Menu
Search
Lundi 29 Décembre 2025
S'abonner
close
Lundi 29 Décembre 2025
Menu
Search

Les maux qui taraudent l'actuelle majorité

C'est hier, durant l'après-midi, que le Premier ministre a présenté son premier bilan en plénière devant les députés. Ce sera, aujourd'hui, au tour des conseillers d'accueillir Abbas El Fassi. La copie gouvernementale fera ensuite l'objet de discussions et débats d'abord, jeudi prochain, par les députés et le lendemain par les représentants de la deuxième Chambre.

Les maux qui taraudent l'actuelle majorité
Depuis le temps qu'on l'attendait c'est chose faite, le chef de l'Exécutif a fini par se jeter à l'eau glaciale d'une opposition forte bien qu'hétérogène et une majorité disloquée.
Dure épreuve pour un Premier ministre à mi-mandat qui devra convaincre des parlementaires prêts à décocher leurs flèches et surtout une opinion publique désabusée. Justement, il y a une vingtaine de jours, la réunion qu'El Fassi a tenue à Rabat avec ses ministres, les dirigeants des partis de la majorité et représentants de ses deux groupes parlementaires ressemblait moins à une veillée d'armes qu'à une tentative de se tâter mutuellement le pouls entre membres d'un même clan. Mais qu'à cela ne tienne. Par les temps qui courent, les yeux des partis et du Parlement sont plutôt rivés sur des échéances qui promettent des rebondissements inégalés et pourquoi pas une refonte de la scène politique. Aujourd'hui, tout le monde attend une clarification qui doit prendre forme dans le solde entre les promesses de la déclaration gouvernementale et les réalisations sur le terrain. Pour un conseiller de l'opposition, les rapports accablants de la Cour des comptes suffisent à eux seuls de donner du fil à retordre pour la majorité. Plusieurs ont exprimé le manque voire l'absence de fermeté de la part du gouvernement pour que ces rapports trouvent leur chemin vers la justice.

Par ailleurs, plusieurs secteurs sur lesquels l'Exécutif avait tablé au début de son mandat laissent à désirer. Les résultats du programme Villes sans bidonville font partie de ces sonates inachevées. L'on avait, certes, annoncé des villes débarrassées de ses baraques en 2007, en 2008 et en 2009, mais le mal est toujours persistant et dans certains cas, il a empiré. Des parlementaires n'ont pas manqué de faire le lien avec le logement social qui a buté sur les difficultés d'accès au crédit et grevé dans son sillage les projets des promoteurs privés.
Mostafa Bentak

En effet, le gouvernement n'a pas pu convaincre qu'un logement peut être accessible à 140.000 DH ou même à 200.000 DH. Sur cet aspect, l'argentier du pays a été obligé de lâcher du lest face au lobby des promoteurs en reconduisant certains encouragements.
Aussi, lorsqu'on entend que plus de la moitié du Budget est dédiée aux secteurs sociaux, l'on a du mal à comprendre la manière dont cette manne est déclinée. D'autant plus que l'enseignement, la santé, l'administration et la justice souffrent encore des mêmes maux d'antan. Autre plaie qui se creuse, le monde rural souffre toujours d'une exclusion qui, bizarrement, ne sied plus aux projets agricoles structurants pour lesquels le Maroc a opté. Certes, les chiffres de l'électrification rurale et de l'accès à l'eau potable sont plus ou moins satisfaisants, mais les habitants de la campagne ont de plus en plus du mal à se payer ce luxe devenu cher avec le passage à la gestion déléguée. Sur le volet institutionnel, le chantier de la moralisation de la vie publique, hormis quelques actions éparses, n'a pas encore donné ses fruits.

Les instances créées que ce soit en matière de lutte contre la corruption ou dans le domaine de la concurrence peinent toujours à apposer leurs empreintes. La dernière a perdu un temps précieux dans des conflits de prérogatives. Les rapports avec les syndicats n'ont jamais été aussi tendus. Le dialogue social quand bien même l'on aurait voulu l'institutionnaliser a fini par dérailler, tant les questions de fond comme la réforme de l'administration et la motivation de ses armées sont reléguées au second plan. Les tiraillements et autres blocages aux relents politiques sont devenus la règle. Durant le mandat d'Abbas El Fassi, l'écart entre les classes sociales a augmenté. En témoigne l'indice de concentration des richesses qui s'est enfoncé, passant de 39,8 à 41,4%. La baisse du taux de l'IR a profité plus aux riches qu'aux pauvres et le Smig n'a augmenté en 10 ans que de 4% alors que le PIB s'est amélioré de 4,4%. Les nostalgiques vont même jusqu'à dire que les indicateurs sociaux sont le résultat du travail de l'ancien gouvernement. L'on donne pour exemple, le plan de l'action nationale dans le domaine de l'enfance, lancé en 2005, et qui n'a jamais été dûment opérationnalisé.

La mortalité infantile et maternelle continue de sévir comparaison faite à d'autres pays à économie similaire. Quant à la baisse annoncée du taux de chômage, elle serait tronquée par le biais d'un système de calcul qui comptabilise même les activités précaires. L'actuel gouvernement n'aurait pas réussi à améliorer l'environnement de l'entreprise, argue-t-on dans le monde des affaires. Les litiges dans les tribunaux de commerce prennent plus de 600 jours pour être tranchés, tandis que l'enregistrement de la propriété nécessite plus de huit semaines. L'accès au crédit pour les entreprises, quant à lui, relève du parcours du combattant, tant les banques sont devenues frileuses et exigent plus de garanties que par le passé. D'aucuns diront que l'entreprise a profité, aussi, de plusieurs cadeaux fiscaux, n'empêche que la pression fiscale est toujours de 21%. Un taux élevé si on le compare avec des pays au même niveau économique que le Maroc. Un économiste estime qu'il s'agit là d'un choix de la facilité.

L'Etat ne veut pas se casser la tête à réduire le poids de la fiscalité et attendre un retour sur investissement en élargissant l'assiette. Trop de moyens en logistique et en ressources humaines devraient être mobilisés à cet effet. Ce qui n'est pas l'option qui séduit les pouvoirs publics en ce moment. Enfin, plusieurs sont les responsables politiques qui posent cette question, somme toute, existentielle pour l'Exécutif. Ils veulent savoir si ce gouvernement est, oui ou non, au courant des grands chantiers structurants initiés par S.M. le Roi. Cette interrogation qui trouve aussi son pendant dans la capacité de l'équipe El Fassi à dûment exécuter les orientations royales.
Lisez nos e-Papers