Menu
Search
Jeudi 25 Décembre 2025
S'abonner
close
Jeudi 25 Décembre 2025
Menu
Search

L'éboueur, mal vu et très sous-estimé

Jour de fête religieuse, férié pour tous les Marocains, enfin presque. Certains travaillent sans interruption tout au long de l'année, pour assurer la salubrité de nos rues.

No Image
Ramasser les ordures, balayer les rues, sont des services qu'ils rendent tous les jours, qu'il pleuve, qu'il gèle ou qu'il fasse chaud, pendant les vacances, les jours fériés, etc. Par tous les temps et en toutes circonstances, les éboueurs, sont là pour nettoyer près de chez nous. Pourtant, malgré l'importance de leur métier pour l'environnement et notre bien-être quotidien, ils restent sous-estimés au regard de la société. «Je travaille en tant que balayeur depuis deux ans maintenant. Les gens ne sont pas tous sympas avec nous, certains nous traitent comme des moins que rien, d'autres nous ignorent complètement. Seule une toute petite minorité d'habitants nous parle comme des humains», déclare Mostapha, un balayeur.

En effet, au moment où il parle, un enfant, accompagné de sa maman, jette l'emballage d'un biscuit qu'il vient de manger sur le trottoir tout juste balayé. Cela ne semble pas gêner La mère qui n'y prête aucune attention. «C'est la forme de dévalorisation dont nous souffrons le plus souvent. Personne n'estime le travail que nous faisons, au point que nous ne pouvons même pas protester contre un geste pareil», explique-t-il. «Si j'avais eu la chance de faire des études, les choses auraient été bien différentes. Je n'avais, malheureusement, personne pour m'orienter, j'ai vécu des situations très difficiles et j'ai fait beaucoup d'erreurs dans ma vie. Quand je me suis marié, j'ai décidé de chercher un emploi stable et honnête pour satisfaire aux besoins de ma famille. Mais les gens ne voient en moi qu'un balayeur des rues sans aucune utilité. Je ne me sens pas respecté», ajoute-il amèrement.

«Ça fait 36 ans que je fais ce métier. C'était quand même bien mieux avant. Quand c'était la municipalité qui se chargeait de nous, nous bénéficiions d'un peu plus d'estime qu'actuellement, vu que nous étions considérés un peu comme des fonctionnaires d'État», affirme désespérément Ibrahim. «Le plus dur dans notre métier, c'est l'inconscience des gens. Ils ne comprennent pas que s'ils nous facilitaient la tâche du nettoyage, ce serait surtout bénéfique pour eux», explique-t-il. Certains par contre sont plus satisfaits. Abdoullah assure : «je travaillais pour une société de construction automobile depuis 1974. Après quelques problèmes, j'ai dû quitter mon travail. Et pendant 30 ans, je n'ai fait que des petits boulots instables, j'étais au bord de la dépression. Alors travailler comme balayeur, me comble énormément», dit-il. Et d'ajouter : «c'est vrai que j'aurais préféré être avec ma famille dans un jour pareil, jouer avec mes enfants… mais c'est mon destin et je ne m'en plains pas. C'était une voisine qui m'avait proposé d'aller voir le président de la commune pour me faire embaucher en tant qu'agent de propreté urbaine. Je leur serai reconnaissant à tous les deux jusqu'à la fin de ma vie», affirme-t-il, en voyant passer un homme avec ses deux fils.
Les éboueurs n'ont pas le droit de prendre des vacances, parce que c'est sur eux que repose la responsabilité d'une «ville propre». Quand par malheur, ils ne passent pas dans un quartier, celui-ci devient immédiatement invivable. Les agents qui travaillent dans les camions de bennes à ordures ne sont pas dans de meilleures situations, bien au contraire. «Les automobilistes n'arrêtent pas de klaxonner lorsque nous nous arrêtons pour vider une poubelle. Ils n'arrivent pas à comprendre que nous faisons notre travail», déclare un conducteur.

Et d'ajouter : «Cela fait quatre ans que je conduis un camion de bennes à ordures. Il faut dire que je n'avais pas d'autres alternatives, et le moins que je puisse dire c'est que nous sommes très dévalorisés par le reste des citoyens», dit-il.
«Les gens passent à côté de nous en se pinçant le nez pour ne rien sentir, c'est très blessant. Ils font de leur mieux pour ne pas trop s'approcher, comme si nous étions des lépreux», raconte Hamid, un éboueur. «Nous comprenons que l'odeur ne soit pas très agréable à sentir, mais quand même… nous aussi nous souffrons d'un manque important de moyens d'hygiène», explique son collègue.

Les éboueurs en France

Les municipalités ont depuis longtemps pris conscience de l'importance de cette profession, ce qui explique qu'elle est protégée, hiérarchisée, dotée d'un statut d'assimilé fonctionnaire et rémunérée en conséquence. Pour devenir éboueur, il existe deux modes de recrutement principaux : soit directement par les municipalités (l'éboueur a alors le statut d'agent des collectivités territoriales), soit par des entreprises privées de nettoiement, liées aux communes par un contrat de sous-traitance. L'éboueur fait partie, en général, d'une équipe minimum de 3 personnes avec le conducteur. Il doit respecter des règles de sécurité strictes, car il travaille au milieu de la circulation. Il est exposé aux intempéries. Les horaires sont souvent décalés, car il peut travailler soit très tôt le matin (à partir de 5 heures), soit tard dans la nuit (jusqu'à 4 heures du matin). Un éboueur débutant perçoit le SMIC : 1 344 € de salaire brut mensuel, plus des primes ou des indemnités liées aux conditions de travail. La part de ces primes est différente et fonction du statut des entreprises. L'accès à la profession est possible sans diplôme, en se formant directement auprès d'un employeur. Après quelques années d'expérience professionnelle, l'éboueur peut devenir chef d'équipe ou contrôleur. Il peut aussi, en suivant une formation complémentaire, devenir conducteur de benne à ordures. S'il passe le diplôme spécialisé en assainissement et collecte des déchets liquides spéciaux, il peut travailler pour des industries à la collecte de déchets pompables et à la maintenance des réseaux d'assainissement.

* Journaliste stagiaire
Lisez nos e-Papers