(suite)
Le premier qui fut converti par Abou-Bakr fut Othmân, fils d'Affân ; il convertit ensuite Abderrahman, fils d'Aouf, puis Zobaïr, fils d'Awwâm, puis Talhâ, fils d'Obaïdallah, puis Saad, fils d'Abou-Waqqâs. Ils furent ainsi trente-neuf adhérents, qui tenaient leur foi secrète. Ils n'osaient pas se rendre à la mosquée de La Mecque pour prier, ni eux ni le Prophète : ils priaient, soit à la maison, soit sur le mont Hirâ. Le premier qui en eut connaissance fut Abou-Tâlib, qui demanda à Mohammed quelle était la religion qu'il avait établie. Le Prophète le lui dit et voulut le convertir. Abou-Tâlib lui répondit : Je ne veux pas abandonner ma religion, qui est celle de mes pères ; si Dieu t'a ordonné cette œuvre, accomplis-la, je te protègerai, et personne ne pourra te molester. Un jour, Abou-Tâlib vit Ali faire la prière. Il lui dit : Mon fils, qu'est-ce que ce culte ? Ali, craignant la colère de son père, répondit : c'est Mohammed, le Prophète de Dieu, qui m'a converti à cette religion. Abou-Tâlib dit : Si Mohammed te l'a dit ainsi, observe-le; car Mohammed n'a jamais dit et ne dit pas le mensonge. On disait, dans les réunions de la mosquée, que Mohammed avait fondé une nouvelle religion, qu'il prétendait être le Prophète de Dieu et avoir reçu de Dieu un message, que quelques personnes avaient cru en lui et pratiquaient la prière en secret.
Abou-Djahl, fils de Hischâm, parla ainsi : Si j'apprends que quelqu'un ait cru en lui, j'écraserai sa tête comme celle d'un serpent ; et si je vois Mohammed venir à la mosquée et adorer un autre objet que Hobal, je lui lancerai à la tête une pierre et ferai jaillir son cerveau ; et Abou-Tâlib perdra le commandement, quand j'aurai frappé son neveu. Abou-Tâlib était le chef des descendants de Hâschim : le chef des Benî-Makhzoum était Abou-Djahl, fils de Hischâm qui portait le surnom d'Abou-‘l-‘Hikam. C'est le Prophète qui l'avait appelé Abou-Djahl. Le chef des Beni-Adî était Omar, fils d'Al-Khattâb, dont le pouvoir était égal à celui d'Abou-Djahl. Après Abou-Tâlib, le commandement des Beni-Hâschim passa à Abbâs, son frère, qui était ami du Prophète, mais qui ne pouvait pas le protéger contre les incrédules.
Le plus hostile de ceux-ci, parmi les Hâschimites et les oncles de Mohammed, était Abou-Lahab, fils d'Abdou'l-Motalib; les plus hostiles des Beni-Makhzoum étaient Abou-Djahl et Walîd, fils de Moghaïra et, parmi les Benî-‘Adî, ‘Omar, fils d'Al-Khattâb. Le Prophète avait le désir de faire la prière dans la mosquée, mais il ne l'osait pas, craignant Abou-Djahl et Omar, les deux personnages les plus puissants de La Mecque et ses plus grands adversaires. Lorsque ses sectateurs furent au nombre de trente-neuf personnes, le Prophète adressa à Dieu la prière suivante: Dieu, tu sais que ta religion n'a pas de plus grands ennemis parmi les hommes que ces deux personnages : Abou-Djahl et ‘Omar, fils d'Al Khatâb.
Dirige celui des deux que tu préfères dans la bonne voie, et favorise le de l'islamisme, afin que cette religion soit répandue par lui. Mohammed Ben-Djarîr n'a pas raconté dans son livre la conversion d'Omar, fils d'Al-Khattâb, quoique ce soit un récit agréable. Je vais le rapporter tel que je l'ai lu dans d'autres livres, comme je viens de rapporter la conversion d'Abou-Bakr Eç-çiddiq. ‘Omar avait une sœur mariée à Tal'hâ, fils d'Obaïdallah. Un jour, Omar, venant chez sa sœur, entendit qu'elle récitait le Coran. Il entra dans la maison et lui dit : Qu'est-ce-que tu viens de réciter ? Est-ce que tu as embrassé la religion de ce fou ? Sa sœur lui répondit : il n'est pas fou ; il est le Prophète de Dieu. Omar dit : laisse-moi voir l'écrit que tu viens de lire. Sa sœur répliqua : tu le souillerais ; tu ne dois pas le toucher. Omar dit : Que dois-je faire pour me purifier ? – Il faut te laver la tête et corps. Omar ayant fait ainsi à l'instant même, sa sœur lui remit l'écrit, et Omar y lut les versets suivants: “ Au nom du Dieu Clément et Miséricordieux. Ta Ha. Nous ne t'avons pas envoyé le Coran pour que tu sois malheureux, mais pour servir d'avertissement à celui qui craint Dieu. Il est envoyé par celui qui a créé la terre et les cieux élevés ”, etc. (Sur. XX ; vers. 1 et suiv.) Omar dit : S'il en est ainsi, l'idolâtrie que nous pratiquons est absurde, et nos dieux ne sont rien. Il dit ensuite à sa sœur: Où est Mohammed ? Elle répliqua : Si tu ne veux rien lui dire (de désagréable), je te conduirai auprès de lui. Omar le promit, et sa sœur le conduisit chez le Prophète, dans la maison de Khadija.
Lorsque Omar entra dans l'appartement, le Prophète lui: Pourquoi viens-tu ? – Je viens, dit ‘Omar, embrasser ta religion. Le Prophète lui dit: Grâces soient rendues à Dieu de ce qu'il a exaucé ma prière en ce qui te concerne, et non en ce qui concerne ton ami Abou-Djahl. Omar prononça la formule de foi et dit ensuite au Prophète : Que faut-il faire maintenant ? – Il faut accomplir la prière, dit Mohammed. Qu'est-ce que la prière ?
– C'est l'action de prier Dieu. Où faut-il prier ? Pour le moment dit Mohammed, il faut le faire en secret, jusqu'à ce que nous puissions le faire publiquement.
Omar dit : Nous avons adoré Lât et Hobal en public, et nous devrions adorer Dieu en secret ! Viens, sortons. Le Prophète et tous ses compagnons se rendirent à la mosquée, firent les tournées autour du temple et prièrent en public.
Les principaux personnages qoraïschites qui s'y trouvaient n'osèrent rien dire, parce que Omar était avec le Prophète. A partir de ce moment, Mohammed y accomplissait sa prière, et venait librement au temple, lui et ses compagnons. Trois ans après, Dieu lui envoya ce verset : “ O apôtre, fais connaître ce qui t'a été envoyé de la part de ton Seigneur ”, etc. (Sur. V, vers. 71) Alors le Prophète adressa publiquement sa prédication à tous.
Prédication publique de l'islamisme
Après avoir reçu ce verset, le Prophète se rendit au temple de la Kaâba et le récita devant les hommes. C'est dans la mosquée qu'il leur adressa le premier appel. Ensuite il alla au mont çafâ, éleva la voix, et tous les habitants de La Mecque s'y réunirent. Mohammed leur parla ainsi : Quelle conduite ai-je tenue parmi vous ? Ils répondirent: Tu es un homme véridique et sûr ; nous n'avons jamais entendu de toi un mensonge. Mohammed reprit : Maintenant je dis : Je suis l'apôtre de Dieu, envoyé vers vous. Adorez Dieu et abandonnez les idoles, sinon le châtiment descendra sur vous du ciel et vous serez exterminés. Abou-Lahab, son oncle, qui se trouvait dans l'assistance, se leva et dit : Toi, Mohammed, tu veux nous appeler à une religion. Sois maudit, toi et ta religion. Il engagea le peuple à se retirer, en disant : Allez, ce Mohammed est fou. Alors Dieu envoya à son intention les versets suivants : “Que les deux mains d'Abou-Lahab périssent”, etc. (Sur. CXI, vers I et suiv). Abou-Lahab, par hostilité envers le Prophète, avait l'habitude de mettre des épines sur son chemin et sur celui de ses amis, de sorte qu'ils se blessaient les pieds. Sa femme faisait de même. Ensuite Dieu envoya à Mohammed le verset suivant : “ Adresse l'appel à tes proches parents ”. (Sur. XXVI, vers. 214).
Le Prophète dit : Mes parents, ce sont les Benî-Hâschim et les Benî-Abd-Manâf. Il dit à Ali d'aller préparer un repas. Ali, ayant fait cuire dans le four un mouton sur du gruau, invita tous les Beni-Haschim et les Beni-Manâf, de même qu'Abou-Tâlib, Hamza, Abbâs, et un grand nombre d'autres personnes, et leur servit ce repas. Ils mangèrent beaucoup, cependant la quantité de la nourriture ne diminuait pas. Abou-Lahab dit : Mohammed nous a invités aujourd'hui pour nous faire voir sa magie.
Le Prophète, très affligé de ces paroles, ne leur parla point ce jour-là. Le lendemain, il fit préparer un nouveau repas et les invita. Pendant qu'ils mangeaient, il leur parla ainsi : O mes oncles et mes cousins, je suis l'apôtre de Dieu, envoyé vers tous les hommes en général, et vers vous en particulier. Croyez en Dieu et à ma mission, et Dieu vous donnera le paradis éternel. Personne ne répondit. Puis Abou- Tâlib dit : Mon fils, tu as parlé et nous avons entendu ; laisse-nous aller et réfléchir jusqu'à demain. Le Prophète dit ensuite : Mes oncles et mes cousins, si vous ne cherchez pas l'autre monde, au moins recherchez le bonheur de ce monde; car Dieu répandra ma religion, et l'empire de l'Arabie, de la Perse et de Roum m'appartiendra. Y a-t-il quelqu'un parmi vous qui veuille répondre à mon appel, et que je puisse nommer mon vicaire? Tous gardèrent le silence.
Alors Ali dit : O apôtre de Dieu, si personne ne croit, moi je suis croyant. Le Prophète répondit : O Ali, tu as cru, et tu es mon frère et mon vicaire. Les autres se levèrent et sortirent. Ils se moquèrent d'Abou-Tâlib, en lui disant : Mohammed a fait de ton fils ton maître.
Le Prophète continuait sa prédication, et l'on n'osait pas s'y opposer, par respect pour Abou-Tâlib, mais on frappait et on insultait ses amis. Alors fut révélé le verset suivant : “Certes, vous et les idoles que vous adorez, à côté de Dieu, vous serez la proie de l'enfer”, etc. (Sur. XXI, vers. 98). Le Prophète vint à la mosquée et proclama ce verset devant le peuple. Les hommes se tournèrent tous contre Lui, L'expulsèrent de la mosquée et se rendirent ensuite auprès d'Abou-Tâlib. Ils lui dirent : Notre patience est à bout. Ton neveu insulte nos divinités.
Il a introduit une religion nouvelle, et nous l'avons supporté. Il nous a insultés en disant que nous sommes des sots ; nous l'avons supporté. Il a dit que nous et nos pères nous irons en enfer, et nous l'avons supporté. Maintenant, Il se met à insulter nos dieux. Dis-Lui qu'Il fasse ce qu'Il voudra, mais qu'Il n'attaque pas nos dieux, qu'Il s'occupe de son Dieu et de sa religion.
S'Il ne le fait pas, nous Le frapperons et nous Le chasserons de la ville. Abou-Tâlib fit appeler Mohammed qui vint et prit place. Abou Tâlib lui dit : Ecoute ce que disent ces gens. Le Prophète, ayant entendu leur discours, dit : “Il n'y a qu'un point qui nous divise, eux et Moi ; s'ils professent qu'il n'y a qu'un seul Dieu et que Je suis Son Prophète, Dieu sera satisfait d'eux, et Je ne parlerai plus contre eux. Mais s'ils ne font pas cette profession, aussi longtemps que mon âme sera en moi Je les appellerai à Dieu et à Sa religion. Abou-Tâlib congédia les gens avec de bonnes paroles et resta seul avec le Prophète. Il Lui dit : Ces gens agissent avec équité envers eux. Ils te disent d'enseigner et de faire ce que Tu voudras, seulement de ne pas insulter leurs dieux. Si Tu n'insultais pas leurs dieux, cela profiterait à ta religion.
Le Prophète pensa qu'Abou-Tâlib voulait Lui retirer sa protection. Ses larmes coulèrent et Il dit : «Ô mon oncle, c'est Dieu qui me l'ordonne ainsi. S'ils mettaient dans ma main droite le soleil et dans ma main gauche la lune, et s'ils me brûlaient par le feu, Je ne retrancherais pas une lettre de ce que Dieu ordonne, et Je ne dirais ni plus ni moins. Puis Il quitta Abou-Tâlib. Ce dernier, qui fut touché, Le rappela, prit sa tête sur son cœur et Lui dit : Ô mon fils, va, exécute ce que Dieu t'ordonne et ne t'inquiète pas ; aussi longtemps que je vivrai, personne n'osera mettre la main sur Toi. Je sais que Tu dis la vérité et si je ne craignais pas d'encourir le blâme des Arabes, qui diraient qu'Abou-Tâlib, sur ses vieux jours, a quitté la religion de ses pères, je croirais aussi en Toi». A ce propos, il fit quelques vers : «Par Dieu ! Ils ne pourront pas t'atteindre, tous ensemble, aussi longtemps que je serai vivant et que je ne serai pas enterré. Poursuis ton œuvre ; n'aie pas de souci, sois content ; tu atteindras un désir fait pour réjouir tes yeux.
Certes, j'ai déclaré et dit que j'étais ton ami, et antérieurement déjà je t'ai appelé véridique. Si je ne craignais pas le blâme et n'était mon désir d'éviter les reproches, Tu me verrais adhérer fermement à cela». Ces paroles d'Abou-Tâlib rassurèrent le Prophète qui continua de prêcher publiquement sa religion.
(à suivre…
Le premier qui fut converti par Abou-Bakr fut Othmân, fils d'Affân ; il convertit ensuite Abderrahman, fils d'Aouf, puis Zobaïr, fils d'Awwâm, puis Talhâ, fils d'Obaïdallah, puis Saad, fils d'Abou-Waqqâs. Ils furent ainsi trente-neuf adhérents, qui tenaient leur foi secrète. Ils n'osaient pas se rendre à la mosquée de La Mecque pour prier, ni eux ni le Prophète : ils priaient, soit à la maison, soit sur le mont Hirâ. Le premier qui en eut connaissance fut Abou-Tâlib, qui demanda à Mohammed quelle était la religion qu'il avait établie. Le Prophète le lui dit et voulut le convertir. Abou-Tâlib lui répondit : Je ne veux pas abandonner ma religion, qui est celle de mes pères ; si Dieu t'a ordonné cette œuvre, accomplis-la, je te protègerai, et personne ne pourra te molester. Un jour, Abou-Tâlib vit Ali faire la prière. Il lui dit : Mon fils, qu'est-ce que ce culte ? Ali, craignant la colère de son père, répondit : c'est Mohammed, le Prophète de Dieu, qui m'a converti à cette religion. Abou-Tâlib dit : Si Mohammed te l'a dit ainsi, observe-le; car Mohammed n'a jamais dit et ne dit pas le mensonge. On disait, dans les réunions de la mosquée, que Mohammed avait fondé une nouvelle religion, qu'il prétendait être le Prophète de Dieu et avoir reçu de Dieu un message, que quelques personnes avaient cru en lui et pratiquaient la prière en secret.
Abou-Djahl, fils de Hischâm, parla ainsi : Si j'apprends que quelqu'un ait cru en lui, j'écraserai sa tête comme celle d'un serpent ; et si je vois Mohammed venir à la mosquée et adorer un autre objet que Hobal, je lui lancerai à la tête une pierre et ferai jaillir son cerveau ; et Abou-Tâlib perdra le commandement, quand j'aurai frappé son neveu. Abou-Tâlib était le chef des descendants de Hâschim : le chef des Benî-Makhzoum était Abou-Djahl, fils de Hischâm qui portait le surnom d'Abou-‘l-‘Hikam. C'est le Prophète qui l'avait appelé Abou-Djahl. Le chef des Beni-Adî était Omar, fils d'Al-Khattâb, dont le pouvoir était égal à celui d'Abou-Djahl. Après Abou-Tâlib, le commandement des Beni-Hâschim passa à Abbâs, son frère, qui était ami du Prophète, mais qui ne pouvait pas le protéger contre les incrédules.
Le plus hostile de ceux-ci, parmi les Hâschimites et les oncles de Mohammed, était Abou-Lahab, fils d'Abdou'l-Motalib; les plus hostiles des Beni-Makhzoum étaient Abou-Djahl et Walîd, fils de Moghaïra et, parmi les Benî-‘Adî, ‘Omar, fils d'Al-Khattâb. Le Prophète avait le désir de faire la prière dans la mosquée, mais il ne l'osait pas, craignant Abou-Djahl et Omar, les deux personnages les plus puissants de La Mecque et ses plus grands adversaires. Lorsque ses sectateurs furent au nombre de trente-neuf personnes, le Prophète adressa à Dieu la prière suivante: Dieu, tu sais que ta religion n'a pas de plus grands ennemis parmi les hommes que ces deux personnages : Abou-Djahl et ‘Omar, fils d'Al Khatâb.
Dirige celui des deux que tu préfères dans la bonne voie, et favorise le de l'islamisme, afin que cette religion soit répandue par lui. Mohammed Ben-Djarîr n'a pas raconté dans son livre la conversion d'Omar, fils d'Al-Khattâb, quoique ce soit un récit agréable. Je vais le rapporter tel que je l'ai lu dans d'autres livres, comme je viens de rapporter la conversion d'Abou-Bakr Eç-çiddiq. ‘Omar avait une sœur mariée à Tal'hâ, fils d'Obaïdallah. Un jour, Omar, venant chez sa sœur, entendit qu'elle récitait le Coran. Il entra dans la maison et lui dit : Qu'est-ce-que tu viens de réciter ? Est-ce que tu as embrassé la religion de ce fou ? Sa sœur lui répondit : il n'est pas fou ; il est le Prophète de Dieu. Omar dit : laisse-moi voir l'écrit que tu viens de lire. Sa sœur répliqua : tu le souillerais ; tu ne dois pas le toucher. Omar dit : Que dois-je faire pour me purifier ? – Il faut te laver la tête et corps. Omar ayant fait ainsi à l'instant même, sa sœur lui remit l'écrit, et Omar y lut les versets suivants: “ Au nom du Dieu Clément et Miséricordieux. Ta Ha. Nous ne t'avons pas envoyé le Coran pour que tu sois malheureux, mais pour servir d'avertissement à celui qui craint Dieu. Il est envoyé par celui qui a créé la terre et les cieux élevés ”, etc. (Sur. XX ; vers. 1 et suiv.) Omar dit : S'il en est ainsi, l'idolâtrie que nous pratiquons est absurde, et nos dieux ne sont rien. Il dit ensuite à sa sœur: Où est Mohammed ? Elle répliqua : Si tu ne veux rien lui dire (de désagréable), je te conduirai auprès de lui. Omar le promit, et sa sœur le conduisit chez le Prophète, dans la maison de Khadija.
Lorsque Omar entra dans l'appartement, le Prophète lui: Pourquoi viens-tu ? – Je viens, dit ‘Omar, embrasser ta religion. Le Prophète lui dit: Grâces soient rendues à Dieu de ce qu'il a exaucé ma prière en ce qui te concerne, et non en ce qui concerne ton ami Abou-Djahl. Omar prononça la formule de foi et dit ensuite au Prophète : Que faut-il faire maintenant ? – Il faut accomplir la prière, dit Mohammed. Qu'est-ce que la prière ?
– C'est l'action de prier Dieu. Où faut-il prier ? Pour le moment dit Mohammed, il faut le faire en secret, jusqu'à ce que nous puissions le faire publiquement.
Omar dit : Nous avons adoré Lât et Hobal en public, et nous devrions adorer Dieu en secret ! Viens, sortons. Le Prophète et tous ses compagnons se rendirent à la mosquée, firent les tournées autour du temple et prièrent en public.
Les principaux personnages qoraïschites qui s'y trouvaient n'osèrent rien dire, parce que Omar était avec le Prophète. A partir de ce moment, Mohammed y accomplissait sa prière, et venait librement au temple, lui et ses compagnons. Trois ans après, Dieu lui envoya ce verset : “ O apôtre, fais connaître ce qui t'a été envoyé de la part de ton Seigneur ”, etc. (Sur. V, vers. 71) Alors le Prophète adressa publiquement sa prédication à tous.
Prédication publique de l'islamisme
Après avoir reçu ce verset, le Prophète se rendit au temple de la Kaâba et le récita devant les hommes. C'est dans la mosquée qu'il leur adressa le premier appel. Ensuite il alla au mont çafâ, éleva la voix, et tous les habitants de La Mecque s'y réunirent. Mohammed leur parla ainsi : Quelle conduite ai-je tenue parmi vous ? Ils répondirent: Tu es un homme véridique et sûr ; nous n'avons jamais entendu de toi un mensonge. Mohammed reprit : Maintenant je dis : Je suis l'apôtre de Dieu, envoyé vers vous. Adorez Dieu et abandonnez les idoles, sinon le châtiment descendra sur vous du ciel et vous serez exterminés. Abou-Lahab, son oncle, qui se trouvait dans l'assistance, se leva et dit : Toi, Mohammed, tu veux nous appeler à une religion. Sois maudit, toi et ta religion. Il engagea le peuple à se retirer, en disant : Allez, ce Mohammed est fou. Alors Dieu envoya à son intention les versets suivants : “Que les deux mains d'Abou-Lahab périssent”, etc. (Sur. CXI, vers I et suiv). Abou-Lahab, par hostilité envers le Prophète, avait l'habitude de mettre des épines sur son chemin et sur celui de ses amis, de sorte qu'ils se blessaient les pieds. Sa femme faisait de même. Ensuite Dieu envoya à Mohammed le verset suivant : “ Adresse l'appel à tes proches parents ”. (Sur. XXVI, vers. 214).
Le Prophète dit : Mes parents, ce sont les Benî-Hâschim et les Benî-Abd-Manâf. Il dit à Ali d'aller préparer un repas. Ali, ayant fait cuire dans le four un mouton sur du gruau, invita tous les Beni-Haschim et les Beni-Manâf, de même qu'Abou-Tâlib, Hamza, Abbâs, et un grand nombre d'autres personnes, et leur servit ce repas. Ils mangèrent beaucoup, cependant la quantité de la nourriture ne diminuait pas. Abou-Lahab dit : Mohammed nous a invités aujourd'hui pour nous faire voir sa magie.
Le Prophète, très affligé de ces paroles, ne leur parla point ce jour-là. Le lendemain, il fit préparer un nouveau repas et les invita. Pendant qu'ils mangeaient, il leur parla ainsi : O mes oncles et mes cousins, je suis l'apôtre de Dieu, envoyé vers tous les hommes en général, et vers vous en particulier. Croyez en Dieu et à ma mission, et Dieu vous donnera le paradis éternel. Personne ne répondit. Puis Abou- Tâlib dit : Mon fils, tu as parlé et nous avons entendu ; laisse-nous aller et réfléchir jusqu'à demain. Le Prophète dit ensuite : Mes oncles et mes cousins, si vous ne cherchez pas l'autre monde, au moins recherchez le bonheur de ce monde; car Dieu répandra ma religion, et l'empire de l'Arabie, de la Perse et de Roum m'appartiendra. Y a-t-il quelqu'un parmi vous qui veuille répondre à mon appel, et que je puisse nommer mon vicaire? Tous gardèrent le silence.
Alors Ali dit : O apôtre de Dieu, si personne ne croit, moi je suis croyant. Le Prophète répondit : O Ali, tu as cru, et tu es mon frère et mon vicaire. Les autres se levèrent et sortirent. Ils se moquèrent d'Abou-Tâlib, en lui disant : Mohammed a fait de ton fils ton maître.
Le Prophète continuait sa prédication, et l'on n'osait pas s'y opposer, par respect pour Abou-Tâlib, mais on frappait et on insultait ses amis. Alors fut révélé le verset suivant : “Certes, vous et les idoles que vous adorez, à côté de Dieu, vous serez la proie de l'enfer”, etc. (Sur. XXI, vers. 98). Le Prophète vint à la mosquée et proclama ce verset devant le peuple. Les hommes se tournèrent tous contre Lui, L'expulsèrent de la mosquée et se rendirent ensuite auprès d'Abou-Tâlib. Ils lui dirent : Notre patience est à bout. Ton neveu insulte nos divinités.
Il a introduit une religion nouvelle, et nous l'avons supporté. Il nous a insultés en disant que nous sommes des sots ; nous l'avons supporté. Il a dit que nous et nos pères nous irons en enfer, et nous l'avons supporté. Maintenant, Il se met à insulter nos dieux. Dis-Lui qu'Il fasse ce qu'Il voudra, mais qu'Il n'attaque pas nos dieux, qu'Il s'occupe de son Dieu et de sa religion.
S'Il ne le fait pas, nous Le frapperons et nous Le chasserons de la ville. Abou-Tâlib fit appeler Mohammed qui vint et prit place. Abou Tâlib lui dit : Ecoute ce que disent ces gens. Le Prophète, ayant entendu leur discours, dit : “Il n'y a qu'un point qui nous divise, eux et Moi ; s'ils professent qu'il n'y a qu'un seul Dieu et que Je suis Son Prophète, Dieu sera satisfait d'eux, et Je ne parlerai plus contre eux. Mais s'ils ne font pas cette profession, aussi longtemps que mon âme sera en moi Je les appellerai à Dieu et à Sa religion. Abou-Tâlib congédia les gens avec de bonnes paroles et resta seul avec le Prophète. Il Lui dit : Ces gens agissent avec équité envers eux. Ils te disent d'enseigner et de faire ce que Tu voudras, seulement de ne pas insulter leurs dieux. Si Tu n'insultais pas leurs dieux, cela profiterait à ta religion.
Le Prophète pensa qu'Abou-Tâlib voulait Lui retirer sa protection. Ses larmes coulèrent et Il dit : «Ô mon oncle, c'est Dieu qui me l'ordonne ainsi. S'ils mettaient dans ma main droite le soleil et dans ma main gauche la lune, et s'ils me brûlaient par le feu, Je ne retrancherais pas une lettre de ce que Dieu ordonne, et Je ne dirais ni plus ni moins. Puis Il quitta Abou-Tâlib. Ce dernier, qui fut touché, Le rappela, prit sa tête sur son cœur et Lui dit : Ô mon fils, va, exécute ce que Dieu t'ordonne et ne t'inquiète pas ; aussi longtemps que je vivrai, personne n'osera mettre la main sur Toi. Je sais que Tu dis la vérité et si je ne craignais pas d'encourir le blâme des Arabes, qui diraient qu'Abou-Tâlib, sur ses vieux jours, a quitté la religion de ses pères, je croirais aussi en Toi». A ce propos, il fit quelques vers : «Par Dieu ! Ils ne pourront pas t'atteindre, tous ensemble, aussi longtemps que je serai vivant et que je ne serai pas enterré. Poursuis ton œuvre ; n'aie pas de souci, sois content ; tu atteindras un désir fait pour réjouir tes yeux.
Certes, j'ai déclaré et dit que j'étais ton ami, et antérieurement déjà je t'ai appelé véridique. Si je ne craignais pas le blâme et n'était mon désir d'éviter les reproches, Tu me verrais adhérer fermement à cela». Ces paroles d'Abou-Tâlib rassurèrent le Prophète qui continua de prêcher publiquement sa religion.
(à suivre…
