Insolite comme pièce à conviction mais, en période de Aïd Al-Adha, pourquoi ne pas la vider de ces boulettes de "ghanmi" et en user à d'autres fins ? Dimanche 30 décembre de la défunte année, deux jeunes hommes se présentent à la permanence relevant de la police judiciaire de Al-Fida Mers-Sultan, à Casablanca. Le plus âgé, Adil, 30 ans, accuse de vol à l'arraché le plus jeune, Hicham, 15 ans. Ce dernier aurait délesté Siham, 36 ans, de son téléphone portable. Celle-ci se trouve être "l'amie" de Adil. Hicham ne proteste à aucun moment et reconnaît les faits. Sauf que, une fois sa déclaration enregistrée, il s'adresse à l'officier de service, le plus calmement du monde, lui signifiant qu'il avait également une plainte à déposer. L'officier se frotte le front, pendant un moment, le temps de tirer un bon coup sur sa cigarette et de mettre à jour ses données, avant de donner la parole au jeune Hicham.
«Je porte plainte contre cet énergumène pour séquestration, torture et viol…», lançe-t-il. L'officier de service décale sa casquette et se frotte doublement le front cette fois-ci, avant de s'interroger : “C'est quoi votre histoire à tous les deux? Venez un peu par là, on a des choses à tirer au clair tous ensemble…”.
Ce sera chose faite. Encore une fois, face au caractère loquace de ses interlocuteurs, l'officier reste bouche bée, les deux “clients” reconnaissant sans difficulté les dires de l'un et de l'autre. C'est quoi au juste? Un double suicide qui se joue face à lui ? Lui qui, le week-end durant, en a vu de toutes les couleurs dans ce semblant de bureau moisi et rongé par les termites. Il en saura davantage, l'officier, et, au moins, il aura une histoire assez insolite à se mettre sous la dent, le temps que prenne fin sa permanence et qu'il remette les clés de la maison à la relève, le lendemain, lundi.
La nuit du samedi, ou plus exactement dimanche à l'aube, il devait être 4h, quand un jeune couple, quittant un night club sis à Âïn Diab, est abordé par un môme, dans un état aspirant la pitié, et quémandant quelques pièces pour se nourrir. Le môme, ou plutôt l'adolescent, c'était Hicham. Il s'adresse, comme le font, en majorité, les enfants nocturnes de la rue, à la jeune dame.
Cette dernière, Siham en l'occurrence, dans un état d'ébrieté avancé, se prend de pitié pour cet enfant à la carrure chétive. Dans un élan d'affection, motivé par l'alcool qui lui coulait dans les veines, Siham prend le jeune ado dans ses bras, comme par compassion. Quelques secondes à peine s'étaient écoulées que ce dernier se dégage violemment et prend la fuite. Le couple, ne comprenant pas la réaction du môme, allait bientôt la saisir.
Siham glisse alors sa main dans la poche de son manteau qui abritait, peu de
temps auparavant, son téléphone portable.
En effet, profitant de la sollicitude de la jeune femme, Hicham lui avait fait les poches. Dès que ses doigts ont effleuré ce qui ressemblait à un cellulaire, ils l'ont agrippé, puis un petit saut en arrière allait le libérer de cette emprise, certes, agréable, mais dont l'éloignement, le plus rapidement possible, allait lui rapporter quelque chose à vendre.
Ce sera chose faite, encore une fois, en revendant le lendemain à deux sous le téléphone de marque Samsung au souk "Djayjiya". Le couple, après constat qu'il venait d'être allégé d'un bien ayant quand même coûté 3.800 DH, n'était pas en mesure d'engager la moindre course-poursuite à l'encontre du voleur, à cause de l'effet des vapeurs éthyliques. Ils ont alors foncé, tête baissée, vers un taxi, à destination du petit appartement qu'ils habitent en bons concubins qui se respectent. Demain sera un autre jour, se réconfortaient-ils.
Ils n'avaient pas tort, car ce sera effectivement un autre jour. Comme par hasard, le jeune couple voulait faire la fête encore une fois. Ils se sont dirigés, comme à leur accoutumée, vers leur lieu de prédilection, le même où ils étaient la veille. Sur place, quelle ne fut pas leur surprise de reconnaître leur agresseur.
Adil le saisit au cou, puis, sur l'intervention de sa compagne, se raisonne à lâcher du lest, pour, finalement, l'inviter à partager leur soirée arrosée. Étrange comportement. «Mon intention était de le mettre en confiance, après avoir su qu'il n'était plus en possession de mon téléphone, afin qu'il m'indique l'acheteur et que je puisse récupérer mon bien. Dans le cas contraire, je comptais porter plainte contre lui», expliquera Siham aux enquêteurs. La soirée s'achèvera et le couple ira même jusqu'à inviter le jeune Hicham à partager leur toit, le temps d'une nuit.
Une fois sur place, Siham fera preuve de beaucoup de générosité, en préparant à manger à Hicham. Repas qu'il ingurgitera d'une seule traite, avant d'aller s'assoupir. Le pire restait à venir.
Le lendemain, Siham évacua les lieux assez tôt pour quelqu'un qui a fait la fête jusqu'à une heure tardive. Hicham dormait encore quand il fut réveillé par un coup de pied, quelque part dans le corps. Ouvrant difficilement les yeux, ses oreilles lui apporteront cette phrase toute crue : “Ôte ton pantalon, fils de p…”. C'était Adil, l'air menaçant, qui était derrière cette formule, comment dire… aussi sèche que déconcertante.
Hicham essaya de se débattre. En réponse, il recevra une pluie de coups de poings et se retrouvera avec un œil gauche au beurre noire et un bleu sous l'oreille droite. Avant de saisir ce qu'il lui arrivait, Hicham se retrouvera avec une broche chauffée à blanc entre les yeux.
Adil lui intimera l'ordre d'enlever son pantalon sans trop discuter, au risque de prendre la broche, rougie au feu, quelque part sur le visage. Il obtempérera sans trop entrer dans les détails. Adil ne s'arrêtera pas en si bonne initiative et lui portera plusieurs brûlures au niveau des fesses, avant de l'obliger à lui faire une fellation.
À cet effet, un médecin de l'hôpital Abou Ouafi, constatant les traces de torture, délivrera un certificat médical de trente jours en faveur de la victime. «Je me suis laissé faire afin d'éviter un rapport sexuel contre nature, je me disais que c'était un moindre dégât…», peut-on lire sur le rapport établi par la PJ Al-Fida Mers-Sultan, en tant que déclaration de Hicham, en présence de son père.
Une fois sa besogne accomplie, Adil retrouvera son calme, mais empêchera Hicham de quitter les lieux. Dès que Siham aura regagné le foyer concubin, Adil se saisira de Hicham et prendra la direction du commissariat le plus proche. On connaît la suite.
Hicham sera poursuivi pour vol, tandis que Adil, qui a affirmé avoir agi par vengeance et sous maîtrise de l'alcool, héritera d'un chef d'accusation où seront mentionnés séquestration, torture et viol contre-nature. Siham, quant à elle, sera poursuivie pour débauche. Comme quoi, une simple beuverie peut bien se terminer en véritable mélodrame !
«Je porte plainte contre cet énergumène pour séquestration, torture et viol…», lançe-t-il. L'officier de service décale sa casquette et se frotte doublement le front cette fois-ci, avant de s'interroger : “C'est quoi votre histoire à tous les deux? Venez un peu par là, on a des choses à tirer au clair tous ensemble…”.
Ce sera chose faite. Encore une fois, face au caractère loquace de ses interlocuteurs, l'officier reste bouche bée, les deux “clients” reconnaissant sans difficulté les dires de l'un et de l'autre. C'est quoi au juste? Un double suicide qui se joue face à lui ? Lui qui, le week-end durant, en a vu de toutes les couleurs dans ce semblant de bureau moisi et rongé par les termites. Il en saura davantage, l'officier, et, au moins, il aura une histoire assez insolite à se mettre sous la dent, le temps que prenne fin sa permanence et qu'il remette les clés de la maison à la relève, le lendemain, lundi.
La nuit du samedi, ou plus exactement dimanche à l'aube, il devait être 4h, quand un jeune couple, quittant un night club sis à Âïn Diab, est abordé par un môme, dans un état aspirant la pitié, et quémandant quelques pièces pour se nourrir. Le môme, ou plutôt l'adolescent, c'était Hicham. Il s'adresse, comme le font, en majorité, les enfants nocturnes de la rue, à la jeune dame.
Cette dernière, Siham en l'occurrence, dans un état d'ébrieté avancé, se prend de pitié pour cet enfant à la carrure chétive. Dans un élan d'affection, motivé par l'alcool qui lui coulait dans les veines, Siham prend le jeune ado dans ses bras, comme par compassion. Quelques secondes à peine s'étaient écoulées que ce dernier se dégage violemment et prend la fuite. Le couple, ne comprenant pas la réaction du môme, allait bientôt la saisir.
Siham glisse alors sa main dans la poche de son manteau qui abritait, peu de
temps auparavant, son téléphone portable.
En effet, profitant de la sollicitude de la jeune femme, Hicham lui avait fait les poches. Dès que ses doigts ont effleuré ce qui ressemblait à un cellulaire, ils l'ont agrippé, puis un petit saut en arrière allait le libérer de cette emprise, certes, agréable, mais dont l'éloignement, le plus rapidement possible, allait lui rapporter quelque chose à vendre.
Ce sera chose faite, encore une fois, en revendant le lendemain à deux sous le téléphone de marque Samsung au souk "Djayjiya". Le couple, après constat qu'il venait d'être allégé d'un bien ayant quand même coûté 3.800 DH, n'était pas en mesure d'engager la moindre course-poursuite à l'encontre du voleur, à cause de l'effet des vapeurs éthyliques. Ils ont alors foncé, tête baissée, vers un taxi, à destination du petit appartement qu'ils habitent en bons concubins qui se respectent. Demain sera un autre jour, se réconfortaient-ils.
Ils n'avaient pas tort, car ce sera effectivement un autre jour. Comme par hasard, le jeune couple voulait faire la fête encore une fois. Ils se sont dirigés, comme à leur accoutumée, vers leur lieu de prédilection, le même où ils étaient la veille. Sur place, quelle ne fut pas leur surprise de reconnaître leur agresseur.
Adil le saisit au cou, puis, sur l'intervention de sa compagne, se raisonne à lâcher du lest, pour, finalement, l'inviter à partager leur soirée arrosée. Étrange comportement. «Mon intention était de le mettre en confiance, après avoir su qu'il n'était plus en possession de mon téléphone, afin qu'il m'indique l'acheteur et que je puisse récupérer mon bien. Dans le cas contraire, je comptais porter plainte contre lui», expliquera Siham aux enquêteurs. La soirée s'achèvera et le couple ira même jusqu'à inviter le jeune Hicham à partager leur toit, le temps d'une nuit.
Une fois sur place, Siham fera preuve de beaucoup de générosité, en préparant à manger à Hicham. Repas qu'il ingurgitera d'une seule traite, avant d'aller s'assoupir. Le pire restait à venir.
Le lendemain, Siham évacua les lieux assez tôt pour quelqu'un qui a fait la fête jusqu'à une heure tardive. Hicham dormait encore quand il fut réveillé par un coup de pied, quelque part dans le corps. Ouvrant difficilement les yeux, ses oreilles lui apporteront cette phrase toute crue : “Ôte ton pantalon, fils de p…”. C'était Adil, l'air menaçant, qui était derrière cette formule, comment dire… aussi sèche que déconcertante.
Hicham essaya de se débattre. En réponse, il recevra une pluie de coups de poings et se retrouvera avec un œil gauche au beurre noire et un bleu sous l'oreille droite. Avant de saisir ce qu'il lui arrivait, Hicham se retrouvera avec une broche chauffée à blanc entre les yeux.
Adil lui intimera l'ordre d'enlever son pantalon sans trop discuter, au risque de prendre la broche, rougie au feu, quelque part sur le visage. Il obtempérera sans trop entrer dans les détails. Adil ne s'arrêtera pas en si bonne initiative et lui portera plusieurs brûlures au niveau des fesses, avant de l'obliger à lui faire une fellation.
À cet effet, un médecin de l'hôpital Abou Ouafi, constatant les traces de torture, délivrera un certificat médical de trente jours en faveur de la victime. «Je me suis laissé faire afin d'éviter un rapport sexuel contre nature, je me disais que c'était un moindre dégât…», peut-on lire sur le rapport établi par la PJ Al-Fida Mers-Sultan, en tant que déclaration de Hicham, en présence de son père.
Une fois sa besogne accomplie, Adil retrouvera son calme, mais empêchera Hicham de quitter les lieux. Dès que Siham aura regagné le foyer concubin, Adil se saisira de Hicham et prendra la direction du commissariat le plus proche. On connaît la suite.
Hicham sera poursuivi pour vol, tandis que Adil, qui a affirmé avoir agi par vengeance et sous maîtrise de l'alcool, héritera d'un chef d'accusation où seront mentionnés séquestration, torture et viol contre-nature. Siham, quant à elle, sera poursuivie pour débauche. Comme quoi, une simple beuverie peut bien se terminer en véritable mélodrame !
