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Accueil next L'humain au centre de l'action future

Le journaliste dans le drame arabe

Ils sont inséparables, intimement complémentaires voire indissociables ! La presse et les créateurs ont toujours été si liés qu'ils ne pouvaient pas vivre les uns sans les autres. Amour vache ou simple relation professionnelle, les artistes ont besoin de la plume des journalistes comme ces derniers ont besoin des créations artistiques.

Le journaliste dans le drame arabe
C'est leur prétexte pour écrire, produire et servir d'intermédiaire entre artistes et grand public. Dans le «drama» arabe de ce ramadan, plusieurs feuilletons mettent en scène cette relation. Des héros journalistes qui mènent leurs vies professionnelle et privée en parallèle et entraînent le téléspectateur dans leur univers. C'est du moins ce que voulaient décrire les réalisateurs et scénaristes de «Baâda al fourak» («Après la séparation» de Shirine Adel) et «Fi ayden amina» de Mohammed Âazizia. Mais le rendu a été d'une invraisemblance frappante, pour notre malchance.

Commençons par Amina, l'héroïne de «Fi ayden amina». Cette journaliste, connue par sa grande expérience, travaille dans un journal «indépendant» sous la direction d'un rédacteur en chef rancunier.
En plus de ses déboires personnels avec un mari infidèle, elle doit faire face aux obstacles et problèmes que lui cause son chef. Jusqu'à maintenant, rien de choquant, un scénario a besoin de petits nœuds pour relever le goût, surtout s'il n'y en a pas. Mais les choses vont se gâter aussitôt rapprochées de l'univers professionnel de la journaliste star campée par une Yousra égale à elle-même. Voulant faire d'Amina un personnage positif et attendrissant, les scénaristes ont fini par le ridiculiser à force d'idéalisation exagérée.

Quand la journaliste part pour la couverture d'un malheureux accident de fuite de gaz qui a causé la mort de deux adolescents, au lieu de faire son travail qui consiste à poser des questions, «à inspecter le lieu de l'accident» ; la journaliste "expérimentée" s'est réfugiée dans sa voiture.

Pourquoi faire ? Pour pleurer à chaudes larmes tandis que son photographe prenait des photos de n'importe quoi. Le pire arrive ; une fois rentrée à la rédaction, elle se ressaisit de son émotion et annonce en grandes pompes à une rédaction qui n'a d'yeux que pour elle, qu'elle a dans la poche une collection d'enquêtes sur le travail des enfants et leur exploitation. Comment elle a fait ? On se le demande toujours. En parlant de rédaction, celle de «Fi ayden amina» est composée de jeunes journalistes qui ne font que suivre Amina partout où elle passe.

Croyez-le ou pas, ils lui collent aux talons en permanence. Visuellement, c'est tellement agaçant de voir l'héroïne traînant derrière elle une ribambelle de journalistes. La contradiction frappante est également un trait de personnalité chez Amina. Intègre comme elle est, elle n'hésite pas toutefois à faire appel au clientélisme pour régler des problèmes provoqués afin de donner de l'allure à une intrigue fade. Lorsque son enthousiasme la pousse à infiltrer un dangereux gang spécialisé dans le kidnapping des enfants, son rédacteur en chef va s'amuser à publier sa photo et son nom sur la Une de son journal. Ceci en sachant qu'elle est toujours en mission !!! Elle est sauvée parce qu'on est tombé amoureux d'elle au gang (par miracle) et elle vient lancer deux mots tièdes à la figure de son chef, qui s'amuse en riant et en blaguant.

Effarant ! Une scène des plus invraisemblables décrivant une situation des plus explosives qui confirme une seule chose : celui qui a écrit ce feuilleton n'en sait rien sur la presse, ni sur son mode d'emploi, ni sur les journalistes. Les Egyptiens, déstabilisés par le succès grandissant des Syriens, passent par une période creuse. C'est une crise de thèmes qu'ils vivent là. D'ailleurs cette année, on remarque que les thématiques se ressemblent : les enfants de la rue, les bonnes et les super journalistes, et c'est servi à toutes les sauces.
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La confusion

De son côté, notre ami Khaled Saleh y va également de sa touche. Dans «Après la séparation», il est Youssef, le héros, un journaliste talentueux qui a eu des débuts assez louches. Amoureux d'une bonne puis mariés, il essaie de s'en cacher pour ne pas «compromettre son avenir» ! Classique comme intrigue mais toujours passable, la surprise serait ailleurs. Youssef, après avoir été expulsé de l'université parce qu'il aidait sa copine à tricher, commence à écrire. Il accède aux journaux de la place, tant bien que mal et publie des articles sous les noms des responsables de ces journaux.

Apparemment, le jeune journaliste (qu'il ne l'est pas autant, vu l'âge de Khaled Saleh) a beaucoup de talent mais à aucun moment le téléspectateur n'a droit de savoir en quoi il écrit, sur quoi et comment !!! Du flou qui persiste depuis le début et jusqu'au 17e épisode. Le fait qu'il est chef de la rubrique culturelle dans un journal et rédacteur en chef en même temps dans un autre est assez bizarre également. Même ses relations trop multiples et pas claires avec les «grands responsables» de la presse égyptienne sont assez louches.

C'est un opportuniste qu'on veut passer pour un journaliste intègre et idéaliste. Bonjour la confusion ! A force de se poser des questions sur la logique qui gère ce feuilleton, on comprend que le problème réside dans la tête de ses concepteurs. Veulent-ils dénoncer une presse mercenaire gérée par ses intérêts ou aspirent-ils à idéaliser, à outrance, un job comme les autres ? En tout cas, le résultat est une intrigue lamentable et sans goût servie par des protagonistes sans épaisseur psychologique ni vraisemblance réelle.
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