce soit. Grâce à son agilité, en deux mouvements, il se hissa tel un félin et défonça la fenêtre en question. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, il s'est retrouvé à l'intérieur de l'appartement. Malgré son ébriété avancée, il n'avait rien perdu de ses réflexes de cambrioleur.
Sur la pointe des pieds, il sonda les lieux, allant d'une pièce à l'autre, restant sur ses gardes au cas où… quelques minutes plus tard, il s'était rendu compte qu'il n'y avait personne dans l'appartement et qu'il était seul maître à bord. Il pouvait donc commencer à faire ses emplettes en toute quiétude. En défonçant une armoire, et en fouillant dans son contenu, il n'allait pas en revenir. En effet, soudainement, il s'était pris pour Ali Baba prononçant la fameuse formule lui donnant accès à la caverne portant le même nom : plusieurs liasses de billets de banque dormaient sereinement, là, sous ses yeux.
C'était tellement beau qu'il fut pris de panique, se saisit du joli pactole qu'il disposa dans ses diverses poches, mit la main sur quelques bijoux dans la même armoire et détala comme un lapin, de peur d'être pris et de gâcher, ainsi, tout ce que pouvait lui offrir cet argent.
Il sortit par là où il était entré et marcha tout droit, sans se retourner, jusqu'à un grand boulevard où il allait, finalement, héler un taxi. C'est à ce moment précis qu'il s'est dit : «Au diable le domicile conjugal, place à la bringue !». Destination Aïn Diab, donc, pour jouir de son petit pactole et rencontrer Hayat.
Quatre jours plus tard, les deux tourtereaux savouraient dans un night-club, sans que Mahmoud le sache, leur dernière soirée ensemble. L'alcool coulait à flot, et c'est la seule chose dont il se souviendra, lorsqu'il recouvra ses esprits. Au moment où le videur de service le réveilla, il était le dernier client que le personnel attendait pour fermer boutique.
Mahmoud avait l'impression d'avoir du plomb dans le crâne. Il lui a fallu quelque minutes afin d'y voir plus clair. « Qu'est-ce que je fais là ? Où est Hayat… ? C'est la demoiselle qui était avec moi… » : le videur ne savait pas de quoi parlait ce client encore dans les nuages. Ça sentait le roussi, Hayat lui a fait les poches avant de disparaître, mais il n'allait pas se laisser faire. Il choisit l'option fatale, celle de faire un scandale, au cas où Hayat serait de mèche avec les tenants de l'établissement. Mauvaise option : la police débarque et prend soin de lui. Il avouera sans se faire prier, tout comme Hayat qui a été appréhendée à son tour.
Celle-ci reconnaîtra avoir glissé un comprimé psychotrope dans le verre de Mahmoud, avant de le délester de quelque 10.000 DH, reliquat du magot. Le cocktail avait de quoi assommer un éléphant, et ce n'est pas le Mahmoud qui dira le contraire. Il aura, au moins, passé une agréable soirée, à la veille de son incarcération pour vol avec effraction et, faut-il le préciser, pour un bon
bout de temps.
•Ce qui est répété séduit
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Il arrive souvent qu'un client, à un stade d'ébriété avancé, dans un bar ou une boîte de nuit, se fasse faire les poches sans s'en rendre compte.
Ce n'est qu'une fois chez lui qu'il remarque qu'il a dû égarer son portefeuille quelque part. Les histoires abondent dans ce registre. Des villas même ont été mises à sac par des groupuscules organisés mettant à contribution des filles qui se font passer pour des filles de joie. En effet, nombre de bandes criminelles ont usé d'un stratagème bien ficelé pour délester des «clients» qui s'attendaient certes à autre chose qu'à se faire plumer.
D'autres utilisent un principe bien simple. Une fille se fait embarquer dans une voiture, demande à son client d'emprunter telle ruelle, d'où surgiront ses complices pour alléger la victime. Les annales de la justice abondent de ce genre d'histoires. Un couple de malfrats avait même réussi à hériter du surnom de « Bonnie and Clyde », du fameux couple américain qui avait défrayé la chronique aux Etats-Unis dans les années 30 du siècle dernier.
Comment éviter d'être bien dans sa peau en pareille circonstance ? Au diable les éperons solaires qui prendront la relève le lendemain. Au diable, également, sa petite famille qui devait s'inquiéter de son absence, sa fillette d'une dizaine d'années notamment. Au diable - bis repetita placent*- ce réveil matinal désagréable sonnant l'heure d'aller au boulot… euh… comment dire… c'est qu'il n'avait pas de boulot, le Mahmoud, donc pas de bis repetita qui vaille. «Syntax error » dira l'ordinateur de service, pour ainsi dire.
Au diable, donc, tout ce qui pourrait s'apparenter au vocable «contrainte», car notre ami n'en a visiblement aucune, époux et père irresponsable qu'il est, doublé de sans emploi. Mahmoud n'allait ainsi pas rentrer chez lui de sitôt, lui qui avait tellement de fric à flamber, ou plutôt à liquéfier, avec à la clé de bons moments à savourer. Destination Aïn Diab alors, toujours dans la soi-disant capitale économique, là où bars et night-clubs offrent le meilleur de ce qui pourrait contribuer à édifier une soirée bien arrosée.
Bien arrosée, sa virée nocturne allait l'être en abondance. L'inconnu à la générosité débordante qu'il était, ce soir là, allait lui concéder le statut de client haut de gamme… et celui de canard à plumer sans modération. Hayat l'avait saisi au vol. De par son expérience, cette prostituée avait rapidement classé notre Mahmoud national parmi les espèces délestables à merci.
Un «haouli» de circonstance, dira-t-on. Elle n'avait pas tort, elle avait visé juste et elle allait être récompensée pour sa perspicacité. Elle usa ainsi de tous ses charmes, jusqu'à se faire inviter à la table de ce quadragénaire, qui dépensait sans compter à partir de toutes ses poches. Plusieurs discussions et une cascade de verres plus tard, Mahmoud et Hayat formaient subitement un couple qu'on aurait cru formé depuis des lustres. Main dans la main, ils quittèrent le night-club en question à destination d'un nid douillet où allait se terminer leur soirée.
Au réveil, il n'était plus question de se quitter. L'on se sentait tellement bien. Ils eurent à passer la journée ensemble, puis la soirée, puis la journée du lendemain, encore la soirée suivante, jusqu'au jour où ce qui devait arriver arriva.
Quatre jours plus tard, rien n'allait plus pour notre ami, lui qui avait financé, pourtant, cette rencontre idyllique du départ jusqu'à la case «arrivée chez les flics».
Richissime, le Mahmoud ? Rien de plus improbable. Sans emploi ni héritage, comment pouvait-il l'être ? C'est juste que… Au fait, Mahmoud, qui quittait un bar s'apprêtait à rentre chez lui ce soir là, quelques heures avant de rencontrer Hayat. Mais les quelques verres qu'il avait dans le nez, en plus de ses poches vides, lui dictèrent autre chose, celle d'aller faire un tour en ville, au cas où il trouverait une occasion d'exercer son métier.
Mahmoud était certes sans emploi à proprement parler, mais il avait un métier en bonne et due forme : celui de cambrioleur ! D'où sa petite randonnée au centre-ville en quête d'une opportunité d'affaires, alors qu'il était au point de héler un taxi pour rentrer cher lui. Il n'en reviendra pas bredouille, de cette virée au centre-ville. L'alcool qu'il avait dans les veines aidant, son audace finira par payer.
En effet, suite à une longue marche, entre deux ruelles, il décela une fenêtre d'un appartement dont le rideau n'était pas baissé. Une aubaine, puisque celui-ci se situait au rez-de-chaussée et, de plus, il n'y avait pas âme qui vive à l'horizon, ni veilleur, ni passant, ni qui que ce soit. Grâce à son agilité, en deux mouvements, il se hissa tel un félin et défonça la fenêtre en question. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, il s'est retrouvé à l'intérieur de l'appartement. Malgré son ébriété avancée, il n'avait rien perdu de ses réflexes de cambrioleur.
Sur la pointe des pieds, il sonda les lieux, allant d'une pièce à l'autre, restant sur ses gardes au cas où… quelques minutes plus tard, il s'était rendu compte qu'il n'y avait personne dans l'appartement et qu'il était seul maître à bord. Il pouvait donc commencer à faire ses emplettes en toute quiétude. En défonçant une armoire, et en fouillant dans son contenu, il n'allait pas en revenir. En effet, soudainement, il s'était pris pour Ali Baba prononçant la fameuse formule lui donnant accès à la caverne portant le même nom : plusieurs liasses de billets de banque dormaient sereinement, là, sous ses yeux.
C'était tellement beau qu'il fut pris de panique, se saisit du joli pactole qu'il disposa dans ses diverses poches, mit la main sur quelques bijoux dans la même armoire et détala comme un lapin, de peur d'être pris et de gâcher, ainsi, tout ce que pouvait lui offrir cet argent.
Il sortit par là où il était entré et marcha tout droit, sans se retourner, jusqu'à un grand boulevard où il allait, finalement, héler un taxi. C'est à ce moment précis qu'il s'est dit : «Au diable le domicile conjugal, place à la bringue !». Destination Aïn Diab, donc, pour jouir de son petit pactole et rencontrer Hayat.
Quatre jours plus tard, les deux tourtereaux savouraient dans un night-club, sans que Mahmoud le sache, leur dernière soirée ensemble. L'alcool coulait à flot, et c'est la seule chose dont il se souviendra, lorsqu'il recouvra ses esprits. Au moment où le videur de service le réveilla, il était le dernier client que le personnel attendait pour fermer boutique.
Mahmoud avait l'impression d'avoir du plomb dans le crâne. Il lui a fallu quelque minutes afin d'y voir plus clair. « Qu'est-ce que je fais là ? Où est Hayat… ? C'est la demoiselle qui était avec moi… » : le videur ne savait pas de quoi parlait ce client encore dans les nuages. Ça sentait le roussi, Hayat lui a fait les poches avant de disparaître, mais il n'allait pas se laisser faire. Il choisit l'option fatale, celle de faire un scandale, au cas où Hayat serait de mèche avec les tenants de l'établissement. Mauvaise option : la police débarque et prend soin de lui. Il avouera sans se faire prier, tout comme Hayat qui a été appréhendée à son tour.
Celle-ci reconnaîtra avoir glissé un comprimé psychotrope dans le verre de Mahmoud, avant de le délester de quelque 10.000 DH, reliquat du magot. Le cocktail avait de quoi assommer un éléphant, et ce n'est pas le Mahmoud qui dira le contraire. Il aura, au moins, passé une agréable soirée, à la veille de son incarcération pour vol avec effraction et, faut-il le préciser, pour un bon
bout de temps.
•Ce qui est répété séduit
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A double délit, double sanction
La prostitution est souvent liée à d'autres comportements réprimés par la loi, dont, justement, le vol. Que ce soit dans un night-club ou dans une chambre d'hôtel, des filles qui ont été contraintes, misère oblige, de vendre leur corps, n'hésiteront point à s'approprier tout ce qui peut leur tomber sous la main. En d'autres termes, l'acte de subtiliser un quelconque objet, ou de l'argent, n'est pas aussi avilissant que le «métier» qu'elles pratiquent, d'où la facilité de passer à l'acte.Il arrive souvent qu'un client, à un stade d'ébriété avancé, dans un bar ou une boîte de nuit, se fasse faire les poches sans s'en rendre compte.
Ce n'est qu'une fois chez lui qu'il remarque qu'il a dû égarer son portefeuille quelque part. Les histoires abondent dans ce registre. Des villas même ont été mises à sac par des groupuscules organisés mettant à contribution des filles qui se font passer pour des filles de joie. En effet, nombre de bandes criminelles ont usé d'un stratagème bien ficelé pour délester des «clients» qui s'attendaient certes à autre chose qu'à se faire plumer.
D'autres utilisent un principe bien simple. Une fille se fait embarquer dans une voiture, demande à son client d'emprunter telle ruelle, d'où surgiront ses complices pour alléger la victime. Les annales de la justice abondent de ce genre d'histoires. Un couple de malfrats avait même réussi à hériter du surnom de « Bonnie and Clyde », du fameux couple américain qui avait défrayé la chronique aux Etats-Unis dans les années 30 du siècle dernier.
