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Les marchands ambulants changent de statut

● L’époque où le marchand ambulant venait de la campagne ou du bidonville et avait un statut loin d’être valorisant est révolue. Aujourd’hui, être marchand ambulant est honorable et presque «encouragé» par les autorités.
● Une mise au point sur la situation actuelle s’impose.

Les marchands ambulants changent de statut
Un réel travail de fond se prépare, en partenariat avec le ministère de l’Intérieur pour «recaser» ces commerçants. Ph. Saouri

Ces marchands faciles à identifier exerçant «une activité de commerce sur la voie et les places publiques ou sur les marchés» représentent un réel phénomène de société dont le ministère de l’Industrie et du commerce est conscient. En effet, un réel travail de fond se prépare, en partenariat avec le ministère de l’Intérieur pour «recaser» ces commerçants, puisque l’option de tout simplement les interdire d’exercer est à exclure. Les autorités locales de Berrechid auraient prévenu, d’ores et déjà, leurs marchands ambulants qu’ils auraient à leur disposition un marché spécifique où exercer leur activité. Quant à la ville blanche, elle aurait bénéficié de trois souks pilotes construits pour «recaser» les marchands ambulants du coin, à savoir les marchés Chadia, Maarab et Sidi Lkhadir.

Quand les étudiant s’y mettent

Il s’agit là d’un véritable phénomène de société qui a transformé les villes en véritables foires anarchiques à ciel ouvert... Vendeurs de légumes, de vêtements, de produits électroniques, tout devient une excuse pour vendre et gagner de l’argent. «Je fais ça pour gagner ma vie parce que je n’ai pas d’autres recours», explique Mohamed qui s’est pourtant essayé aux bancs de l’école, mais sans résultats probants. Quand, il y a quelques années, les études étaient les seules valeurs sûres pour réussir et constituaient une fierté familiale, aujourd’hui la donne a changé. Et pour cause, être marchand ambulant est devenu un métier honorable, accessible à tous. Conscients que le diplôme n’a plus la même valeur d’antan, les jeunes universitaires, licenciés s’adonnent à ce métier dont le revenu journalier peut atteindre jusqu’à 300 voire même 400 DH. «J’ai une licence en droit, je suis resté au chômage pendant 1 an et n’ayant pas trouvé d’emploi pour vivre, je me suis adonné au commerce», explique Adil, vendeur de chaussures sur l’avenue
Mohamed V de Rabat. «Il y a des jours où je vends beaucoup, d’autres pas du tout, c’est toujours mieux que de mendier dans a rue», continue le jeune homme qui paradoxalement, vend des chaussures, en face des grandes enseignes de chaussures et ça ne semble choquer personne. Un des vendeurs d’une enseigne de renom sur la place s’étonne sur le laxisme des autorités. «Avant, les policiers ne les laissaient pas faire, maintenant, ils y sont presque encouragés», explique ce vendeur qui ne peut pas concurrencer le marchand ambulant sur les prix bas des chaussures.

Souffrances du commerce formel

Des situations comme celles-ci sont de plus en plus courantes au Royaume. Il n’est pas impossible de voir les commerçants ambulants s’installer juste en face d’autres commerces bien formels. «Je paye mes impôts, mes produits sont au prix du marché, comment concurrencer un marchand ambulant qui ne paye pas d’impôts et qui peut vendre au prix qu’il veut» ?, s’indigne Houssain, un commerçant du quartier Maârif qui n’en peut plus de voir ses clients s’approvisionner chez les ambulants. Des marchands ambulants dont le profil a changé, une indulgence de la part des autorités à la suite du Printemps arabe et à l’effet «Bouazizi» mais surtout des citoyens marocains qui recherchent la facilité et la proximité : «les gens peuvent s’approvisionner de leur voiture, sans prendre la peine de descendre, tout leur est plus facile, pourquoi prendre le temps de se déplacer chez les commerçants ?», s’indigne un vendeur de vêtements à Hay Hassani. Un effet de mode qui tend à augmenter, mais surtout à se personnaliser. «Le problème du commerce informel provient du rapport de force inversé à la suite du Printemps arabe.

Avant les marchands avaient peur de l’autorité, maintenant c’est l’inverse», explique un responsable de la préfecture Hay Hassani-Ain Chok à Casablanca, quartier touché de près par l’invasion des commerçants sédentaires. Où est donc passée l’époque où l’on assistait à la peur dans les yeux des marchands ambulants au passage des autorités ? Des dizaines de marchands se donnant le mot à la vue d’un policier pour évacuer les lieux au plus vite. Une image que le citoyen marocain n’a pas vue depuis des années. Caïds et autres mokhaznis, habitués à les poursuivre et à confisquer leurs biens, ont presque disparu. Les mentalités ont donc changé, reste à s’adapter à cette nouvelle situation et à trouver une solution efficace pour accompagner la politique de recasement et un suivi de près pour ces marchands caméléons qui pourraient se sentir à l’étroit et regretter leur vie de nomades… Affaire à suivre.

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