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Le centre Tit Mellil ne cesse de s'améliorer

Vêtue d'une djellaba noire, devenue grise à cause d'une forte et longue exposition aux rayons de soleil, Rkia, la soixantaine, n'a pas cessé de répéter qu'elle refuse que son unique fille soit au courant de son transfert au centre social Tit Mellil, après avoir été appréhendée ‘'en flagrant délit de mendicité''.

Le centre Tit Mellil ne cesse de s'améliorer
«Ma fille est diabétique, si elle apprend que je suis arrêtée, elle aura une crise. S'il vous plaît, ne le lui faites pas savoir».
Ses “supplices qui ne tardent pas à tomber à l'eau''. Car pour les responsables du centre, les mensonges sont l'unique issue de secours pour ces mendiants. «Nous avons tellement été confrontés à des mensonges que nous ne croyons plus à rien. En plus, les “résidents'' n'ont pas vraiment le choix. S'ils veulent être relâchés, ils doivent présenter une garantie. Un membre de la famille doit s'engager, en signant un document, à veiller à ce que le mendiant ne récidive pas», explique le directeur du centre, Abdelkrim Sebbar, qui précise que le centre abrite actuellement 625 résidents entre mendiants, sans-domicile fixe, malades mentaux et autres mineurs.

Ceci dit, si notre équipe a visité les locaux de ce centre situé à la périphérie de la métropole, c'est pour se rendre compte
non seulement de l'état d'avancement des projets entamés en 2007, mais pour connaître également l'impact de l'Initiative nationale pour le développement humain sur la vie des résidents.

En effet, en suivant les instructions de l'INDH, pour lutter contre la pauvreté, la vulnérabilité, la précarité et l'exclusion sociale et instaurer une dynamique en faveur du développement humain durable, «nous avons proposé des projets d'infrastructures au centre social Tit Mellil avec la participation effective des bénéficiaires et la collaboration étroite de tous les services qui œuvrent dans le domaine. Les projets réalisés ont contribué à l'amélioration des conditions de vie et des prestations offertes aux bénéficiaires et ce dans le but de leur garantir le respect et la dignité humaine», précise A. Sebbar.

Ceci dit, plusieurs réalisations ont été enregistrées lors de la dernière année : il s'agit en premier lieu de l'équipement des pavillons en plaques solaires et en étanchéité. En effet, cette disponibilité en permanence d'une eau courante chaude est nécessaire pour traiter quotidiennement et sur place les cas des malades alités et mentaux. Les plaques ont aussi permis d'économiser de l'énergie dans le cadre de la rationalisation des dépenses.
Le second projet concerne la construction d'une “salle de restauration'' afin d'encourager les bénéficiaires à avoir un esprit de vie en collectivité, les sensibiliser à un climat familial et de fraternité, et améliorer la qualité des prestations qui leur sont offertes.

Dans la même vision de fraternité, un terrain de sports a été construit. Cet ouvrage a contribué favorablement, depuis le début de son exploitation, à offrir aux jeunes bénéficiaires un espace adéquat leur
permettant de renforcer leurs compétences et performances sportives. Il a aussi permis à l'équipe du centre l'ouverture sur le monde extérieur à travers des rencontres avec les équipes des administrations, de quartiers et des établissements scolaires.

Enfin, pour donner aux plus jeunes résidents, âgés entre 16 et 25 ans, des chances de réintégrer la société et de pouvoir s'en sortir financièrement, le centre a mis en place des ateliers de formation professionnelle, et ce dans le cadre d'un partenariat avec le ministère du Développement social.

Et c'est le cas de Saber F. qui a été appréhendé en plein vagabondage. Né le 12 février 1987 à Fès, Saber n'a pas pu dépasser la 8e année de l'enseignement fondamental : «Dès mon jeune âge, je constatais que mes parents sont en total désaccord. En 2003, j'ai raté mon année scolaire et j'ai fugué. Je suis resté à Fès pendant deux mois. Après, je suis venu à Casablanca pour chercher du travail et où j'ai vécu pendant huit mois à la gare routière d'Ouled Ziane. Peu à peu, j'ai commencé à me droguer.

Le 2 janvier 2004, j'ai été admis à ce centre où j'ai poursuivi une formation qualifiante en coiffure et esthétique». Et le travail de Saber a bien payé. En effet, il aura son diplôme dans quelques jours. Il compte rejoindre ses parents à Fès. Ce jeune homme avoue que s'il n'a pas été admis au centre, sa vie serait totalement perdue. Son dernier souhait est d'être soutenu par une association pour le financement de son salon de coiffure. Si Saber a été appréhendé en plein “délit de vagabondage'', Mi Zahia, quant à elle, a été délaissée devant le portail du centre.

Née en 1920 à Berrechid, Zahia. B a été mariée pendant 62 ans et a eu deux enfants. Sa vie a basculé après la mort de son époux. Elle a trouvé refuge au centre. «Après le décès de mon mari en 2004 et vu que mes enfants travaillent en France, je vivais avec mes deux belles filles. En décembre 2007, lors des vacances annuelles de mes enfants, leurs épouses ont proposé mon placement dans une structure sociale. Chose que j'ai refusée catégoriquement. Le 10 janvier dernier, mes deux enfants m'ont informée qu'ils vont m'accompagner pour visiter ma s?ur à Casablanca. Malheureusement, ce n'était qu'un mensonge. En fait, ils m'ont jetée devant la porte du centre et ils ont pris la fuite», raconte Zahia qui a été accueillie au centre dans un état lamentable.

Après un suivi médical et un soutien social, elle se sent aujourd'hui en bonne forme. «J'ai demandé au directeur de ne pas autoriser mes enfants à me rendre visite. Je ne veux plus les voir. Je ne les ai pas délaissés quand ils étaient petits, mais eux ils m'ont quittée lorsque je suis devenue une vielle femme. Au centre, je vis avec d'autres femmes de situations sociales différentes. C'est un grand soulagement pour moi».

Créé en 1999, le centre social de Tit Mellil a longtemps été qualifié de «décharge humaine». Depuis 2006, il a connu plusieurs changements et a su “se débarrasser de cette qualification''. Il a bénéficié, dans le cadre de l'INDH et du plan national contre la précarité, d'un budget global de 4,9 millions DH, réparti en deux programmes : le programme transversal (2,4 millions DH) et le programme de précarité (2,5 millions DH).
A l'époque, les réalisations ont porté principalement sur la mise à niveau des structures de base et sur la qualification sociale des résidents afin d'offrir à chacun l'intégration qui lui convient, à savoir une intégration familiale, économique, sociale ou institutionnelle.

Cette mise à niveau a donc permis en 2005 la construction de deux nouveaux pavillons qui ont été équipés en totalité.

«Ces aménagements ont concerné une surface de 1.200 m2 dispatchée en 14 dortoirs, 4 salles, des blocs sanitaires dotés d'unités de réanimation d'urgence et d'aménagements extérieurs», explique Sebbar. Il poursuit : «Concrètement, la construction de ces deux espaces nous a permis d'alléger le sureffectif constaté antérieurement au centre, d'augmenter la capacité d'accueil, car le nombre des pavillons dans le centre est passé de sept à neuf unités et de répartir les bénéficiaires des services du centre selon leurs âges, sexes et situations sociales».

Concernant le plan de lutte contre la précarité, le bilan est vraisemblablement positif. Grâce à un budget de 499.200 DH, les pavillons du centre ont été bien équipés. «L'acquisition de tous ces équipements a été principalement conçue dans l'esprit d'améliorer les conditions de vie des bénéficiaires. Quant à la salle des fêtes, elle sert de lieu de rencontres et de manifestations culturelles et artistiques», déclare le directeur du centre.

Aussi, le centre a investi, en 2007, dans la formation de son personnel pour assurer un bon fonctionnement. Ainsi, 22 employés ont bénéficié d'une formation spécialisée en gestion et éducation, 7 agents de la direction, les surveillants généraux et les assistants sociaux ont été formés pour la maîtrise de l'action sociale et la gestion des institutions.

Quatre enquêteurs sociaux ont déjà été affectés aux unités d'assistance mobiles dans le cadre de la lutte contre la mendicité. Les équipes ne cessent pas de doubler d'efforts pour venir en aide aux résidents du centre. «Nous ne faisons plus que de l'écoute mais de l'audition. Il ne s'agit plus d'écouter la personne mais de lui prêter attention, lui poser des questions pour obtenir plus d'informations afin de pouvoir lui offrir l'aide adéquate», conclut Abdelkrim Sebbar.
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Centre de santé

L'acquisition du matériel nécessaire au développement du centre de santé Tit Mellil a été conçue pour atteindre plusieurs objectifs. Il s'agit, selon les responsables, de garantir une meilleure prise en charge des patients et assurer des prestations qu'ils n'avaient pas auparavant (échographie, ECG électrocardiographie, labstix, examen des urines, glycomètre pour mesurer la glycémie, oxygénothérapie, boite chirurgicale pour la petite chirurgie sur place, matériel de perfusion, plâtre en cas de fracture, un négatoscope pour les radiographies, etc)

Cependant, il sied de signaler plusieurs avantages, notamment ceux de la proximité, de la possibilité d'établir un diagnostic sur place et de pouvoir décider soit de traiter les patients ou de les adresser à une unité spécialisée ainsi que d'être plus précis dans la rédaction des “fichiers de liaison''. Il s'agit aussi d'une certaine assurance et sentiment de quiétude pour les bénéficiaires du centre. Ces derniers se sentent plus à l'aise et plus confiants.
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