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«La maison de Mama Ghoula» de Dounia Charaf

Après avoir publié ses premiers romans chez l'Harmatan, Dounia Charaf, choisit les éditions Marsam pour sortir son dernier-né, «La maison de Mama Ghoula». C'est l'histoire de deux filles esclaves que nous raconte l'auteur, retraçant leur évolution sociale du temps où elles ont vécu ensemble avant de se séparer, puis leur destin respectif.

«La maison de Mama Ghoula» de Dounia Charaf
L'une ayant fait le choix de partir et l'autre de rester dans la grande maison bourgeoise. « Au départ, c'était «la maison de l'ogresse», mais comme ce titre-là existait déjà en partie, j'ai dû le changer par «La maison de Mama Ghoula». Je trouve que cet intitulé fait un peu étrange parce qu'il y a la moitié en français et l'autre en arabe», souligne Dounia Charaf. L'auteur file un peu la métaphore en entamant son roman par le conte de l'ogresse qui est aussi un conte universel. Elle relève un aspect très courant, dans le temps, où pas mal de parents sont obligés d'abandonner ou vendre leurs enfants pour que ces derniers puissent manger.
«J'ai choisi de situer l'histoire au début du siècle dernier, au moment de l'après colonisation où il y avait beaucoup de pauvreté. C'est le cas des deux Fatima, la noire et la blanche».

En fait, ces deux fillettes, qui venaient de deux milieux différents (l'une fille d'un pêcheur et l'autre vient d'un village berbère) ne s'appelaient pas Fatima, mais on a transformé leur identité pour qu'elles rentrent dans le cadre de la domesticité. Vivant dans une grande maison bourgeoise à Rabat, les deux filles avaient chacune un parcours différent. L'une (de couleur noire) se sent plus indépendante, s'échappe à l'âge de l'adolescence et arrive à se faire « affranchir » et l'autre, qui a tellement senti la douleur de la faim, a préféré rester dans la grande maison. A travers le cheminement des événements du roman, nous constatons la souffrance et les endurances de chacune. Dounia Charaf met, également, le point sur tous les aspects aussi bien positifs que négatifs de cette servitude qui leur permet d'apprendre beaucoup de choses qu'elles n'auraient jamais apprises dans leurs milieux respectifs.

Un aspect social qu'elles payent à un prix fort. Tout un réalisme magique qu'on ressent nettement en lisant ce roman racontant l'histoire de ces deux filles que le destin a réuni dans une même demeure, a séparé, puis réuni, encore une fois, à leur vieillesse. Ce qui leur a permis de se raconter leur histoire, leur parcours, leur amitié,… «Beaucoup de gens au Maroc retrouveront quelque chose ou un petit bout de leur vie dans ce livre, car celui-ci ne raconte pas la vie particulière de certaines personnes. C'est un peu de toute une vie sociale du Maroc. J'ai eu la malchance de quitter le Maroc très jeune, à l'âge où j'aurai pu apprendre énormément de choses, à onze ans et demi. J'ai raté beaucoup d'étapes que j'ai essayées de rattraper par la suite lorsqu'on revenait en vacances. Mais, ce n'était pas toujours évident ».

En écrivant ce roman, l'auteur a voulu ressusciter la période des années 70 pour que les jeunes puissent apprécier tout ce qui s'est passé à cette époque. « Là où le Maroc a connu une vraie mutation à laquelle je n'ai pas assisté, où on ressent qu'il y a une identité qui évolue mais ne se dénature pas ». Tout ceci est décrit d'une manière fascinante, point fort de l'auteur qui nous plonge dans l'atmosphère du roman et nous permet de vivre l'histoire telle qu'elle nous la raconte. Des moments très sensibles qui nous mènent vers des thèmes forts. « Je suis arrivée à une certaine maturité qui me pousse de plus en plus de m'attacher à mon identité et mes racines. On ne peut devenir quelqu'un qu'en restant quelque part soi-même. C'est ce qu'on retrouve dans l'histoire des deux filles en rapport avec leur passé. L'une qui a continué à penser au passé, l'autre qui l'a complètement effacé à cause de la souffrance». Cette quête du passé qu'on retrouve aussi dans les précédents romans de Dounia où les relations sociales sont le point culminant, nous pousse toujours à nous retourner vers le passé pour comprendre ce qui se passe aujourd'hui.

Une passionnée de son pays

Native de Casablanca, mais partie très jeunes, avec ses parents, en Tunisie puis en France, Dounia Charaf exerce, pendant un certain temps, en tant qu'enseignante au primaire, puis opte pour un poste dans une bibliothèque universitaire en région parisienne. Un choix incité par sa passion pour les livres. Après avoir publié plusieurs romans chez l'Harmatan, où le Maroc est toujours présent, c'est aux éditions Marsam que Dounia Charaf sort son récent titre « La Maison de Mama Ghoula » espérant qu'avec cet écrit elle puisse ouvrir d'autres portes pour revenir un jour dans son pays natal pour lequel elle voue un grand amour. Actuellement, elle est sur un Polar qui lui permet de parler de la société de façon plus dynamique. Dounia nous promet, donc, d'autres rebondissements qui se déroulent, cette fois-ci, dans le Sud du Maroc à Ouarzazate.

Editions Marsam 255 pages
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