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Une lecture sur la régionalisation avancée

EL Mustafa ICHI
Urbaniste aménagiste et juriste membre ATGDH.

Une lecture sur la régionalisation avancée
La régionalisation avancée ne peut se limiter seulement au transfert d'une partie du pouvoir exécutif et financier, mais doit s'étendre également à une partie du pouvoir législatif. Autrement dit, elle permet d'attribuer aux régions une autonomie administrative, financière et législative.
Depuis longtemps, le Maroc avait institué la régionalisation. Ce processus a pris sa première forme en 1971 avec la création de sept régions. Et avec la décentralisation administrative, ce processus a été renforcé en 1984 et plus encore en 1992 et 1996 par la révision de la Constitution. Celle-ci a érigé les régions en collectivités locales, lesquelles sont considérées comme des entités décentralisées ayant une personnalité juridique propre.

Dans le même ordre d'idée, l'appel au renforcement du système régional a pris un nouveau souffle avec la lettre royale du 19 novembre 1993 adressée par feu Hassan II dans laquelle il avait invité le gouvernement à avoir une nouvelle vision pour élargir les compétences des délégations régionales. Cependant, la région n'a commencé de devenir la base du développement économique qu'on 2002. Dans cet esprit, il a été créé seize régions, mais leurs attributions et compétences sont restées limitées. Cela ne leur permettait pas de devenir de vrais acteurs du développement quant à leurs organes. À l'opposé, il y avait la prépondérance de l'exécutif, incarné par le wali de la région, sur les structures régionales. Quatre ans plus tard, la loi de finances allait conforter pour la première fois une ligne budgétaire spécifiquement réservée aux régions.
De même, la nouvelle charte de 2002 a élargi les attributions des conseils communaux et institué un statut propre pour les grandes agglomérations urbaines dans l'esprit de favoriser l'unité de la ville.
Force est de constater que le Maroc ne veut pas de régionalisation importée. Sa majesté Mohammed VI, que dieu l'assiste et le glorifie, cherche le meilleur exemple de régionalisation avancée. Le discours royal du 6 novembre 2009 a affirmé le souci de l'instauration d'une régionalisation où se manifeste l'expression générale de la nation et à laquelle tout doit participer.

Cela veut dire que la régionalisation ne donnera aucune valeur ajoutée sans la participation des différentes parties de la société. Une régionalisation qui bénéficie de plus grande prérogatives locales. Il est temps donc de cesser d'importer les modèles des autres pays, plus particulièrement de l'Europe, et de faire confiance au peuple et aux élites intellectuelles pour élaborer et mettre en place les piliers d'une régionalisation démocratique en tenant compte des spécificités géographiques, historiques et culturelles, tout en insistant sur la nécessaire répartition juste et équitable des ressources.

Pour ce faire, il faut la volonté de tous, la citoyenneté et l'amour de la patrie. De cette façon, nous pourrons innover et créer notre propre modèle de régionalisation, un modèle qui réponde aux conditions et circonstances que vit le Maroc. Le lancement d'une dynamique de régionalisation avancée et graduelle est un processus qui doit s'accompagner d'un renforcement de la décentralisation. Sa Majesté avait insisté sur la création de régions qui prennent en compte les impératifs de bonne gouvernance territoriale, les spécificités et les potentialités propres à certaines régions, ainsi que les besoins de leurs populations respectives en matière de développement. Le souverain a insisté sur la constitution d'un système régional basé sur l'approche territoriale, ainsi que sur le transfert du pouvoir central vers les services extérieurs, structurés en pôles techniques et régionaux.

C'est-à-dire, la création d'une charte qui prévoit les mécanismes juridiques appropriés pour une gouvernance territoriale conférant aux walis et aux gouverneurs les prérogatives pour l'exercice de leurs missions. De ce fait les régions bénéficieront d'une autonomie qui va plus loin qu'une simple décentralisation de l'administration, une régionalisation avec des compétences normatives qui reconnait le pouvoir législatif régional. A partir de là, le Souverain, dans son discours à l'occasion de la fête du Trône, a demandé la constitution d'une commission consultative sur la régionalisation. Celle-ci aura à élaborer un modèle marocain de régionalisation ainsi que les mesures d'accompagnement. Le projet devient donc prioritaire pour le pays. Car la régionalisation est un choix politique, mais aussi un jalon essentiel dans la restructuration d'un Maroc nouveau. Il reste à savoir quel modèle de régionalisation sera adopté. Comme disait Mohamed Haddi, P.E.S, «l'histoire et le référent culturel permettent la transition du fait régional en région lui conférant sa véritable légitimité. D'une autre manière, faut-il opter pour le modèle qui structure l'espace autour d'homogénéités culturelles de solidarités historiques et des identités naturelles, atouts qui favoriseraient l'action de développement de la région?» Le système le plus proche de la réalité marocaine et qui convient le mieux à ses spécificités est celui des autonomies où il y a un gouvernement local et un parlement pour gérer les affaires locales comme il faut.

Dans ce sens, toujours est-il que le Royaume s'achemine certainement vers la mise en place d'une régionalisation adaptée aux spécificités de chaque région. Le pays est une monarchie forte avec un État fort. Par conséquent, l'État aura toujours à jouer un rôle de régulateur, même dans un système marqué par une décentralisation très poussée. Cela nécessite au premier rang de procéder à la révision constitutionnelle. En effet, quel que soit le système régional vers lequel on s'achemine, il est absolument nécessaire de réviser la Constitution pour y intégrer des principes essentiels de l'État tels que l'unité nationale, la solidarité entre les régions. Sous un autre angle, la régionalisation se doit d'être constitutionnellement reconnue pour lui soit accordée une garantie constitutionnelle et qu'elle soit mise à l'abri des conjonctures politiques. De même, la révision de la loi sur l'organisation régionale de 1997 et son adaptation aux nouvelles réalités du terrain s'impose. À cela s'ajoute la mise en place de conseils démocratiquement élus dans le cadre d'une répartition cohérente des compétences entre le centre et les régions, ce qui permet à ces dernières de bénéficier d'une autonomie poussée. En dehors du cadre institutionnel, l'élément humain est une autre problématique à soulever dans ce processus de régionalisation.

Vu le rendement actuel de l'élite politique, une véritable mise à niveau de cette classe s'impose. En outre, il faudrait repenser le découpage administratif dans son ensemble ainsi que le système de régionalisation du point de vue économique et politique, en tenant compte des éléments humains et historiques. Espace donc de consolidation des solidarités sociales et de compétitivité et lieu privilégie de développement participatif, la région doit être en plus un lieu de cohésion et de complémentarité des entités la composant et non une simple affaire d'équilibre géographique, démographique ou économique. Ce partage doit être dynamique et favorisé par la culture de dialogue et de consensus qui prévaut dans le pays. M. Haddi a raison lorsqu'il disait qu'outre ses potentialités économiques, la région doit s'imposer comme un espace d'exercice de la vie économique, politique et culturelle, offrant l'occasion à tous les acteurs de s'investir pleinement dans le projet régional. Mais si le cadre semble tracé, le plus dur reste à faire, à savoir son fonctionnement, directement, au mieux de la région et, indirectement, dans l'intérêt de la nation.

Ce processus est une nécessité à l'ère de la mondialisation, mais aussi une pièce maîtresse dans l'édifice démocratique marocain en vue de la consolidation de la démocratie territoriale. Une démocratie qui oblige l'État à partager certaines de ses compétences avec des entités régionales et locales. L'objectif premier dans ce sens est de contribuer au développement de toutes les provinces marocaines de manière démocratique, en ce sens que les populations seront chargées de la gestion de leurs propres affaires.
Le Maroc réussira ce grand chantier, puisque c'est la volonté royale qui le soutient et le renforce et parce que le peuple est en symbiose avec son Souverain.

D'un autre côté, le système des autonomies permettra de résoudre le conflit inventé et artificiel du Sahara, en permettant aux populations sahariennes de gérer elles-mêmes leurs affaires tout en préservant leur spécificités culturelles. Le renforcement de la décentralisation et du système des autonomies permettra non seulement une implication de plus en plus accrue des citoyens dans la gestion des affaires locales, mais aussi la résolution de plusieurs problèmes liés au développement économique du pays.
Ce renforcement constitue le moyen le plus idoine pour lutter contre les disparités interrégionales.
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