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Plongée dans le royaume de l’enfance

● Carole Benitah explore les mémoires de l’enfance à travers deux expositions. La première à la galerie 127 à Marrakech, du 21 avril au 26 mai. La seconde du 7 juin au 14 juillet à la galerie de l’Aimance à Casablanca.
● Cette exposition sera l’occasion de découvrir les faces cachées de l’adolescence. Une période difficile que l’artiste éclaire de sa vision photographique singulière et unique.

Plongée dans le royaume de l’enfance
L’artiste élargit son mode d’expression à de petits objets, parfois désuets, vestiges de son passé.

Depuis la série photographique «Photos souvenirs» consacrée à son enfance marocaine, présentée à Paris Photo en 2009 et en 2010, puis à la Marrakech Art Fair en 2010 et 2011, ainsi que sa participation à de nombreux autres festivals, l’artiste Carole Benitah poursuit son (en)quête intime dans le royaume de son enfance. «J’ai décidé d’explorer la mémoire de l’enfance parce que cela me permet de comprendre qui je suis et de définir mon identité aujourd’hui», a-t-elle confié. Elle présentera au Maroc (son pays de naissance), en avant-première mondiale, le second album de cet opus en 3 actes qui interroge cette fois les tourments de l’adolescence. «Je travaille sur la famille et le temps qui passe. Cette série est la première série de photographies que je n’ai pas produites. J’ai utilisé les photographies dans mes albums de famille en choisissant des instantanés parce qu’ils sont liés au souvenir et à la perte. Les artistes qui brodent sur des photographies ne sont pas nombreux dans le monde. C’est une démarche singulière qui ne se réclame d’aucune mode», a-t-elle expliqué à ce sujet.

Du fil rouge de la petite enfance, Carolle Benitah passe au fil noir pour broder ces années fragiles et «angoissantes» à la fois ; intervalle entre les années nourries de contes de fées et celles des premières amours. Les acteurs sont, à quelques détails près, les mêmes que dans le premier album, le père, la mère, le frère et les sœurs… puis, imperceptiblement, vient se glisser dans la fratrie la figure de l’amoureux. Dans cette installation, qui est une forme de méditation sur le temps qui passe, le sien, et le nôtre, par effet miroir, l’artiste élargit son mode d’expression à de petits objets, parfois désuets, vestiges de son passé : des napperons «obsédés» ou des mouchoirs qui disent les obsessions, les besoins et les désirs : «Mêlant merveilles et effrois, je revisite le souvenir de l’enfance tout en mettant à jour les représentations culturelles conscientes ou inconscientes du rôle traditionnel de la femme et des schémas de la famille», indique l’artiste. Cette trilogie (l’enfance, l’adolescence et l’âge adulte) comporte pour chaque période un album composé chacun d’environ 15 images et réalisé en 5 exemplaires.
Chaque image, brodée et perlée, est aussi reproduite en 2 formats 42 x 60 et 53 x 80 (5 exemplaires pour chaque format).


Questions à : Carole Benitah

«L’enfance est une période charnière, déterminante dans la vie d’une personne»

Pourquoi avoir choisi de revenir en images sur votre enfance ?
J’ai commencé à m’intéresser à mes photographies de famille lorsqu’en feuilletant l’album de mon enfance, je me suis retrouvée submergée par une émotion dont je n’arrivais pas à déterminer l’origine. Je ne me souvenais plus ni du moment de la prise de vue, ni de ce qui avait suivi ou précédé cet instant. Cette absence de souvenirs réveillait en moi, à la fois, une angoisse et quelque chose de familier. Ces moments fixés sur du papier me représentent, parlent de moi, de ma famille et disent des choses sur la question de l’identité, de ma place dans le monde, mon histoire familiale et ses secrets, les peurs qui m’ont construites et tout ce qui me constitue aujourd’hui. Le passé d’un être humain n’est ni fixe, ni figé, mais reconstitué par le présent et l’expérience du vécu. Et c’est dans ce dessein que je retravaille la photographie à l’aide du fil et des perles de verre.

Qu’est-ce que cela vous fait de parler de votre enfance marocaine ?
Je suis effectivement née et j’ai grandi à Casablanca et il me paraissait important de souligner l’influence du Maroc dans ma vie d’adolescente et, plus tard, de jeune adulte. Enfant, à Casablanca, j’avais l’impression de naviguer entre deux mondes opposés, deux univers fascinants, deux cultures fortes et que c’était un enrichissement. Dans mon souvenir d’enfant, le Maroc est le pays des djinns et du surnaturel, de femmes savantes capables de résoudre les difficultés les plus triviales à l’aide de leur potion magique et j’ai baigné dans ce côté irrationnel. J’essaie de retranscrire ce monde merveilleux et effrayant à la fois pour un enfant. Un monde qui a été le terreau de mon univers pictural aujourd’hui.

Quels sont vos projets ?
Je continue à remonter le temps en abordant l’âge adulte. Dans l’immédiat, j’expose à la galerie 127 à Marrakech puis plus tard à la galerie de l’Aimance à Casablanca, la première partie de ma série «Photos Souvenirs, l’enfance marocaine». C’est la première fois que je montre l’ensemble de la première partie ainsi que l’installation sur le sol marocain. J’espère que mon travail touchera les Marocains et qu’ils trouveront un peu d’eux-mêmes dans le monde fantastique et merveilleux que j’ai recréé autour de mon enfance et de ses émotions.

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