Lui, c'est Saïd Taghmaoui, acteur, grand acteur de son état, domicilié officiellement à Paris mais enjambant sans cesse les méridiens, passant d'un décor sublime à l'autre, sobre voire dénué. Los Angeles, Mexico, l'Afghanistan, la Chine et…tout dernièrement Essaouira pour participer à la Xe édition du Festival Gnaoua, musiques du monde.
Encore que là aussi, il était accompagné de son «coacheur» , car Saïd Taghmaoui se prépare à un long métrage en France qui retrace l'histoire extraordinaire d'un jeune boxeur, juif d'origine, devenu entre les deux guerres mondiales champion – disons le plus jeune champion du monde de boxe, Victor Young Perez, auréolé dans le Paris des années trente, qui fréquentait les surréalistes, entre autres André Breton, Jean Cocteau et qui , au faîte de sa gloire, termina sa vie dans un camp de concentration nazi à Auschwitz.
Saïd Taghmaoui est venu participer à la dixième édition du Festival Gnaoua parce qu'il voue à cette ville une manière de passion et à la musique un attachement sans limites. Mais aussi, comme il le dit, la joie, le bonheur, la spiritualité et la rencontre.
Martelant ses mots, il souligne qu'elle « incarne l'optimisme, l'émotion, beaucoup d'émotion et tout ce que l'homme représente de bienfait »…Sa silhouette, ployée au milieu d'une foule colorée, est, à elle seule, un symbole : elle décline le Maroc pluriel, berbère, cosmopolite et ouvert sur le monde. Depuis qu'il est devenu il y a deux ans consultant, disons « M. cinéma » de la chaîne «Canal +», il a mené une bataille à deux fronts, le tournage et l'expertise.
Il s'est éclipsé pendant de longs mois pour des besoins de tournage de plusieurs films : le premier l'a conduit sur les hauteurs poudreuses de Mexico pour jouer dans « Point d'avance », produit par Columbia et Sony Pictures. Il s'agit d'un film d'action comme Hollywood sait en faire avec un pléiade d'acteurs et de réalisateurs aussi connus que Dennis Quaid, Matthew Fox, Forest Withaker, William Hurt et Sigourney Weaver.
Un casting où Saïd Taghmaoui incarne un des rôles majeurs qui nous révèle un acteur de grand talent. Il a tourné ensuite la série « Lost », à Los Angeles, histoire d'une « cellule dormante» de terroristes pourchassés par un «flic» noir musulman qui, lui-même, en arrive à s'interroger sur le bien-fondé de sa loyauté, taraudé par le doute face à une bande de terroristes. Dans ce film où Saïd Taghmaoui incarne la conscience radicale, se pose le problème d'intégration de la communauté noire d'Amérique.
Dans la foulée de longs mois de tournage, Saïd est reparti ensuite sur les montagnes de Chine, d'Afghanistan pour tourner une œuvre magistrale qu'il évoque avec une tendre et grave émotion : « Les cerfs volants de Kaboul », adaptation du grand livre de l'écrivain américain d'origine afghane, Khaled Husseini, paru aux Etats-Unis en 2003, devenu un best-seller. Il décrit l'histoire de deux « frères de lait », un pachtoune et un hazara dans un Afghanistan déchiré déjà, livré aux soubresauts des années 70-80, de l'invasion soviétique et de l'islamisme radical.
Sur la même lancée, Saïd est revenu en France pour tourner dans le cadre d'une grande série d'été pour la chaîne M6 le rôle d'un flic, Stanislas, commandant enquêteur de son état et poursuivant une bande dangereuse de jeunes des banlieues appâtés par la politique. Le film, qui s'appelle «Les Suspects», a pour acteurs, outre Saïd Taghmaoui, Ingrid Chauvin, star des télés.
Cependant, il faut tout de même le souligner tant le parcours de ces deux dernières années imprègne de son intensité la vie de Saïd, il aura aussi tourné on l'a dit auprès de Dustin Hoffman dans le « Sleeper Cell », cette « cellule dormante » qui, banale ou pas, aura exigé de lui tant d'efforts et de concentration sur le mode d'un fonctionnement à l'américaine qui n'a rien à voir avec le cinéma d'Europe ou de France.
Cette série est menée au pas de charge, elle est considérée comme le nouveau « 24 heures » aux Etats-Unis.
Aujourd'hui, c'est-à-dire en ce mois de juillet et après s'être ressourcé à Essaouira, Saïd Taghmaoui est dans le désert de Tunisie pour des besoins de nouveaux tournages : la vie de Saddam Hussein vue par deux grandes chaînes, l'américaine HBO et l'anglaise BBC qui, prenant le contre-pied de tout ce qui s'est dit sur l'ancien président irakien exécuté par les Etats-Unis, entendent livrer de lui une version moins acidulée, moins cruelle, plus réaliste, en bref ni noire ni blanche, mais approchant la réalité faite de gris.
Saïd Taghmaoui jouera donc le rôle du demi frère de Saddam Hussein, Barzan al-Tikriti, exécuté quelques semaines après l'ancien président irakien. De ce film, il dit avec sobriété et profondeur qu'il «ne cède pas au manichéisme» caractérisé d'un certain cinéma américain. De longues semaines donc sur les hauteurs désertiques de Tunisie qui ressemblent, d'où le choix du site, à la localité de Tikrit, village natal de Saddam et de son demi frère Barzan.
Là aussi, après un casting international qui a duré des semaines, les réalisateurs sont revenus vers l'acteur marocain pour incarner ce rôle qui, ressemblance mais aussi grand talent obligent, fait de lui désormais une vedette incontournable du cinéma américain. C'est en enchaînant un film après l'autre que Saïd Taghmaoui, se refusant à tout répit, entamera l'autre carrière: celle du boxeur juif, Victor Young Perez.
D'origine nord africaine, né à Tunis aux débuts de 1900, il deviendra boxeur, gravira les échelons des rangs pour atterrir sous les feux de la gloire à Paris dans les années trente. Il fait la connaissance d'une femme, actrice, qui jouera un rôle déterminant dans sa vie et, peut-être même, lui sera fatale: Mireille Balin.
Le jeune «Young Perez » devient champion de France des poids mouche, il est célébré partout.
Il fait la connaissance de la comédienne et en tombe amoureux, se sent d'ardeur pour transformer ses combats de boxe en des batailles contre la xénophobie, le racisme et contre l'idéologie exclusionniste de l'extrême droite française, déjà à pied d'œuvre pour faire le lit de la Gestapo et des forces spéciales nazies.
L'amour fou et perdu pour Mireille s'effondre lorsqu'un haut officier nazi de la Werchmarcht tombe amoureux fou de l'actrice et s'en empare quasiment sous pression. C'est alors que le jeune champion de boxe, estimant livrer non seulement un combat d'honneur mais de dignité humaine, s'en va tabasser le haut officier nazi qui l'expédiera dare-dare dans un camp à Auschwitz, fin tragique d'un destin entamé dans les rues de Tunis, poursuivi sous les lumières d'un Paris conquis par Hitler mais vivant de force, achevé dans l'indifférence totale. Saïd Taghmaoui a aimé le scénario et, mettant au-devant son signe emblématique d'Homme et rien d'autre, incarnera ce rôle qui est l'histoire authentique d'un boxeur échoué dans le néant.
Une histoire de morale, d'éthique, la tragédie humanitaire telle que peut la vivre, de nos jours, n'importe quel être humain confronté à l'intolérance et à la xénophobie. Comme le dit encore Saïd, «Victor Young Perez avait gagné tous les combats de boxe, y compris contre le nazisme, le seul combat qu'il ait perdu est celui de Mireille Balin, cette femme fatale… ».
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La Sqala nous renvoie cette image de deux grands du cinéma, à soixante ans d'intervalle. Saïd est aujourd'hui un témoin ému de son temps; à 36 ans il incarne la «conscience déchirée de l'humanité» comme disait Hegel…
Encore que là aussi, il était accompagné de son «coacheur» , car Saïd Taghmaoui se prépare à un long métrage en France qui retrace l'histoire extraordinaire d'un jeune boxeur, juif d'origine, devenu entre les deux guerres mondiales champion – disons le plus jeune champion du monde de boxe, Victor Young Perez, auréolé dans le Paris des années trente, qui fréquentait les surréalistes, entre autres André Breton, Jean Cocteau et qui , au faîte de sa gloire, termina sa vie dans un camp de concentration nazi à Auschwitz.
Saïd Taghmaoui est venu participer à la dixième édition du Festival Gnaoua parce qu'il voue à cette ville une manière de passion et à la musique un attachement sans limites. Mais aussi, comme il le dit, la joie, le bonheur, la spiritualité et la rencontre.
Martelant ses mots, il souligne qu'elle « incarne l'optimisme, l'émotion, beaucoup d'émotion et tout ce que l'homme représente de bienfait »…Sa silhouette, ployée au milieu d'une foule colorée, est, à elle seule, un symbole : elle décline le Maroc pluriel, berbère, cosmopolite et ouvert sur le monde. Depuis qu'il est devenu il y a deux ans consultant, disons « M. cinéma » de la chaîne «Canal +», il a mené une bataille à deux fronts, le tournage et l'expertise.
Il s'est éclipsé pendant de longs mois pour des besoins de tournage de plusieurs films : le premier l'a conduit sur les hauteurs poudreuses de Mexico pour jouer dans « Point d'avance », produit par Columbia et Sony Pictures. Il s'agit d'un film d'action comme Hollywood sait en faire avec un pléiade d'acteurs et de réalisateurs aussi connus que Dennis Quaid, Matthew Fox, Forest Withaker, William Hurt et Sigourney Weaver.
Un casting où Saïd Taghmaoui incarne un des rôles majeurs qui nous révèle un acteur de grand talent. Il a tourné ensuite la série « Lost », à Los Angeles, histoire d'une « cellule dormante» de terroristes pourchassés par un «flic» noir musulman qui, lui-même, en arrive à s'interroger sur le bien-fondé de sa loyauté, taraudé par le doute face à une bande de terroristes. Dans ce film où Saïd Taghmaoui incarne la conscience radicale, se pose le problème d'intégration de la communauté noire d'Amérique.
Dans la foulée de longs mois de tournage, Saïd est reparti ensuite sur les montagnes de Chine, d'Afghanistan pour tourner une œuvre magistrale qu'il évoque avec une tendre et grave émotion : « Les cerfs volants de Kaboul », adaptation du grand livre de l'écrivain américain d'origine afghane, Khaled Husseini, paru aux Etats-Unis en 2003, devenu un best-seller. Il décrit l'histoire de deux « frères de lait », un pachtoune et un hazara dans un Afghanistan déchiré déjà, livré aux soubresauts des années 70-80, de l'invasion soviétique et de l'islamisme radical.
Sur la même lancée, Saïd est revenu en France pour tourner dans le cadre d'une grande série d'été pour la chaîne M6 le rôle d'un flic, Stanislas, commandant enquêteur de son état et poursuivant une bande dangereuse de jeunes des banlieues appâtés par la politique. Le film, qui s'appelle «Les Suspects», a pour acteurs, outre Saïd Taghmaoui, Ingrid Chauvin, star des télés.
Cependant, il faut tout de même le souligner tant le parcours de ces deux dernières années imprègne de son intensité la vie de Saïd, il aura aussi tourné on l'a dit auprès de Dustin Hoffman dans le « Sleeper Cell », cette « cellule dormante » qui, banale ou pas, aura exigé de lui tant d'efforts et de concentration sur le mode d'un fonctionnement à l'américaine qui n'a rien à voir avec le cinéma d'Europe ou de France.
Cette série est menée au pas de charge, elle est considérée comme le nouveau « 24 heures » aux Etats-Unis.
Aujourd'hui, c'est-à-dire en ce mois de juillet et après s'être ressourcé à Essaouira, Saïd Taghmaoui est dans le désert de Tunisie pour des besoins de nouveaux tournages : la vie de Saddam Hussein vue par deux grandes chaînes, l'américaine HBO et l'anglaise BBC qui, prenant le contre-pied de tout ce qui s'est dit sur l'ancien président irakien exécuté par les Etats-Unis, entendent livrer de lui une version moins acidulée, moins cruelle, plus réaliste, en bref ni noire ni blanche, mais approchant la réalité faite de gris.
Saïd Taghmaoui jouera donc le rôle du demi frère de Saddam Hussein, Barzan al-Tikriti, exécuté quelques semaines après l'ancien président irakien. De ce film, il dit avec sobriété et profondeur qu'il «ne cède pas au manichéisme» caractérisé d'un certain cinéma américain. De longues semaines donc sur les hauteurs désertiques de Tunisie qui ressemblent, d'où le choix du site, à la localité de Tikrit, village natal de Saddam et de son demi frère Barzan.
Là aussi, après un casting international qui a duré des semaines, les réalisateurs sont revenus vers l'acteur marocain pour incarner ce rôle qui, ressemblance mais aussi grand talent obligent, fait de lui désormais une vedette incontournable du cinéma américain. C'est en enchaînant un film après l'autre que Saïd Taghmaoui, se refusant à tout répit, entamera l'autre carrière: celle du boxeur juif, Victor Young Perez.
D'origine nord africaine, né à Tunis aux débuts de 1900, il deviendra boxeur, gravira les échelons des rangs pour atterrir sous les feux de la gloire à Paris dans les années trente. Il fait la connaissance d'une femme, actrice, qui jouera un rôle déterminant dans sa vie et, peut-être même, lui sera fatale: Mireille Balin.
Le jeune «Young Perez » devient champion de France des poids mouche, il est célébré partout.
Il fait la connaissance de la comédienne et en tombe amoureux, se sent d'ardeur pour transformer ses combats de boxe en des batailles contre la xénophobie, le racisme et contre l'idéologie exclusionniste de l'extrême droite française, déjà à pied d'œuvre pour faire le lit de la Gestapo et des forces spéciales nazies.
L'amour fou et perdu pour Mireille s'effondre lorsqu'un haut officier nazi de la Werchmarcht tombe amoureux fou de l'actrice et s'en empare quasiment sous pression. C'est alors que le jeune champion de boxe, estimant livrer non seulement un combat d'honneur mais de dignité humaine, s'en va tabasser le haut officier nazi qui l'expédiera dare-dare dans un camp à Auschwitz, fin tragique d'un destin entamé dans les rues de Tunis, poursuivi sous les lumières d'un Paris conquis par Hitler mais vivant de force, achevé dans l'indifférence totale. Saïd Taghmaoui a aimé le scénario et, mettant au-devant son signe emblématique d'Homme et rien d'autre, incarnera ce rôle qui est l'histoire authentique d'un boxeur échoué dans le néant.
Une histoire de morale, d'éthique, la tragédie humanitaire telle que peut la vivre, de nos jours, n'importe quel être humain confronté à l'intolérance et à la xénophobie. Comme le dit encore Saïd, «Victor Young Perez avait gagné tous les combats de boxe, y compris contre le nazisme, le seul combat qu'il ait perdu est celui de Mireille Balin, cette femme fatale… ».
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Un grand du cinéma
Sur une aussi simple et quasi dérisoire image, alors que les cris des mouettes d'Essaouira survolent ses paroles, l'œil vif et le regard profond, lointain même, soudain recroquevillé comme un sage du conte, Saïd Taghmaoui s'abreuve de douceur. Il hume le vent qui fouette calmement les remparts de la ville, là où un certain Orson Welles, sous l'effet d'une méprise avec les producteurs de Hollywood, désargenté, choisit de venir tourner en 1952 son «Othello».La Sqala nous renvoie cette image de deux grands du cinéma, à soixante ans d'intervalle. Saïd est aujourd'hui un témoin ému de son temps; à 36 ans il incarne la «conscience déchirée de l'humanité» comme disait Hegel…
