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La ville blanche fait des bulles

Un Festival International de la Bande dessinée à Casablanca ? Encore un festival dans une ville à qui ce genre de manifestation ne semble pas réussir ? C'est l'expérience qui a été tentée par un passionné de la BD et, qui plus est, en a créé d'autres en F

La ville blanche fait des bulles
Il s'appelle Bernard Bertho, fondateur des Relais Culturels et membre du Comité scientifique européen de l'action sociale. C'est un habitué de Casablanca qu'il semble bien connaître et où il a des amis. Après des contacts avec des artistes des beaux-arts de la ville, les autorités municipales et, bien sûr, l'Institut français, le festival de la BD voit enfin le jour. Pas si international que ça, il est pour le moment franco-marocain, et plutôt plus français que marocain, mais enfin «ce n'est qu'un début, il fallait bien commencer par ce qu'il y a».

C'est un peu normal, la BD au Maroc n'en est qu'à son stade de balbutiement, tandis que chez nos amis hexagonaux, c'est une tradition bien ancrée qui donne 3.500 albums par an. «Et puis il faudrait susciter des vocations.»

Depuis le 10 et jusqu'au 14 avril, Casablanca peut donc se vanter, tel un pape, de «faire des bulles». En fera-t-elle l'année prochaine et les autres années à venir ? On ne sait pour le moment et, pour un simple coup d'essai, elle semble réussir à mobiliser beaucoup de gens et d'institutions dont la Commune de la ville pour commencer, qui a apposé son cachet sur l'autorisation, l'Institut français, qui n'en demandait pas tant pour louer ses services et surtout, surtout l'Ecole des beaux-arts de la ville qui, on peut le dire, en est à sa première manifestation artistique d'envergure, après une longue période de léthargie qui la fait presque effacer des mémoires des Casablancais.

Elle a réussi à susciter également des talents bien enfouis. Pour s'en rendre compte, il faudrait faire le déplacement à l'Ecole des beaux-arts et à l'Institut français pour admirer l'exposition de planches des élèves de l'école, ainsi que de quelques artistes en herbe qui, comme des grands, s'adonnent à l'expression artistique.

Il faudrait également écouter les quelques professionnels qui ont fait le déplacement à Casablanca pour animer des ateliers de création avec les jeunes de l'école et dans la rue.

Il s'appelle Jacques Fernandez, né en Algérie ; il a à son actif une quarantaine d'albums. «Les Cahiers d'Orient» c'est lui, une sorte de carnet de route qu'il tient au gré de ses pérégrinations à travers le monde arabe.

De Damas à l'Algérie, il a croqué des visages, des situations, fixé des moments d'histoire. «Au début je me mettais dans la peau d'Eugène Delacroix, qui faisait des croquis de gens et de paysages là il passait au Maroc comme en Algérie, puis j'ai pris mon propre chemin». C'est l'Algérie, son pays natal, qui a eu la part du lion dans ses dessins, «La Guerre fantôme», «Rue de la bombe», «La fille de Djebel Amour» sont ses plus récents travaux.

Jacques Fernandez a eu l'occasion au cours de ce festival d'animer un atelier avec des enfants au parc de l'Ermitage en pleine réfection. «Il y a un projet pour redonner vie à ce parc trop longtemps laissé à l'abandon, dit-il, et le couple qui en a la charge m'a invité à animer un atelier dans cette espace. Je dois dire que les enfants ont un grand potentiel de créativité qu'il suffit de susciter».
Gérard Cousseau a à son compte, lui, pas moins de 80 albums.

Il a tout fait. Du cinéma, des disques, une vidéographie; il est professeur d'art à l'université. Mais il est surtout bédéiste : « Mitendre», «De Jésus à Jospin», «Zelus», « Trognon» sont quelques-uns de ses albums. «La BD c'est le cinéma du pauvre», dit-il. Elle a l'avantage de la liberté. «Gérard Cousseau a lui aussi animé des ateliers avec les élèves des beaux-arts sur les techniques du cadrage en bande dessinée.

J'ai été agréablement surpris par le talent des élèves des beaux-arts ". Pourtant la section BD est fraîchement créée à l'école, depuis l'arrivée de Rahoule à la direction et grâce aux efforts soutenus du professeur Nordine Bennani. «Professeur», oui, mais qui n'en a pas le statut reconnu malheureusement, comme tous les professeurs des écoles des beaux-arts et des conservatoires de musique du pays. Un salaire ridicule, un statut imprécis en touche très impressionniste et donc très précaire. Mais du bon travail avec ses élèves. Résultat : des talents qui s'aiguisent et qui ne demandent qu'à s'exprimer.

Le troisième bédéiste présent au festival est Bruno Bertin, un ancien de la pub converti à la BD. Dix albums à son actif. Des aventures de Vick et Vicky manière Tintin.

Lui aussi a fait profiter les élèves de son expérience aux beaux-arts. «Je suis là pour échanger des expériences, et je dois dire que moi aussi j'en ai appris.»
Casablanca réussira-t-elle à perpétuer ce festival ? En fera-t-elle sa tradition ? On ne sait, en tout cas elle a réussi à mettre sur les rails un événement culturel qui a visiblement sorti de l'ombre l'école des arts de la ville, et intéressé beaucoup de monde dont des artistes en herbe qui découvrent les vertus de l'ouverture et de la curiosité.
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