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«Cinéma et représentation» aux journées cinématographiques de Safi

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Dans le cadre de ses activités universitaires, la filière des études françaises relevant de la faculté poly-disciplinaire de Safi a organisé ses premières journées cinématographiques.

Placée sous le thème « Cinéma et Représentation », cette première édition, qui a eu pour invité d'honneur le grand réalisateur et cinéaste marocain Noureddine Lakhmari, citoyen safiot de souche, vient à point nommé pour sceller tout un programme d'activités copieusement concocté par la filière des études françaises au terme d'une année universitaire d'autant laborieuse.

Si la première journée de cette manifestation a été marquée par la présentation du film iranien du Pr. Rachid Naïm, «Le Silence », projeté dans un amphi plein à craquer, puis par un débat combien instructif, notamment animé par les professeurs Omar Azéroual et Ali Rahali, la journée du lendemain a été consacrée à l'ouverture officielle en présence du doyen de l'université, le Pr. Elmostapha Haddiya, du coordonnateur de la filière, le Pr. Saïd Laqabi, du cinéaste Noureddine Lakhmari, des enseignants universitaires, de plusieurs invités et de la majorité des étudiants de 1re, 2e et 3e années de littérature française.

Ainsi, lors d'une allocution improvisée, le doyen se félicita tout d'abord des efforts déployés pour l'organisation de ces journées dont la substance réside, souligna-t-il, dans les fructueuses communications prévues et dans le débat qui, sûrement, aura de quoi être à la fois passionnant et pertinent.
Parlant proprement du thème, le Pr. Haddiya a essayé de définir en sa qualité de psychosociologue le concept de « représentation » qui, selon lui, est un concept chargé de sens, de connotations et d'interférences.

En effet, cette notion est affectée de références d'ordre psychologique, sociologique, anthropologique et, bien évidemment, de tout ce qui est quasiment fantasmagorique et relevant de l'illusoire. Toutes ces références s'interfèrent et s'enchevêtrent pour illustrer implicitement « la représentation », a-t-il conclu.
Après toutes les allocutions prononcées, l'auditoire s'offrit immédiatement l'opportunité de suivre avec intérêt la première communication intitulée « Le cinéma et l'invraisemblable», présentée par le Pr. Omar Azeroual

Une communication philosophique

L'intervenant, avant de rentrer dans le vif du sujet de sa communication, donnera en guise de préambule le cas du pilote d'avion qui ne panique pas et de l'hôtesse qui garde le sourire en dépit du crash inéluctable auquel ils s'attendaient en raison du manque de kérosène. Après l'inévitable crash, peu de passagers sont morts et les acteurs ne souffrent de rien, à part de quelques blessures sans gravité. Maintenant, dira l'intervenant, on aura compris pourquoi le pilote n'a pas paniqué et pourquoi l'hôtesse n'a pas perdu le sourire ; c'est parce qu'ils savent qu'ils survivront après cet atterrissage forcé.

Cette métaphore est présentée sous une forme philosophique dans l'esprit d'expliciter que dans le cinéma tout est gai, même la tristesse et la mort. Tout paraît beau, même la misère. Tout est poétique, même le danger et la violence. Bref, l'invraisemblance cultive l'illusion, indiqua M. Azeroual, avant d'aborder proprement le thème de sa communication, «Le cinéma et l'invraisemblance ».
La vraisemblance pour l'orateur, c'est tout ce lui qui semble vrai, qui le renvoie à la vérité des choses et lui rappelle les aspects repérables dans le monde. La vraisemblance pour lui n'est donc pas une reformulation exacte du vrai, de la vérité et du monde. Elle est plutôt une reprise approximative du réel.

En effet, le cinéma offre aux cinéastes l'occasion de transgresser les limites du possible. L'art cinématographique représente ce qui est juste, mais qui n'est pas nécessairement vrai. Le cinéma ne reproduit pas tout ce qui est tout à fait réel ; il se nourrit de l'invraisemblable, de ce dont on ne s'attend pas. Après s'être étalé sur les techniques, l'image et le mariage entre tous ces éléments magiques et le cinéma, l'invraisemblable devient subitement vraisemblable, quoique celui-ci (le cinéma) ne peut donc être l'image fidèle de la réalité, car il n'est que « représentation », un processus qui, selon M. Azeroual, constitue l'essence même de la subjectivité d'une réalité donnée.

Hollywood et les Arabes

La deuxième communication, présentée par le Pr. Rachid Naïm à propos du thème « Hollywood et les Arabes », aura apporté pour sa part tous les éclairages nécessaires sur la vision troublante et irréaliste que possède la capitale du cinéma américain sur l'Orient, l'Islam et sur le personnage arabe. La vision subjective et perverse de Hollywood envers l'Orient est une vision millénaire qui remonte à un passé aussi lointain, dans la mesure où des textes romains avaient défini à une époque très ancienne déjà l'Arabe comme étant un être sans jugements de valeurs. Pour étayer davantage son intervention, M. Naïm évoqua également l'appel aux croisades lancé le 27 novembre 1095 par le concile de Clermont et le Pape Urbain II et rappela au passage tout un ensemble de représentations agressives et négatives de l'Arabe, notamment celles contenues dans la chanson de Roland.

Sur le plan politique, la représentation n'étant guère, elle aussi, brillante puisque Hollywood croit que contrairement à l'Occident qui prétend être le seul à posséder toutes les qualités - l'honneur, la science, la raison, la liberté et la puissance-, l'Orient est un continent où se concentrent tous les défauts (terreur, obscurantisme, passion, esclavage et servilité). Pis encore, l'influence de l'esthétique et des thématiques retenues à l'encontre de l'orientaliste, Hollywood les a classées en trois catégories de personnages arabes, à savoir : l'être des Mille et une nuits, le Cheikh et le terrorisme.

Pour mythifier le personnage arabe, Hollywood aura qualifié ce dernier d'anti-occidentaliste par essence et de terroriste. Donc, c'est à partir de cette fausse image de l'Arabe à Hollywood, et quel que soit le scénario, que le personnage arabe est mystifié voire même déshumanisé, conclura M. Naïm.

La troisième et dernière communication présentée aura été celle du réalisateur Noureddine Lakhmari dont l'intervention s'est focalisée sur « la mise en scène et la représentation ». On aura retenu dans l'exposé présenté que le cinéma n'est plus l'apanage d'un seul pays dans la mesure où toutes les nations possèdent des réalisateurs de talent et dont les œuvres ont bien pris place dans le septième art.

Le fait de parler de film de fiction ou de film documentaire, de recherche, pédagogique ou autre, c'est de raconter avant tout une histoire. Mais, il faudrait qu'elle soit racontée de la façon la plus agréable et la plus compréhensible possible. On rejoint là la conception classique du roman réaliste où se présente, dans un ordre apparemment logique, l'évolution de la vie d'un homme ou d'une famille.

L'introduction assez rapide du «star system», c'est-à-dire du principe tendant à focaliser sur une vedette l'intérêt du film, a été d'un effet virtuel sur le développement de façon tyrannique de ce principe de l'histoire bien ou même mal racontée. Selon Lakhmari, le cinéma est devenu de nos jours l'arme la plus puissante dans un monde dominée par l'image. On aura également retenu qu'un film ne peut être intéressant que dans le cas où il aborde un conflit quelconque de la vie courante et crée un débat. Le cinéma comme langage universel a toujours existé au Maroc.

Au cours de son intervention, Noureddine Lakhmari a eu à parler de son téléfilm intitulé « L'affaire » et qu'il devra bientôt livrer à la chaîne TV 2M. Il s'agit d'un film de science-fiction dans lequel une femme de la police scientifique est appelée à enquêter et à mener des investigations dans une affaire de crime perpétré à Aïn Leuh. Ce téléfilm s'inspire, a-t-il précisé, du changement intervenu au niveau des droits de la femme.

Pour les réalisateurs marocains, les sujets ne manquent pas, ils doivent en profiter en s'inspirant de tous ces changement qui sont en train de marquer le Maroc moderne tels les droits de la femme, les droits de l'enfant, les droits de l'homme, l'équité et la réconciliation, etc.

Enfin, pour terminer, il convient de rappeler que l'après-midi du mardi 30 mai a été consacrée à la projection du film « Ali Zaoua », de Nabil Ayouch, savamment animée par les professeurs Malika Rafiq et Mustapha Lemghari.
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