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Catastrophes naturelles et prévention efficace ?

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Devenues peu ou prou régulières, les catastrophes naturelles n'ont cessé depuis quelques années de toucher de nombreuses régions du Royaume. Tremblement de terre d'Al Hoceima, inondations à Mohammedia, à Tanger avec les énormes dégâts causés dans les usines et, dans la série noire qui a endeuillé le pays, les attentats de Casablanca de mars 2003 qui n'ont cessé de marquer les esprits. Cette année, les inondations dans les plaines de la Chaouia, des Doukkalas, du Gharb ou du Saiss ont tout emporté sur leur passage. Dans le Rif, ce sont des villages entiers qui ont été engloutis dans l'eau, dans la région du Gharb, avec la montée de l'oued Baht, les douars ont été immergés, les terres agricoles, les routes, les écoles inondées, les familles évacuées par zodiac.

Des maisons qui s'écroulent dans les médinas à Fès, Casablanca et Marrakech se comptent par dizaines. Avec le dérèglement du système climatique et l'extension urbaine qui amplifie l'impact des catastrophes naturelles, ces événements sont appelés à devenir plus fréquents.Une question prosaïque se pose dès lors et de manière de plus en plus urgente : qui doit agir pour assurer en priorité la protection des personnes et des biens contre les risques naturels, qui peut aider ces régions à se relever de leurs désastres ? L'Etat, bien sûr, en premier lieu, et les professionnels des assurances et de la réassurance ensuite. Sensibilisé et conscient d'y apporter des éléments de réponse, le Secrétariat général du gouvernement a pris l'initiative d'organiser une journée de réflexion à huis clos sur le projet de loi N° 34608 instituant un régime de couverture des conséquences d'événements catastrophiques, modifiant et complétant la loi N° 17-99 portant code des assurances.

Cette journée a été organisée avec le concours de la Caisse de dépôt et de gestion qui, par le biais de sa filiale, la Société centrale de réassurance, a entamé depuis quelques années une réflexion assidue sur l'exposition de notre pays aux risques catastrophiques. Cette réflexion intègre, entre autres, les tremblements de terre, les inondations, les tempêtes et ouragans, y compris les actes de terrorisme, voire les émeutes, ainsi que sur leur transfert vers des professionnels de l'assurance et de la réassurance. Les capacités de financement, les mécanismes et modalités d'interventions des pouvoirs publics, les différents volets de mise en œuvre sur le financement, les procédures du système indemnitaire, sa viabilisation et sa pérennisation ont été au centre de la problématique présentée par le secrétaire général du gouvernement, Driss Dahhak, qui a intégré les actes terroristes dans la même problématique que les catastrophes naturelles.

Ne causent-ils pas de graves préjudices et des séquelles indélébiles aux victimes ? Dans le cadre de la riposte méthodique aux catastrophes, le secrétaire général du gouvernement a rappelé que Sa Majesté le Roi inscrit la solidarité et l'assistance comme une priorité de la démarche que l'Etat y déploie. Praticiens, juristes, experts marocains et étrangers de haute pointure ont ainsi décrypté les 40 articles du projet de loi et ont nourri la réflexion dans une interactivité remarquable. Le ministre de l'Economie et des Finances, Salaheddine Mézouar, tout en soulignant l'efficacité du régime mixte d'indemnisation, fondé sur un système assuranciel et un système allocataire, a mis l'accent sur la nécessité de mettre en place « une politique de prévention dynamique ». Cependant, une chose est sûre comme l'a souligné Anas Houir Alami, directeur général de la CDG, « les couvertures d'assurance devraient être universelles afin de protéger les personnes, le patrimoine socio-économique national et également, l'investissement étranger qui, mieux assuré, pourrait plus facilement faire le choix de notre pays ». Alain Piquemal, professeur agrégé de droit public des Facultés de droit en France a fait une présentation générale introductive en rappelant l'actualité dramatique des catastrophes naturelles et des actes de terrorisme. Jacques Fournier, ancien secrétaire général du gouvernement français, s'est livré pour sa part à un benchmark international sur le sujet.

Que nous apprennent les expériences étrangères ? Qu'il n'y a pas de modèle de référence, mais des modèles dominants, plus divers et dits « hybrides ». Dans certains pays, comme la Grande-Bretagne, les pouvoirs publics n'interviennent que très peu, le régime indemnitaire des catastrophes naturelles repose sur les assurances et la réassurance privées au sein d'un marché libre et concurrentiel. Dans d'autres pays, il n'y a pratiquement pas de marché assuranciel organisé ou développé des catastrophes naturelles. On se limite aux interventions de l'Etat, soit ponctuelles soit au coup par coup, soit enfin dans le cadre d'un mécanisme permanent. D'autres pays, comme l'Espagne, ont mis en place un dispositif public obligatoire et monopolistique d'assurance, qu'ils complètent souvent par certaines aides publiques directes. Aux Etats-Unis, l'assurance des dommages dus aux inondations s'appuie sur un partenariat public-privé.

La France, quant à elle, appartient à la catégorie des modèles « hybrides », son dispositif reposant sur le principe de la mutualisation généralisée, qui implique l'obligation d'assurance. A travers l'étude de ces exemples, les experts présents à cette table ronde ont tenté de répondre à une question de fond concernant le Royaume du Maroc : quel modèle méthodologique ? Quels sont les dispositifs et les outils les plus efficaces et les plus performants sur les plans institutionnel, juridique, technique et financier de nature à sécuriser et pérenniser le système mis en place par le projet de loi ? Comment organiser la mise en place d'un fonds de solidarité et un système destiné à réguler le marché d'assurance face aux catastrophes ? En d'autres termes, face à la pluralité des enjeux, quel système peut-on mettre en place qui tienne compte à la fois d'une nécessaire solidarité envers les plus démunis, des incitations à la prévention et à la pérennisation des mécanismes d'indemnisation ?
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