Toutefois, certains citoyens semblent avoir trouvé une meilleure alternative pour faire des épargnes, échapper aux procédures administratives, aux intérêts bancaires, et surtout aux agios… La recette magique n'est autre que la fameuse «Daret», une tontine à la marocaine.
Le concept est simple : il suffit de se regrouper à cinq ou de préférence à dix, de déterminer une somme de cotisation et de faire un tirage au sort pour énoncer l'ordre des bénéficiaires. Considérée, jadis, comme une forme de micro crédit informel des petites bourses, «Daret» est aujourd'hui très prisée par toutes les bourses sociales, y compris les plus huppées. Hauts cadres et petits employés, et même les femmes au foyer recourent désormais à cette pratique. Chacun l'utilise selon sa capacité financière, ses besoins et ses caprices. Mais d'où vient cette mode d'épargne ? En quoi consiste cette organisation et quels risques recèle t-elle ? Décryptage d'un phénomène social qui n'a rien d'aléatoire…
Au moment où les banques rehaussent leurs frais de dossiers et excellent dans les offres promotionnelles de crédits à la consommation, les tontines (Daret) survivent encore et toujours. En fait, des groupes d'amis, voisins ou collègues se constituent afin de proposer, sur la base de la confiance, des aides à chacun des membres. Leurs cotisations et les remboursements permettent de financer plusieurs désirs et pourquoi pas …des projets.
Les «Dartistes» l'avouent : «Grâce à Daret, nous avons pu réaliser certains de nos souhaits sans nous endetter ni être accablés par des frais inutiles». Voici donc, la pièce motrice qui motive la majorité des adeptes de «Daret».
Ils sont tous unanimes pour dire que c'est une méthode qui repose sur un contrat moral, plus puissant et plus pesant que les écrits formels.
En effet, dans le contexte des tontines, aucune caution n'est exigée. Tout est question d'engagement moral et de parole d'honneur. Il n'y a ni pièce administrative ni garantie à fournir. Et bien entendu, si tout marche comme prévu, «Daret» fait bien des heureux. Car les sommes obtenues sont souvent importantes. «Une dizaine de personnes peut générer 1.000, 10.000 ou même 100.000 DH à chaque échéance. En fait, tout dépend de l'apport. Si certains cotisent avec 100 DH, d'autres se mettent d'accord sur des sommes plus avantageuses», témoigne Nouzha, une «Dartiste». Et oui, c'est cela «Daret», sauf que l'importance des sommes mises en jeu varie selon les possibilités financières des participants.
Car la tontine ne fascine pas uniquement les fonctionnaires, employés ou cadres… Elle fait l'apanage aussi des fortunés, qui, aussi, ont leur «Daret» qui pèse, bien plus lourd. Chaque participation peut facilement frôler les 10.000 DH. La cagnotte mensuelle comptabilise les 100.000 DH. «Mon oncle s'est porté garant de mon cousin. Grâce à la somme touchée, il a pu constituer un capital pour lancer une affaire.
Une fois le tour bouclé, les membres ont décidé de remettre ça, en doublant l'apport. Sauf que lorsqu'il s'agit de grandes sommes, seuls les proches sont admis. Car de tels montants ne peuvent pas être donnés à des personnes qui n'ont pas notre confiance à 100%», témoigne Najlâa, étudiante en commerce international.
Elle rajoute : «Moi aussi je participe à Daret avec mes copines, ça nous permet d'épargner. On est neuf filles, chacune cotise avec 1000 DH…
L'une d'entre nous a même réussi à régler les frais d'assurance et d'immatriculation pour acheter une voiture».
Au moment où Najlaâ et ses copines font des épargnes pour se permettre certain luxe, une autre catégorie de femmes, un peu plus âgées, adulent «Daret». Ce sont des femmes au foyer, des bourses moyennes, qui, avec leurs économies, souvent chipotées du budget des dépenses quotidiennes, participent avec leurs voisines, amies ou membres de la famille à la tontine.
Sauf que chez cette catégorie, le montant n'est pas important : La somme exigée se fixe souvent à 20, 30 et 50 dirhams. Quant à la collecte, elle est hebdomadaire.
«Cela nous fait 200 DH par mois, nous sommes 8 femmes, et à tour de rôle, chacune de nous touche les 1.600 DH de la cagnotte», témoigne Najia, 38 ans et maman de trois filles. Elle poursuit : «Cette somme nous aide énormément, on réalise nos caprices, on chouchoute nos enfants et on fait d'autres épargnes. Une voisine a même pu payer les frais d'hospitalisation de son mari, qui n'avait aucune assurance maladie».
Daret rivale du crédit bancaire ? «Pas si sûr», annonce Mounia, agent chargée de clientèle dans une banque de renommée. Elle poursuit : «j'avoue que ce système est très réussi car il y a de vraies relations sociales. Mais dans des contextes plus individualisés, ce sont les organismes de micro crédit qui prennent le relais. Donc «Daret» ne rivalise nullement avec les banques. En plus, un bon nombre de nos clients participent à la tontine mais nous sollicitent pour contracter un crédit». Sauf qu'il ne faut pas oublier que pour bénéficier d'un crédit, des frais de dossiers sont prélevés de la somme «offerte». «Bien sûr que cela n'a rien à voir avec Daret. C'est tout un système où plusieurs conditions sont prescrites. C'est aussi le contraire de la tontine où la seule exigence est d'être en mesure d'honorer ses engagements avec les autres participants et de respecter les délais», argue notre banquiste.
Toutefois, il faut préciser que Daret est loin d'être sans risque majeur. Car il suffit d'un mauvais payeur pour tout gâcher. Et il n'existe aucun recours formel contre lui puisqu'il n'y a aucun papier signé. Aussi, parfois à force de vouloir épargner de grandes sommes ou à cause de certains participants pas très sérieux, on risque de tout perdre. De toutes manières, il existe un outil formidable pour économiser : le livret d'épargne !
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Chaque souscripteur verse une somme dans un fonds et touche les dividendes du capital investi. Quand un souscripteur meurt, sa part est répartie entre les survivants. Le dernier survivant récupère le capital.
Le premier emprunt tontinier fut finalement créé en 1689 par Pontchartrain pour aider au financement de la guerre contre la Ligue d'Augsbourg. Dans ce premier emprunt tontinier, les souscripteurs étaient répartis entre 14 classes d'âge allant de cinq ans en cinq ans. Cet emprunt fut un échec : seules 5.912 personnes y souscrivirent (en provenance de toutes les classes de la société, y compris les plus modestes, notamment des domestiques). 12.036 «actions» furent souscrites alors que 65.333 étaient autorisées, l'Etat reçut 3.610.800 livres alors qu'il espérait collecter 19.600.000 livres! Soit un taux de réussite de 18%.
Le concept est simple : il suffit de se regrouper à cinq ou de préférence à dix, de déterminer une somme de cotisation et de faire un tirage au sort pour énoncer l'ordre des bénéficiaires. Considérée, jadis, comme une forme de micro crédit informel des petites bourses, «Daret» est aujourd'hui très prisée par toutes les bourses sociales, y compris les plus huppées. Hauts cadres et petits employés, et même les femmes au foyer recourent désormais à cette pratique. Chacun l'utilise selon sa capacité financière, ses besoins et ses caprices. Mais d'où vient cette mode d'épargne ? En quoi consiste cette organisation et quels risques recèle t-elle ? Décryptage d'un phénomène social qui n'a rien d'aléatoire…
Au moment où les banques rehaussent leurs frais de dossiers et excellent dans les offres promotionnelles de crédits à la consommation, les tontines (Daret) survivent encore et toujours. En fait, des groupes d'amis, voisins ou collègues se constituent afin de proposer, sur la base de la confiance, des aides à chacun des membres. Leurs cotisations et les remboursements permettent de financer plusieurs désirs et pourquoi pas …des projets.
Les «Dartistes» l'avouent : «Grâce à Daret, nous avons pu réaliser certains de nos souhaits sans nous endetter ni être accablés par des frais inutiles». Voici donc, la pièce motrice qui motive la majorité des adeptes de «Daret».
Ils sont tous unanimes pour dire que c'est une méthode qui repose sur un contrat moral, plus puissant et plus pesant que les écrits formels.
En effet, dans le contexte des tontines, aucune caution n'est exigée. Tout est question d'engagement moral et de parole d'honneur. Il n'y a ni pièce administrative ni garantie à fournir. Et bien entendu, si tout marche comme prévu, «Daret» fait bien des heureux. Car les sommes obtenues sont souvent importantes. «Une dizaine de personnes peut générer 1.000, 10.000 ou même 100.000 DH à chaque échéance. En fait, tout dépend de l'apport. Si certains cotisent avec 100 DH, d'autres se mettent d'accord sur des sommes plus avantageuses», témoigne Nouzha, une «Dartiste». Et oui, c'est cela «Daret», sauf que l'importance des sommes mises en jeu varie selon les possibilités financières des participants.
Car la tontine ne fascine pas uniquement les fonctionnaires, employés ou cadres… Elle fait l'apanage aussi des fortunés, qui, aussi, ont leur «Daret» qui pèse, bien plus lourd. Chaque participation peut facilement frôler les 10.000 DH. La cagnotte mensuelle comptabilise les 100.000 DH. «Mon oncle s'est porté garant de mon cousin. Grâce à la somme touchée, il a pu constituer un capital pour lancer une affaire.
Une fois le tour bouclé, les membres ont décidé de remettre ça, en doublant l'apport. Sauf que lorsqu'il s'agit de grandes sommes, seuls les proches sont admis. Car de tels montants ne peuvent pas être donnés à des personnes qui n'ont pas notre confiance à 100%», témoigne Najlâa, étudiante en commerce international.
Elle rajoute : «Moi aussi je participe à Daret avec mes copines, ça nous permet d'épargner. On est neuf filles, chacune cotise avec 1000 DH…
L'une d'entre nous a même réussi à régler les frais d'assurance et d'immatriculation pour acheter une voiture».
Au moment où Najlaâ et ses copines font des épargnes pour se permettre certain luxe, une autre catégorie de femmes, un peu plus âgées, adulent «Daret». Ce sont des femmes au foyer, des bourses moyennes, qui, avec leurs économies, souvent chipotées du budget des dépenses quotidiennes, participent avec leurs voisines, amies ou membres de la famille à la tontine.
Sauf que chez cette catégorie, le montant n'est pas important : La somme exigée se fixe souvent à 20, 30 et 50 dirhams. Quant à la collecte, elle est hebdomadaire.
«Cela nous fait 200 DH par mois, nous sommes 8 femmes, et à tour de rôle, chacune de nous touche les 1.600 DH de la cagnotte», témoigne Najia, 38 ans et maman de trois filles. Elle poursuit : «Cette somme nous aide énormément, on réalise nos caprices, on chouchoute nos enfants et on fait d'autres épargnes. Une voisine a même pu payer les frais d'hospitalisation de son mari, qui n'avait aucune assurance maladie».
Daret rivale du crédit bancaire ? «Pas si sûr», annonce Mounia, agent chargée de clientèle dans une banque de renommée. Elle poursuit : «j'avoue que ce système est très réussi car il y a de vraies relations sociales. Mais dans des contextes plus individualisés, ce sont les organismes de micro crédit qui prennent le relais. Donc «Daret» ne rivalise nullement avec les banques. En plus, un bon nombre de nos clients participent à la tontine mais nous sollicitent pour contracter un crédit». Sauf qu'il ne faut pas oublier que pour bénéficier d'un crédit, des frais de dossiers sont prélevés de la somme «offerte». «Bien sûr que cela n'a rien à voir avec Daret. C'est tout un système où plusieurs conditions sont prescrites. C'est aussi le contraire de la tontine où la seule exigence est d'être en mesure d'honorer ses engagements avec les autres participants et de respecter les délais», argue notre banquiste.
Toutefois, il faut préciser que Daret est loin d'être sans risque majeur. Car il suffit d'un mauvais payeur pour tout gâcher. Et il n'existe aucun recours formel contre lui puisqu'il n'y a aucun papier signé. Aussi, parfois à force de vouloir épargner de grandes sommes ou à cause de certains participants pas très sérieux, on risque de tout perdre. De toutes manières, il existe un outil formidable pour économiser : le livret d'épargne !
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D'où vient ce système ?
Le mot tontine vient de Lorenzo Tonti, banquier napolitain qui décide de prendre ses finances en main. Il propose à ses voisins le concept de «Daret». En gros, de se rassembler pour cotiser mensuellement dans une cagnotte qui tourne entre eux, selon un ordre établi par tirage au sort.Chaque souscripteur verse une somme dans un fonds et touche les dividendes du capital investi. Quand un souscripteur meurt, sa part est répartie entre les survivants. Le dernier survivant récupère le capital.
Le premier emprunt tontinier fut finalement créé en 1689 par Pontchartrain pour aider au financement de la guerre contre la Ligue d'Augsbourg. Dans ce premier emprunt tontinier, les souscripteurs étaient répartis entre 14 classes d'âge allant de cinq ans en cinq ans. Cet emprunt fut un échec : seules 5.912 personnes y souscrivirent (en provenance de toutes les classes de la société, y compris les plus modestes, notamment des domestiques). 12.036 «actions» furent souscrites alors que 65.333 étaient autorisées, l'Etat reçut 3.610.800 livres alors qu'il espérait collecter 19.600.000 livres! Soit un taux de réussite de 18%.
