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«2666», une œuvre trépidante

Lire Bolano est une réelle partie de plaisir. Cet écrivain chilien, pur produit de la tradition littéraire de l'Amérique latine, surprend à chaque bout de sa longue et prolifique vie de romancier. Mais, il fallait attendre son décès pour que le surprenant livre sa toute dernière surprise: un immense roman, au sens propre et figuré du terme, qui pèse 1359 pages en version française.

«2666», une œuvre trépidante
Le roman, au titre énigmatique « 2666 » est en fait sorti en espagnol chilien en 2004, et il fallait attendre quatre années pour le lire en langue française. Un gros travail édité peu de temps après la mort de R.Bolano survenue en 2003. Un opus, faut-il le rappeler, qui a été salué, à sa mesure, par la critique de par le monde. D'autant plus que cette œuvre est, en quelque sorte, un condensé de l'expérience de son auteur. Puisqu'on y découvre, en traversant le roman, pratiquement tous les univers auxquels il a touché dans ses différents romans.

Deux entrées s'offrent d'emblée au lecteur : la première est incarnée par l'histoire de cet écrivain allemand pisté par quatre spécialistes de son œuvre, alors que la deuxième est matérialisée par un lieu au Mexique hanté par des meurtres abominables de centaines de femmes. Décédé à l'âge de 50, l'auteur a subdivisé son livre en cinq parties : « la partie des critiques», «la partie d'Amalfinato», «la partie de Fate », «la partie des crimes » et « la partie d'Archimboldi ». Selon les critiques, l'auteur aurait souhaité le sortir en cinq volumes. Seulement, ses héritiers en ont décidé autrement, en le publiant en un seul bloc.

Ce n'est donc pas uniquement le roman qui suscite la curiosité, mais aussi « le roman de ce roman ». En effet, rappellent les héritiers de Bolano, ce dernier avait tout prévu, jusqu'au calendrier de la parution. Sentant sa mort proche, il confia que chacune des cinq parties devaient sortir une à une, avec une année d'intervalle. Encore que loin d'exaucer le vœu de l'auteur, le souci de la cohérence et de la valeur littéraire a primé. Résultat des courses : un livre en un jet et en un seul volume. Ceci pour les circonstances exogènes. Qu'en est-il du fond ? En parcourant le roman, on se retrouve dans plusieurs univers.

L'auteur, avec une allégresse déconcertante, passe par tous les genres pour en enfanter le sien : du vaudeville au polar, de la pulp fiction à la science-fiction... Le plaisir n'est que doublé quand le lecteur est confronté à un monde en mouvement où les paradoxes s'entrechoquent, se distancent puis se rejoignent. On ne sait plus où commence la fiction et où se termine la réalité. Le tout enveloppé dans ce qu'a hanté toute l'œuvre d'un écrivain à découvrir : que peuvent les mots, sans partie pris, face à l'atrocité et les autres formes d'horreur qui sommeillent dans les humains.
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