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Les Occidentaux se liguent contre le Hamas

Les membres du Quartette n'ont pas perdu de temps pour tenter d'imposer au Hamas leur propre partition. Cinq jours à peine après la victoire de l'Organisation islamiste aux élections palestiniennes, les quatre parties prenantes (Union européenne, Etats-Un

Les Occidentaux se liguent contre le Hamas
Si le Hamas ne renonce pas à la violence et refuse de reconnaître l'Etat hébreu, les vivres seront coupés. La pression sur les vainqueurs de l'élection s'annonce très lourde. La Palestine ne peut pas assurer ses fins de mois sans l'aide financière de l'étranger. Son budget de 2005, qui se montait à 2,2 milliards de dollars, a ainsi bénéficié d'un apport européen de 615 millions de dollars tandis que la contribution américaine se montait à 234 millions de dollars.

Au total, les Palestiniens ont reçu l'an dernier à 1,1 milliard de dollars dont 1/3 pour l'aide humanitaire, 1/3 pour les projets et 1/3 pour le soutien budgétaire direct. Sans même attendre l'ouverture de discussions éventuelles entre le Hamas et les bailleurs de fonds, Israël a suspendu le transfert aux autorités palestiniennes de 35 millions de dollars, montant de la TVA et des droits de douane prélevés sur les produits à destination de la Palestine qui transitent par l'Etat hébreu.

Le Hamas, dénonçant « une stratégie du chantage », a opposé une fin de non-recevoir. Dans l'immédiat, ses dirigeants pensent trouver une compensation dans le monde arabe dont la participation, celle des pays pétroliers notamment, est déjà très importante. Mais les grandes lignes du débat qui va dominer l'actualité politique en Palestine, sont déjà fixées. Comme l'OLP qui, à l'appel de Yasser Arafat lui-même, élimina de sa Charte toute référence à la destruction d'Israël, le Hamas finira-t-il par traiter avec l'Etat hébreu ? L'enjeu est d'autant plus important que, selon les sondages, les électeurs palestiniens qui ont donné la victoire au Hamas sont à 84 %, partisans d'un accord négocié avec les Israéliens.

Les réactions internationales ont été conformes au scénario que l'on aurait pu imaginer d'avance : celle, négative des Etats-Unis pour qui le Hamas reste une organisation terroriste ; celle de la France, prudente mais ferme sur les conditions d'un dialogue ; celle d'Angela Merkel, la chancelière allemande qui, en faisant le déplacement pour rencontrer Ehud Olmert et Mahmoud Abbas, s'est révélée surtout soucieuse de souligner le rôle de son pays au sein de l'Union européenne. Il y a convergence des positions mais, au fil des semaines, des nuances ne manqueront pas d'apparaître dont le Hamas essaiera de tirer une marge de manoeuvre. En tout cas ce sommet de Londres prouve combien les conséquences du scrutin palestinien sont jugées importantes par l'ensemble de la communauté internationale.

L'ampleur de la victoire du Hamas a surpris le monde. Pourtant tous les facteurs étaient réunis pour que les plus radicaux l'emportent. L'absence de processus de paix, qui a entraîné le pourrissement de la situation dans les territoires palestiniens, est le premier d'entre eux. L'incapacité du Président palestinien, Mahmoud Abbas, à imposer un semblant d'unité et de discipline est le deuxième élément. Contrairement à toutes les attentes, la mort de Yasser Arafat, il y a quatorze mois, a accéléré un processus de délitement dont on connaît les dangers, ici comme ailleurs.

Mais il ne faut pas négliger la troisième raison de la victoire du Hamas qui n'a rien à voir avec le discrédit des dirigeants palestiniens traditionnels. En effet le Hamas est authentiquement populaire. Dans une population majoritairement pauvre, il a su apporter un encadrement qui, grâce à un remarquable travail de proximité, a représenté une vraie différence dans le domaine social.

Les islamistes palestiniens, longtemps dans l'opposition, voire dans la clandestinité pour les plus durs d'entre eux, vont devoir maintenant gouverner. L'expérience prouve que c'est toujours un passage délicat. C'est sans doute l'une des raisons qui a incité le Hamas à proposer au Fatah d'entrer dans le gouvernement. A ce jour, les militants du Fatah ne s'inclinent pas, descendant dans la rue pour exprimer leur colère. Mais combien d'entre eux ont-ils voté pour leur propre camp, qu'ils étaient nombreux à accuser de corruption et d'incurie ? En réalité, il est difficile de dire pour qui et pour quoi les Palestiniens ont voté.

Et, peut-être plus important encore, contre qui : contre le Fatah, contre Israël, contre les Etats-Unis ?
La confusion n'est pas moins grande en Israël. Le Premier ministre par intérim, Ehud Olmert s'est empressé de déclarer, sitôt le résultat connu, que l'Etat hébreu ne négocierait pas avec un mouvement armé qui prône la destruction d'Israël. Mais ensuite, il a un peu atténué ses propos. En clair : la porte sera entrouverte si le Hamas accepte de tempérer son radicalisme.

Le Hamas qui n'est pas un mouvement monolithique comme tous les mouvements de libération, islamistes ou non, s'est fait entendre par la voix du chef de sa branche modérée, Ismaïl Hamyeh. Ce choix est un indice, plus rapide qu'on ne l'espérait, de la réponse possible à cette question fondamentale: sous la pression des réalités politiques, le Hamas est-il en mesure d'adopter un jour des positions moins drastiques ?
Si le Hamas évolue dans ce sens, pourquoi Israël, qui, pendant dix ans, esquiva une négociation efficace avec le Fatah de Yasser Arafat, n'accepterait-il pas, cette fois, de traiter avec un mouvement qualifié d'extrémiste.

Si Ariel Sharon, ce dur des durs, a tracé la voie en abandonnant Gaza, pourquoi son successeur ne le suivrait-il pas sur ce chemin, se résignant à son tour au réalisme ? Et donc au constat que, désormais force dominante du paysage politique palestinien, le Hamas est devenu incontournable.
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