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«Il est hors de question qu’il y ait en Autriche des actes xénophobes»

● Michael Spindelegger, vice-chancelier autrichien et ministre des Affaires européennes et internationales, en visite officielle au Royaume les 17 et 18 de ce mois, s’est entretenu avec le chef du gouvernement Abdelilah Benkirane et le ministre des Affaires étrangères Saâd-Eddine El Othmani. À l’ordre du jour de ces entretiens, les moyens de renforcer la coopération entre le Maroc et l’Autriche.
● Approché par «Le Matin», le chef de la diplomatie autrichienne nous a confié à travers cette interview son évaluation de la situation au Maroc et du niveau des échanges entre les deux pays.

«Il est hors de question qu’il y ait en Autriche  des actes xénophobes»
Michael Spindelegger, vice-chancelier autrichien et ministre des Affaires européennes.

Le Matin : Quel a été le contenu des entrevues qui ont eu lieu avec Abdelilah Benkirane, chef du gouvernement et Saâd-Eddine El Othmani, ministre des Affaires étrangères et de la coopération ?
Michael Spindelegger  : Nous avons tout d’abord discuté des moyens susceptibles de renforcer notre coopération bilatérale, mais aussi au sein des organisations internationales. Nous avons également abordé les problèmes bilatéraux, en particulier l’incident qui a eu lieu en pleine compagne électorale en Autriche où des immigrés marocains ont fait l’objet de propos xénophobes. En effet, la communauté marocaine résidant en Autriche a été prise pour cible par l’extrême droite autrichienne, à travers des atteintes diffamatoires et xénophobes.

Où en est-on par rapport à cet incident et comment la diplomatie autrichienne a-t-elle géré cette affaire ?
J’ai pris une position rigoureuse et j’ai condamné fermement les agissements du parti de l’extrême droite. Pour moi, il est hors de question qu’il y ait en Autriche des actes xénophobes. D’ailleurs, ce parti n’a pas réussi dans les élections locales. Ainsi, j’ai clarifié ma position au chef du gouvernement et au ministre des Affaires étrangères.

Concrètement, lors de ces entrevues, avez-vous fixé un agenda de partenariat entre le Maroc et l’Autriche ?
Actuellement, une entreprise autrichienne vient de lancer un projet pilote au Maroc, avec une enveloppe d’investissement en millions d’euros. C’est une entreprise spécialisée dans l’assemblage des faisceaux d’automobiles. Ce projet permettra la création de 1 400 postes d’emploi. Cette implantation est une première expérience qui pourra encourager d’autres entreprises à venir investir au Maroc. D’une manière générale, j’ai invité le ministre des Affaires étrangères à effectuer une visite en Autriche, accompagné d’une délégation d’hommes d’affaires.

D’après vous, que faut-il faire pour attirer davantage les investissements autrichiens au Maroc ?
Le plus important est de rassurer les investisseurs, notamment en matière de législation, pour que les investissements soient intéressants et rentables.

Quelle évaluation faites-vous des échanges
commerciaux ?
Nous avons enregistré une augmentation de 15% l’année précédente. Cela montre que ça fonctionne très bien, mais nous pourrons renforcer davantage le niveau des échanges. Nous pouvons miser sur une amélioration des échanges des produits finis avec une meilleure plus value, ainsi que des produits agricoles.

L’Autriche dispose d’un savoir-faire important dans le domaine des technologies agricoles et environnementales, y a-t-il des projets pour faire bénéficier le Maroc de cette expertise ?
Nous sommes très en avance dans le domaine des énergies renouvelables par rapport à certains pays. Je pense que nous pourrons mettre notre expertise à la disposition du Maroc. D’ailleurs, aujourd’hui, une entreprise autrichienne fournit les pièces pour la production de l’énergie solaire à l’Arabie saoudite. Au niveau de l’agriculture, le Maroc dispose d’un trésor, avec ses terres fertiles et ses fruits que nous ne pouvons pas cultiver sur nos terres.


Quid des relations diplomatiques entre les deux pays ?
Nos relations diplomatiques remontent à 230 ans. Mais je pense que nous pouvons développer encore plus notre coopération au sein des organisations internationales comme les Nations-Unies. L’UMA offre également un autre cadre de coopération, car nous pouvons élargir les opportunités qu’offrent les marchés intérieurs européens à cette région.

Comment votre gouvernement voit-il les changements opérés au Maroc ?
Nous avons suivi ces évolutions avec satisfaction. Le Maroc a emprunté une voie spéciale. Il ne s’agit pas d’une révolution sanglante, mais d’une évolution pacifique dans une direction plus large. Les changements introduits par la nouvelle Constitution montrent le chemin. Mais des efforts seront nécessaires pour les intégrer dans les nouvelles lois et pour qu’ils soient ressentis dans la pratique.

Peut-on comprendre que cette visite est le signe d’une ouverture de l’Autriche sur la Méditerranée, le Maghreb et l’Afrique ?
Tout à fait. Autrefois, nous nous sommes focalisés sur nos voisins directs, sur le balcon de l’Ouest. Mais dans cette région du monde, beaucoup de choses se sont passées. Je suis venu moi-même pour voir comment cela se présente et quels seront les développements dans les années à venir. Je vois cela d’une manière très positive, dans le sens d’un développement où le Maroc a opté pour un rapprochement plus fort avec l’Europe, parallèlement à son développement social. Pour nous, il serait très intéressant de coopérer d’une manière très renforcée avec les pays du Maghreb et de la Méditerranée.

Pourquoi les eurodéputés autrichiens ont-ils des positions nuancées sur des dossiers concernant le Maroc, comme l’accord de pêche ?
L’Autriche, en tant qu’État, s’est prononcée en faveur de cet accord de pêche, avec certaines observations. Mais au sein du Parlement européen, les Autrichiens ne sont que 18 eurodéputés. Donc nous ne pouvons pas être déterminants dans la prise
de décisions. Ce sont des discussions qui devront être menées par les partis politiques au sein du Parlement européen.


Comment l’Autriche voit-elle l’avenir de l’Europe dans un contexte marqué par une crise économique ?
Ce sont des temps difficiles pour les pays d’Europe. Mais cette crise offre également des opportunités. D’un côté, nous devons améliorer les lacunes de la construction de l’UE. Actuellement, nous ne pouvons pas réagir rapidement face à ces lacunes liées à la crise. C’est pour cela que la commission européenne a besoin de davantage de pouvoirs pour agir rapidement. D’un autre côté, nous avons besoin d’une impulsion pour aller de l’avant en termes d’innovation et de croissance. C’est la raison pour laquelle nous voulons orienter les projets que nous finançons dans cette direction.

Le Maroc a décidé de retirer sa confiance à Christopher Ross, l’envoyé personnel du SG de l’ONU pour le Sahara, quel est votre commentaire ?
En ce qui concerne Christopher Ross, il est impératif qu’il ait la confiance des deux parties, pour qu’il puisse agir d’une manière très efficace. C’est la raison pour laquelle on doit trouver rapidement une autre personne pour le remplacer et qui bénéficie de la confiance des deux parties, pour que les pourparlers puissent reprendre très rapidement. Nous sommes prêts en Autriche à accueillir les négociations, si les deux parties le souhaitent, afin de trouver une solution à ce dossier. Et j’espère qu’il y aura une percée qui permettra de résoudre ce problème qui dure depuis des dizaines d’années.

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