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La CDT revient à la charge ce week-end

C'est bien le moment pour les syndicats de se poser des questions, disons-le, existentielles. L'ambiance des deux grèves, la première nationale du 13 mai et la deuxième, de mercredi dernier, qualifié ostensiblement de générale doivent acculer les Centrales à se remettre en question principalement sur leur capacité de mobiliser les foules. Selon les chiffres officiels, la grève CDT a enregistré un taux modique de participation variant entre 2,5 et 5%.

La CDT revient à la charge ce week-end
Mais, Noubir Amaoui, son secrétaire général, pousse la subjectivité à ses limites en annonçant un taux de 60%. Dans la réalité, la ville de Casablanca, baromètre et fief historique de la Confédération a vécu ce 21 mai, presque aussi normalement qu'un jour normal. Que peut-on alors déduire d'un débrayage qui n'aurait été en fin de compte qu'une tempête dans un verre d'eau ? Aujourd'hui, de l'avis même des ténors syndicalistes, le taux de syndicalisation fluctue à peine entre 4 et 6%. Cela fait longtemps que ni les slogans ni les idées des Centrales en vue ne chatouillent la conscience ouvrière. Le cahier revendicatif, toutes obédiences syndicales confondues, est toujours le même à quelques petites nuances près liées aux clivages idéologiques et/ou politiques.

En tout cas, le dialogue social, lancé en février dernier, et au-delà de son aspect formel, a dévoilé bien des facettes de la réalité. Malgré elles, les cinq centrales représentatives ont fini par faire éclater au grand jour, les dissensions qui les traversent, le manque voire l'absence de cohésion et en épilogue, aussi singulier qu'étonnant, deux grands syndicats qui se tirent mutuellement des balles dans les flancs. A la veille du «débrayage» de la CDT, l'UGTM, proche de l'Istiqlal est descendue de tout son poids dans la rue pour contrecarrer l'appel confédéral et décréter par la même occasion le 21 mai, journée nationale du travail.

Fidèle aussi à ses «bonnes» vieilles méthodes, le syndicat d'Amaoui n'a pas fait dans la dentelle lorsque ses militants, épaulés par ceux d'Al Adl Wal Ihssane, ont menacé les potentiels récalcitrants. L'entrée en ligne des protégés d'Abdessalam Yassine n'est pas une nouveauté, mais elle renseigne, plutôt, sur le niveau de faiblesse d'un syndicat qui se cramponne à des bouées de sauvetage. Le risque est que ce vide syndical laisse libre cours à des formes de revendication biaisées, aux antipodes de l'esprit de négociation ou nourri de visées obscures.

Les syndicats de la place auront tout intérêt à capitaliser sur leur expérience et sur une certaine légitimité pour éviter l'irréparable. Leur mission d'encadrement doit être aujourd'hui plus que jamais un sujet de réflexion.
Sur un autre registre, celui lié à la stratégie syndicale, on a senti durant ces concertations sociales, un retour à l'escalade tous azimuts. Si le gouvernement est cloué au pilori, il en est de même pour le patronat.

Les syndicats ont dénoncé en chœur l'incrimination des charges salariales chaque fois que l'entreprise est confrontée à la concurrence du marché mondial. Le mal est ailleurs, estiment-ils à savoir des carences en gouvernance, formation et R&D. Amaoui n'a pas manqué de jeter de l'huile sur le feu en annonçant en grande pompe le retrait de son groupe parlementaire de la Chambre des conseillers. Plus encore, le vieux routier, après une grève sans retentissement, continue d'amuser la galerie en annonçant un méga sit-in de tous les secteurs, dimanche prochain à Casablanca.

Quant aux raisons de ce recours inopiné à l'escalade, Abdelkader Zaer, deuxième homme de la CDT, reste vague renvoyant à ce qui pourrait se passer en ce jour du week-end. Vraisemblablement, le syndicat compte plutôt sur ses militants pour chauffer l'ambiance puisque les travailleurs et autres sympathisants ont donné le ton en boudant la grève générale du 21 mai.

Face à la débandade syndicale, le gouvernement n'a pas déraillé de sa ligne, maintenant sa décision d'appliquer tous les engagements issus du dialogue social en y injectant la sacrée somme de 16 milliards de DH. Décryptons, le package gouvernemental retient une revalorisation du Smig de 10% sur deux années et pour la première fois une hausse de même envergure du Smag (agricole), une amélioration des allocations familiales de 50DH (les portant de 150 à 200 DH).

Une baisse de l'IR de 42 à 40% en 2008 pour arriver à 38% en 2011, dès 2009, les salaires de 3200 DH seront exonérés puis à terme ceux de 3500, 95% des retraités exonérés d'IR en 2011 et une revalorisation des pensions minimales principales de 500 DH/mois à 600 DH. Quant aux revenus dans la fonction publique, ils doivent connaître une amélioration de 10,4% sur la période 2008-2011 avec une augmentation minimale nette de 300 DH par mois. On a le sentiment légitime que le gouvernement, en prenant à son compte d'appliquer ses propositions, a du faire un dialogue social avec lui-même.

Les syndicats surfent quant à eux sur une autre vague, celle de l'escalade ô combien mobilisatrice des troupes en pareilles circonstances. Du moins jusqu'en septembre prochain où les trois partenaires sociaux se sont donné rendez-vous pour reprendre les négociations. Gouvernement, syndicats et patronat auront au moins convenu d'une chose : institutionnaliser le dialogue social pour lui ôter ce cachet de saisonnalité et d'improvisation qui le vidait de sa vraie vocation. Loin de la cacophonie des tractations sociales, le syndicalisme marocain se trouve aujourd'hui sur la corde raide, ballotté entre son devoir revendicatif et les nouveaux paramètres de l'économie mondialisée qui requiert plus de participation, voire d'apaisement.
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