Le président de l‘association nous confie qu’il entend multiplier les conférences à destination du grand public pour le sensibiliser aux questions scientifiques. Ceci permettrait de pallier ce qu’appelait Ahmed Djebbar, chercheur en histoire des mathématiques, auteur d’«Une histoire de la science arabe» (Points) : «cette injustice historique» qui nous a fait oublier que le monde musulman a pris la tête du monde scientifique au VIIIe siècle et que les découvertes de cette époque constituent des repères incontournables, entre l’Antiquité et la renaissance. C’est ce même chercheur qui rappelle le fil conducteur de la conférence de Rabat : «tout musulman doit chercher le savoir, connaître les lois de la nature». Entretien avec le président de l‘association Hay’a, El Houssine Zaid.
Le Matin : Vous présidez l’association la Hay’a (Corps marocain pour l’étude des signes scientifiques dans le Coran et la Sunna). Pourriez-vous présenter cette association ?
El Houssine Zaid : La Hay’a est une association marocaine indépendante qui a été créée en 2003, suite à l’initiative d’un groupe d’universitaires, d’enseignants-chercheurs de différentes disciplines (biologie, géologie, chimie, physique, mathématiques, informatique), des médecins et des ingénieurs. Son siège est à la Faculté des sciences de Rabat. La Hay’a est venue combler un vide manifeste au niveau national et répondre au besoin de remettre en place le pont qui reliait par le passé la science au Coran, pont qui a donné naissance à cette magnifique civilisation islamique qui s’est étendue de l’Espagne à la Chine, qui a constitué l’âge d’or des inventions et des découvertes et qui a changé la face du monde puisqu’elle a dressé les bases scientifiques dans le domaine de la recherche et de la technologie.
Au cours de la conférence qui a lieu à la Faculté des sciences de Rabat, les intervenants ont décrypté les informations relatives à l’origine de l’Univers, de l’embryologie, de la chimie, de la biologie, de la géologie, de la physique contenues dans le Coran. Cela démontre que le livre saint n’est pas seulement un livre d’éloquence, mais qu’il contient de l’information scientifique. Un mot sur ce point précis ?
Il suffit de rappeler que le Coran est constitué de plus de 6 000 versets, dont le sixième (soit plus de 1 000 versets) concerne des phénomènes scientifiques. C’est dire l’importance qu’accorde le Coran à la science. Il exhorte le lecteur à contempler la Création des cieux et de la terre, «Dis : regardez ce qui est dans les cieux et sur la terre !» (Coran : 10 ; 101) et attire son attention sur des phénomènes scientifiques aussi complexes et variés que le cycle de l’eau, la germination des graines, les étapes de développement de l’embryon, le phénomène de perception de la douleur, etc. Le caractère le plus remarquable du Coran est la compatibilité de ses versets avec les récentes découvertes qu’a connues le monde de la science. Dieu invite l’humanité entière à réfléchir à l’ensemble de ces signes et lui promet qu’Il va lui montrer d’autres signes dans l’avenir. Il y a certaines sourates explicites à cet égard et les exemples sont très nombreux.
Dans quels domaines par exemple ?
L’astrophysique par exemple. Il est largement admis aujourd’hui par les astrophysiciens que la création de l’Univers est due au phénomène du «Big-Bang» (explosion gigantesque), théorie appuyée depuis quelques décennies par des observations et données expérimentales. Selon cette théorie, l’Univers en totalité était initialement condensé en une grosse masse unique (Primary Nebula), puis ce fut le «Big-Bang» (séparation secondaire) qui entraîna la formation des galaxies qui se divisèrent ensuite pour former les étoiles et les planètes.
En évoquant la genèse de l’Univers, le Coran rapporte : «Ceux qui ont mécru, n’ont-ils pas vu que les cieux et la terre formaient une masse compacte ? Ensuite, Nous les avons séparés et fait de l’eau toute chose vivante. Ne croiront-ils donc pas ?» (Coran : 21 ; 30). La congruence entre ce verset et le «Big-Bang» est indiscutable ! Ce qui ne manque pas de soulever la question suivante : «Comment expliquer qu’un Livre, apparu dans le désert de l’Arabie chez une communauté d’analphabètes, il y a plus de 1400 ans, puisse contenir une telle information à propos de l’origine de l’Univers» ?! Mieux encore ! Le terme utilisé par le Coran est «Fatq» (qui signifie «épanouissement» utilisé dans la poésie pour décrire l’émergence de la fleur à partir du bouton floral), et en aucun cas il ne fut fait allusion à une explosion (Bang). Ce qui donne sérieusement à réfléchir ! Comme l’Univers est ordonné (systèmes solaires, planètes gravitant autour de leur soleil, etc.), il est beaucoup plus logique qu’il soit la conséquence d’un épanouissement que d’une explosion (qui générerait plutôt le chaos). Cet ordre, nous le retrouvons dans le verset suivant : «Le soleil ne peut rattraper la lune, ni la nuit devancer le jour ; et chacun vogue dans une orbite.» (Coran : 36 ; 40) Ce verset mentionne d’ailleurs un fait essentiel découvert par l’astronomie moderne, à savoir l’existence d’orbites individuelles du Soleil et de la Lune.
Vous avez évoqué l’Apex solaire, qu’entendez-vous par là ?
D’énormes découvertes scientifiques ont été réalisées grâce à des astrophysiciens passant le plus clair de leur temps à scruter le ciel, utilisant des moyens sophistiqués et perfectionnés. C’est ainsi que l’endroit fixé vers lequel le Soleil se dirige, emportant avec lui le système solaire, a été localisé par l’astronomie moderne. On l’appelle «Apex solaire». Le système solaire est en effet en mouvement dans l’espace, en direction d’un point situé dans la Constellation d’Hercules (Alpha Lyrae) dont la localisation exacte a été établie. Le Coran aborde la question dans une série de versets très puissants du chapitre 36 : «Louange à Celui qui a créé tous les couples de ce que la terre fait pousser, d’eux-mêmes, et de ce qu’ils ne savent pas ! Et une preuve pour eux est la nuit. Nous en écorchons le jour et ils sont alors dans les ténèbres. Et le soleil court vers un gîte qui lui est assigné ; telle est la détermination du Tout-Puissant, de l’Omniscient. Et la Lune, Nous lui avons déterminé des phases jusqu’à ce qu’elle devienne comme la palme vieillie. Le Soleil ne peut rattraper la Lune, ni la nuit devancer le jour ; et chacun vogue dans une orbite» (Coran : 36 ; 36-40). Par ailleurs, concernant la sphère de l’Univers, le Coran n’utilise jamais le terme «espace», mais utilise plutôt des termes d’architecture comme : «construction» «porte», «toit», «édifice», «toile». Les scientifiques pensent qu’avant que les galaxies ne fussent formées, la matière céleste a été sous forme de gaz ou de poussière. Le Coran utilise le terme «fumée» pour décrire ce phénomène. «De plus, Il se tourna vers le ciel alors qu’il était fumée et Il Lui dit, ainsi qu’à la Terre, “Venez de gré ou de force” et ils dirent “Nous venons obéissants”» (Coran : 41 ; 11). La science révèle qu’avant la formation des étoiles, l’Univers était une masse gazeuse densément obscure et avec des particules solides en suspension. Cet état se trouvait à une température élevée. Sa qualification de poussière est à écarter et la description la plus précise consiste à dire qu’il s’agissait de fumée.
Que conclure de toutes ces informations ?
En conclusion, attribuer la présence d’autant de signes et de faits scientifiques dans le Coran au simple fait du hasard, va à l’encontre de la raison, de la logique et de la véritable approche scientifique. Si l’on se rappelle que jusqu’au début du vingtième siècle, les scientifiques pensaient que l’Univers était statique (Einstein avait même proposé sa célèbre constante : la constante cosmique pour revenir par la suite avouer que c’était là sa plus grosse erreur), comment expliquer la présence de cette quantité importante d’informations pertinentes dans un Livre du septième siècle ? Une seule explication : ce Livre émane du Tout-Puissant, Seigneur des Mondes qui agence les plus infimes détails de la Création, et en aucun cas ne saurait être une œuvre humaine.
Le professeur Farid Boulouiz, réanimateur anesthésiste installé à Casablanca, a donné une conférence passionnante sur «l’éthique médicale : mort cérébrale, euthanasie, dons d’organes». Quelle est la position du Coran sur la question du don des organes ?
Sa conférence a donné lieu à un débat passionnant qui a permis de préciser les choses. Aux yeux de l’Islam, le trafic d’organes humains est interdit. Sous certaines conditions, la transplantation et la greffe de tissus ou d’organes (cornée, peau, etc.) sont permises. En cas d’extrême nécessité, le don d’organes (qu’on a en double comme le rein par exemple) à une personne (en danger de mort) est autorisé à condition toutefois que cela lui soit profitable et non préjudiciable au donneur. Les avis restent cependant partagés concernant le prélèvement d’organes du corps d’une personne défunte : certains l’autorisent sous certaines conditions, d’autres s’y opposent. Parmi les conditions exigées, la personne décédée doit avoir donné pour cela, et de son vivant, son accord ; de préférence avec le consentement des héritiers. L’accord obtenu doit être inconditionnel, et le transfert d’organe ne doit pas avoir fait l’objet d’une transaction financière quelconque, car le commerce d’organes n’est en aucun cas autorisé.
Quel sera le thème de votre prochain colloque ?
Le thème de notre prochaine manifestation scientifique portera sur les signes numériques ou «l’i’jaz» des nombres. Nous sommes convaincus qu’il existe bel et bien un ordre numérique dans le Coran. Les preuves sont très nombreuses. Nous aurons, je l’espère, l’occasion d’aborder cet aspect encore mal connu du Coran.
