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«Il faudra ouvrir des chemins sur l’avenir pour de nouveaux projets de coopération»

Les entreprises françaises aspirent au développement des investissements français au Maroc. C’est ce que souligne le vice-président, directeur général du Mouvement des entreprises de France International (Medef International), Thierry Courtaigne.

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Aujourd’hui, quelque 170 entreprises françaises discuteront à Casablanca avec les responsables gouvernementaux marocains du bilan de la coopération économique ainsi que des perspectives de son développement. Et ce, dans le cadre de la réunion de haut niveau maroco-française avec la présence des deux chefs de gouvernements marocain et français sur le thème : «Maroc-France : un partenariat d’exception au service de la compétitivité».

Le Matin : Quelles sont vos attentes de la rencontre de haut niveau maroco-française ?
Thierry Courtaigne : 170 entreprises françaises font le déplacement à Rabat. Elles sont réparties sur différents secteurs. Des échanges fructueux ont eu lieu à Rabat en mars dernier avec les ministres. Les entreprises ont fait des suggestions et les ministres marocains ont affiché une marque d’intérêt. Nous attendons, en premier lieu, une évaluation de la mise en œuvre des recommandations visant à trouver des solutions aux défis à relever par différents secteurs de l’économie marocaine. Ensuite, il s’agira de se donner des perspectives communes, franco-marocaines, pour le développement économique et sectoriel du Maroc. On ne veut pas faire uniquement le bilan, mais il faudra aussi ouvrir des chemins sur l’avenir pour de nouveaux projets de coopération et de partenariat.

Les appréhensions de l’arrivée du PJD au pouvoir ont-elles été dissipées après la rencontre de mars dernier à Rabat ?
Il ne s’agissait pas d’appréhensions, mais plutôt de la nécessité de se connaître. C’était une phase de prise de connaissance. On voulait savoir si le gouvernement optait pour la continuité dans les projets sectoriels lancés dans le passé, s’il y avait des réticences du gouvernement marocain à l’égard des investisseurs étrangers ou des Français et si l’ouverture traditionnelle du Maroc sur le monde serait non seulement maintenue, mais amplifiée. Le chef de gouvernement Abdelilah Benkirane avait pleinement rassuré les investisseurs français.

L’Europe est en crise, le monde est en pleine transition. Le Maroc veut diversifier ses marchés. Dans ce contexte, que peuvent faire le Maroc et la France pour développer la coopération bilatérale ?
Il est important d’ouvrir des chantiers multiples aussi bien institutionnels qu’industriels et dans les services, la formation… Il faut que tous les secteurs de l’économie et de la société soient irrigués par ces échanges et par la volonté de travailler ensemble. Le Maroc et la France ont beaucoup à recevoir l’un de l’autre. La France a des technologies avancées et des réseaux internationaux. Le Maroc des coûts de production, des ressources minières et agricoles et des réseaux en Afrique et dans le Bassin méditerranéen soutenu par une politique volontariste et éclairée. Les échanges culturels sont également importants. Il y a beaucoup à apprendre les uns des autres.

Que pensez-vous du concept de colocalisation ?
C’est un terme nouveau dans cette relation. Cela fait trente-cinq ans que je travaille avec le Maroc. Grâce à la coopération entre les entreprises françaises et marocaines, elles peuvent exporter dans le monde. Cette colocalisation est un concept qu’on est en train de redécouvrir, de systématiser et de valoriser. Ce qui m’intéresse est de définir des secteurs de coopération entre les entreprises des deux pays, que ce soit pour le marché marocain, le marché français, le marché africain ou le marché mondial.

Croyez-vous vraiment à la complémentarité entre l’Europe et l’Afrique ?
Cette complémentarité se construit grâce à une bonne politique commune et à partir d’intérêts des chefs d’entreprises. Le gouvernement français encourage les entreprises françaises à investir au sud de la méditerranée. Le soutien qu’apporte la France au Maroc en termes de développement est important. Du côté du Maroc, grâce au lancement des plans sectoriels, le pays a donné une orientation à sa coopération vis-à-vis du monde extérieur. Cette stratégie oriente les investisseurs étrangers. Elle a été reconfirmée par le gouvernement actuel qui s’est donné des objectifs clairs, notamment pour le développement de l’économie sociale et la lutte contre la corruption, qu’elle soit petite ou grande.

Quels sont à votre avis les secteurs porteurs susceptibles de renforcer davantage la coopération bilatérale ?
On se connaît bien. Ce sont deux peuples qui ont le plaisir de se retrouver ensemble. L’importance dans les affaires c’est déjà d’avoir l’envie de faire quelque chose ensemble. En ce qui concerne les secteurs, on peut citer, entre autres, les produits mondiaux (automobile et aéronautique), l’agroalimentaire, la logistique, le tourisme, la mode. Au Maroc, il y a un boom extraordinaire pour les produits de qualité à partir du style et du goût marocains : l’architecture, les produits agroalimentaires, le cuir, l’artisanat…

La polémique sur la délocalisation est-elle fondée à votre avis ?
Je n’ai jamais vu une entreprise française fermer ses portes en France pour aller s’installer au Maroc. C’est bien de pouvoir travailler ensemble, produire du textile, de la mécanique ou de l’agroalimentaire ; et vendre le produit au monde à un meilleur prix que la concurrence internationale.

Il n’y a pas une crainte de la volonté du Maroc de diversifier ses marchés ?
Il est de l’intérêt du Maroc d’être ouvert sur le monde. Il n’y a pas que la France à vouloir travailler avec le Maroc. Le Maroc a des accords commerciaux avec différents pays. Les Français ont une vision globale qui va au-delà de l’exportation et de l’importation
pour toucher également l’investissement et la coopération technologique, la formation des jeunes, le développement social… ce qui fait que l’offre française est appréciée. L’essentiel est que la concurrence soit loyale.

Quels sont, à votre avis, les freins à l’investissement au Maroc ?
Le foncier vient en tête des problèmes aussi bien que la bureaucratie, la logistique… La justice commerciale reste encore un frein à l’investissement. Les Marocains soulignent eux-mêmes ces difficultés. Mais il n’y a pas que des problèmes. Les Français et les investisseurs de notre pays sont heureux au Maroc. Les entreprises étrangères sont en grande majorité satisfaites au Maroc. Et quand on est heureux, on est les meilleurs «ambassadeurs économiques du pays».

Les freins à l’investissement seront-ils au menu des discussions de la réunion de haut niveau ?
La séance plénière sera dédiée à la compétitivité et à l’environnement des affaires. Nous allons discuter tant des points positifs que négatifs.

Justement, quel regard portez-vous sur le climat des Affaires au Maroc ?
Des efforts ont été déployés au cours des dernières années par les pouvoirs publics pour améliorer ce climat. On n’a jamais fini d’améliorer le climat des affaires.
Ce n’est pas que le Maroc qui doit améliorer le climat des affaires. Tous les pays du monde sont engagés dans un programme
de réformes pour améliorer l’environnement des affaires, les conditions d’exercice et la compétitivité. Il est sûr que le gouvernement marocain est conscient de l’importance d’améliorer le climat des affaires et la compétitivité des entreprises.

Quels sont les défis que doit relever l’entreprise française ?
Le premier défi est celui de la compétitivité. Les coûts en France ont un peu dérapé : les charges sociales et administratives sont lourdes. C’est le principal enjeu, car on dispose de la technologie, des ressources humaines bien formées, et de réseaux dans le monde. La France est le troisième investisseur international. En ce qui concerne les entreprises marocaines, il faudrait pour ses entreprises avoir un marché proche plus important que celui d’aujourd’hui. Tout le monde attend l’Union du Maghreb arabe. Tous les pays du monde créent des accords bilatéraux et de libre commerce avec leurs voisins plus ou moins éloignés. Il faut que le Maroc ait ce type d’accords en particulier avec ses voisins.

Quel regard portez-vous sur le coût du non-Maghreb ?
C’est un problème dont les chefs d’entreprise au Maghreb ont conscience. Tous les pays du monde passent des accords entre eux pour avoir des marchés plus importants. Au Maghreb, il faut investir dans la formation pour pouvoir créer de nouveaux produits à haute valeur ajoutée. Quand on est dans un monde ouvert, il y a toujours des concurrents très forts. Il faut que les Marocains trouvent le moyen d’être meilleurs que les meilleurs concurrents.

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