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La Galerie Delacroix expose Aziz Abou Ali

Seize années se sont déjà écoulées depuis le décès de l'artiste-peintre-graveur, Aziz Abou Ali, mais ses œuvres sont encore là, restituant une période de vie et une pensée assez particulière d'un créateur qui considère la fonction de l'art comme «la projection d'une vision de la société».

La Galerie Delacroix expose Aziz Abou Ali
Sa vie assez mouvementée ne l'a pas pour autant empêché de se hisser aux côtés de grandes célébrités de la peinture, en passant maître dans la gravure, maîtrisant parfaitement « le secret et l'alchimie des encres, des planches de cuivre, du papier, du tissu, de l'acide».«C'était l'un de nos artistes les plus exigeants. Son itinéraire est jonché de conquêtes. Vaincre les solitudes fut son combat majeur», a souligné Zineb Abderrazik Chraibi. Son parcours, dénotant d'une trajectoire des plus sinueuses, met en exergue un talent qui n'a pas tardé à pointer à l'horizon alors qu'il était encore dans son petit atelier de Marrakech. Ce qui l'encouragea à aller explorer d'autres cieux et d'autres civilisations, en faisant une escale à Tétouan dans son Ecole des Beaux Arts avant de s'exiler en Espagne où il fait d'abord des études d'Arts plastiques à l'Ecole Santa Isabella à Séville pour se lancer ensuite dans le monde plastique tel un poisson dans son univers aquatique. Son intégration au mouvement plastique espagnol lui a permis de connaître les plus grands peintres et d'exécuter les gravures de plusieurs de leurs œuvres. Ainsi, son adhésion au groupe des 15 n'est qu'un point de considération pour un artiste très singulier quant à la qualité et la richesse de ses travaux.

« Cependant, s'il est des peintres marocains dont l'art ne serait que l'accomplissement d'un moi en proie aux pires déchirements existentiels, Aziz en ferait partie. Car si l'art est plaisir et souffrance, expression et adhésion à l'altérité, plusieurs artistes font corps avec cet espace si ambigu et scabreux qu'est l'image picturale. Productivité acharnée jusqu'à l'épuisement des mains et multiplicité des supports et de la matière (Gravure, peinture murale, gouache, huile et acrylique…), sont deux caractéristiques qui dévoilent amplement les multiples facettes de ce peintre pourtant, en apparence, livré à la linéarité de la création. Comme si chaque matière lui révélait les recoins enfouis de sa personne, les émotions encore en réserve dans les profondeurs inouïes du corps et de la psyché », souligne le critique Farid Zahi dans son texte d'analyse sur le peintre. Les travaux du regretté Aziz Abou Ali sont exposés, jusqu'au 30 août, à la galerie Delacroix de Tanger où nous pouvons admirer les limites jusqu'où l'artiste a poussé son art, utilisant aussi bien le papier, d'autres outils que le burin, d'autres matières que l'encre. « Sur toile, carton, pierre ou bois, avec la gouache, l'huile ou acrylique, il taille ou peint, affronte les fresques murales, élargissant le lieu pour mieux repousser les limites de son exploration. En proie au désir de pierre, il scrupule des formes enveloppées qui reprennent les bandages des corps privés de mouvement.

Çà et là, les éclairs violets ou bleus de ses gouaches illuminent des compositions géométriques et luttent contre l'obscurité ténébreuse. Brise légère avant la reprise de l'épreuve qui le conduit au dernier souffle », écrit Marie-Christine Vandoome dans sa présentation du catalogue. Cette colossale œuvre, constituant une part de l'artiste, nous est offerte grâce à la bienveillance de Rachid Chraïbi, propriétaire des éditions Marsam, qui s'est fait le devoir de chercher et de rapatrier les travaux de Aziz Abou Ali d'Espagne et d'ailleurs. Ce même peintre que feu Abdelkébir Khatibi considère comme un compositeur de formes à la fois néo-négatives et abstraites. «Sa maîtrise de l'art de la gravure est indéniable. Elle correspond à cet amour nuancé pour le noir et le blanc. Un noir vif, qui sature parfois la surface, là où, dans la nuit occulte, ne brille aucune étoile, mais, comme immobilisé par une force secrète, l'homme cherche une sortie tourmentée vers la délivrance », ajoute-t-il.
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Le maître de la gravure

Natif de Marrakech en 1935, Aziz Abou Ali suit, dès son jeune âge, des cours de dessin par correspondance avant de s'inscrire à l'Ecole des Beaux Arts de Tétouan afin de confirmer son talent déjà prometteur par des études académiques. Son ambition ne s'arrête pas là puisqu'il opte pour d'autres connaissances et d'autres expertises. Ce qui l'encourage à voyager vers l'Espagne où il fut admis à l'Ecole Supérieure des Beaux Arts de San Fernando à Madrid pour accéder à une maîtrise en gravure, en peinture murale et en sculpture.
Son avenir dans les arts plastiques fut, ainsi, tracé et mené très brillamment enrichissant son palmarès par des expositions un peu partout en Espagne. Aziz Abou Ali est décédé en 1993 à Madrid dans la solitude, l'oubli et l'exil, laissant derrière lui des centaines d'œuvres considérées par les professionnels et critiques comme un patrimoine national.
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