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Beau-père, belle-mère: l'éternel conflit

Familles éclatées, recomposées… Quand les couples se séparent et que de nouveaux se forment, les enfants réagissent parfois mal.

Beau-père, belle-mère: l'éternel conflit
Selon la loi 70-03 portant code de la famille (la Moudawana), le mariage de la mère n'entraîne pas la déchéance de son droit de garde dans les situations suivantes :
Si l'enfant n'a pas dépassé sept ans, ou si la séparation avec sa mère lui porte préjudice ;
Si l'enfant souffre d'une maladie ou d'un handicap, qui fait que toute personne autre que sa mère, ne peut le garder ;
Si la mère est elle-même, la représentante légale de l'enfant. L'enfant, dans plus des deux tiers des cas, reste avec sa mère. Lorsque les parents “refont leur vie”, c'est-à-dire, qu'ils s'installent avec un nouveau conjoint, l'enfant est confronté non plus à deux parents unis puis séparés, mais à trois voire quatre adultes qui exercent sur lui leur autorité.

Aussi, l'enfant perçoit le/la nouveau(le) conjoint(e) de sa mère ou de son père comme un intrus qui rompt l'intimité, gagnée au prix de la séparation de ses parents. Alors, volontairement ou inconsciemment, il peut chercher à mettre en échec cette nouvelle relation, d'autant plus qu'il n'a pas renoncé à “réconcilier” ses parents. Devant une situation parfois confuse, l'enfant se révolte, rendant les relations des nouveaux couples difficiles. « Je me souviens quand mes parents avaient divorcé et que mon père s'est remarié. J'ai fait tout mon possible pour le séparer de sa nouvelle femme. Pour mon esprit d'enfant, elle avait non seulement pris la place de ma mère, mais aussi la mienne dans le cœur de mon père. Je la détestais », affirme Amal. Généralement, le nouveau conjoint est accepté plus facilement avec des enfants plus jeunes. Même s'il existe des exceptions. Aussi, La recomposition est plus facile et plus solide si la séparation est ancienne, et surtout si le parent a connu une période de solitude. Car alors, le remariage du parent est vécu par les enfants comme quelque chose de positif, une sorte de soulagement. « J'avais 6 ans quand mon beau-père est venu à la maison. Moi je l'ai bien accueilli, peu de temps après, je lui ai demandé si je pouvais l'appeler papa, puisque le mien est mort quand j'avais tout juste trois ans », confie Sarah. Par contre, lorsque le divorce ou la mort sont trop récents, trop présents, les enfants peuvent réagir de manière violente. Car au fond d'eux-mêmes, les enfants ne veulent pas que leurs parents se séparent.

Il faut du temps pour qu'ils l'acceptent. Ensuite, il est important que l'enfant ne perçoive pas le nouveau conjoint comme quelqu'un d'imposé. Il est important de créer un lien, de démarrer une relation. La première pierre de l'édifice, c'est d'abord le lien entre le nouveau conjoint et le parent : si celui-ci est solide, l'enfant va le sentir. Le plus difficile, c'est quand l'autre parent est toujours seul, ou n'apprécie pas l'arrivée d'un nouveau conjoint. Cela crée pour l'enfant un conflit de loyauté. La meilleure recomposition, c'est quand l'autre parent reconnaît l'autre conjoint, et lui délègue même quelque chose, une partie de l'autorité parentale. Sauf que, généralement, le parent biologique supporte mal les choix du nouveau conjoint(e) de son ex. « Ma mère me remonte tout le temps contre la nouvelle femme de mon père. Personnellement, je ne la trouve pas si mauvaise que ça, mais je ne peux pas le dire à ma mère. Je ne veux pas la blesser », explique Karim. L'enfant se trouve alors, pris en otage dans des querelles d'adultes, plus personne ne réussit à asseoir son autorité, et l'enfant joue de ce malaise et sors la fameuse phrase : “Tu n'es pas mon père, donc tu ne me commandes pas”, tout en reprochant à son père biologique son absence. Le nouveau mari (épouse) se sent bafoué(e), malgré ses efforts ; l'histoire d'amour vire à la lutte d'influences jusqu'à la rupture, parfois. D'un autre côté, les difficultés relationnelles entre une fille et la seconde épouse de son père sont nombreux. L'affaire se complique avec les décompositions et recompositions familiales, auxquelles s'ajoute la confusion des générations.

« Ma belle-mère ? Je la déteste. Je ne l'ai jamais acceptée. Je ne garde que des mauvais souvenirs de mon enfance avec elle, car malheureusement c'est mon père qui avait ma garde. Lorsque ma mère la lui a laissés », dit Nadia. « Je me suis mariée avec un homme divorcé alors que j'étais encore toute jeune. En plus il avait déjà deux enfants, un garçon et une fille, de son ancien mariage. Ils étaient très turbulents, mais la plus difficile était sa fille. Je la comprends un peu, une fille est toujours favorable à sa maman. Mais le pire c'est que ma belle-fille croyait toujours aux mensonges de sa mère, qui ne ratait pas l'occasion de la remonter contre moi. C'était une période très compliquée », se souvient amèrement madame Amina.
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Explication : Docteur Houda Hjiej Pédopsychiatre.

«L'enfant doit d'abord faire le deuil du parent biologique»

Pourquoi les relations dans une famille recomposée sont-elles toujours difficiles ?

Les relations entre l'enfant et le beau parent sont compliquées, parce que l'enfant doit d'abord faire le deuil du parent biologique. Il doit d'abord accepter son absence.

Est-ce toujours la faute à l'enfant ?

Non, en fait, les enfants s'adaptent mieux que les adultes aux nouvelles situations. Ce qui se passe c'est que, en général, le parent biologique célibataire, n'adhère pas à la nouvelle relation de son ex et l'enfant ressent ça, donc il ne sent pas en sécurité. Aussi, si l'enfant est en relation conflictuelle, ou n'a pas confiance en le parent remarié, automatiquement, il ne sera pas sécurisé par rapport à son choix.

Comment faire pour éviter les conflits ?

C'est le rôle des parents biologiques. Ils doivent préparer l'enfant, le rassurer, que le nouvel arrivant ne prendra la place de personne. De son côté, le beau parent, ne doit pas essayer de prendre la place du parent biologique. Ce qui arrive dans la plupart des cas, c'est que les parents biologiques obligent l'enfant à aimer et se comporter avec le beau parent comme s'il était son parent biologique. Donc, c'est normal que l'enfant le rejette.

Est-ce que le sexe de l'enfant a un rapport avec la complexité des relations ?

C'est vrai que c'est différent selon qu'il s'agisse d'une fille ou d'un garçon. Mais ce n'est pas le nœud du problème. La complexité des relations enfants/beaux parents, dépend surtout de l'âge, de la maturité de l'enfant, du moment choisi pour le lui annoncer. Et le plus important, c'est la nature de la relation que l'enfant entreprend avec le parent biologique remarié.

Justement, en parlant de l'âge : A quelle période de la vie de l'enfant, est-il moins compliqué d'accepter un beau parent ?

La période la plus facile, c'est avant trois ans, parce qu'à cet âge, l'enfant recherche un lien affectif. Il n'y a pas encore ce que nous appelons la phase œdipienne où l'enfant est déjà en rivalité avec le parent biologique du même sexe. Après c'est l'adolescence, et là encore c'est plus difficile même dans une situation familiale normale.
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