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On est en plein mois d’octobre et pourtant la frénésie du shopping est à son comble. Alors que les soldes sont organisées par les commerçants du monde entier pendant les mois de janvier et de juillet, au Maroc les affiches de promotions et de soldes ornent les vitrines des magasins presque durant toute l’année. Il suffit de faire un tour dans les grandes villes du pays pour être frappé par les affiches colorées annonçant les 20%, 30%, 50%, voire 70% de remises sur les articles des magasins.
«Que Dieu bénisse les gérants. Ces soldes réguliers arrangent nos affaires. Nous, les citoyens qui n’avons pas les moyens de nous payer les produits de luxe. Au moins grâce à ces promotions, on peut se permettre de se faire plaisir de temps en temps et donc se remonter le moral», lance Boutaina, toute excitée.
À la base, les soldes ne sont intéressants que s’ils permettent d’acquérir des produits de qualité que l’on n’a pas les moyens de s’offrir en temps normal et dont on a besoin. Or aujourd’hui, ce n’est plus le cas. C’est un vrai phénomène de société. Les consommateurs de tout âge et de toutes les classes sociales, dès qu’il y a une promotion, ils ne comptent plus. Ils peuvent acheter des choses sans en avoir réellement besoin, rien que pour le plaisir de l’acheter. On appelle ça : l’achat de pulsion. Les commerçants ayant compris ce changement d’attitude en profitent pour annoncer régulièrement des promotions sur leurs marchandises.
«On est obligé d’organiser des soldes assez régulièrement pour liquider la marchandise qui nous reste sur les bras et pouvoir exposer la nouvelle collection», explique le gérant d’un magasin. «Malgré les apparences, les Marocains ont également été touchés par la crise. Du coup, la plupart des clients se contentent de contempler les articles au lieu de les acheter. Par contre, pendant les promotions, ils n’hésitent pas à s’offrir plusieurs articles à la fois», poursuit-il.
Même son de cloche chez un autre vendeur. «Il est vrai que les soldes sont organisés normalement, à la fin de l’hiver et la fin de l’été. Mais, ce qu’il y a, c’est que les gens achètent moins souvent qu’avant et négocient le prix pour chaque article. Il faut dire que les temps sont durs pour tout le monde. Résultat, nous nous retrouvons avec une grande quantité de marchandises que nous devons vendre avant de pouvoir mettre en avant la nouvelle collection. Alors, on réduit les prix», explique-t-il.
Pour les franchises, l’histoire est un peu différente. Les responsables des magasins assurent que les réductions affichées ne représentent pas des soldes, mais plutôt des promotions ! «Nous organisons des soldes deux fois par an. En juillet et en janvier. Les réductions proposées actuellement sont des promotions pour lancer la nouvelle collection. C’est une règle établie par la maison mère et nous ne faisons que suivre ses consignes», indique une vendeuse. Avant d’ajouter : «D’ailleurs, il suffit de voir nos prix de plus près pour s’en rendre compte. Pendant les «vraies» soldes, on les baisse beaucoup plus que ça». Mais s’agit-il vraiment de soldes ? Les commerçants réduisent-ils réellement les prix de leurs articles ? Pas si sûr.
«Je ne pense pas que les soldes affichés dans les magasins soient réels. En tout cas pas au pourcentage qu’ils prétendent. Peut être qu’ils réduisent les prix de 10%, mais pas plus», souligne une cliente dans un magasin à Casablanca.
Une affirmation que rétorquent les gérants et vendeurs de différentes boutiques de prêt-à-porter. «Ce que prétendent les gens est faux. Les soldes que nous affichons sont réels. Moi aussi, avant de travailler dans ce domaine, je pensais comme eux. Mais aujourd’hui, je sais que le commerçant peut vendre à perte pour liquider une marchandise», affirme une vendeuse.
3 Questions à : Bouazza Kherrati, président de la Fédération marocaine des Droits du Consommateur (FMDC)
«Le principal perdant est le consommateur»
Que pensez vous des périodes des soldes qui sont devenues très irrégulières ?
Les soldes ne sont pas irréguliers au Maroc, mais ils sont devenus permanents. Et, même quand ils sont annoncés par les médias, les Marocains ne sont jamais saisis par cette fièvre européenne des périodes des soldes qui attirent même beaucoup de Marocains vers l’Europe.
Au Maroc, et c’est très malheureux de constater que la pratique des soldes constitue une vraie période d’arnaque où certains professionnels refilent aux consommateurs incrédules les pièces viciées ou à des prix plus élevés que ceux de la vente normale.
Certes, tout se fait dans l’anarchie, mais on peut se dire que seuls les Marocains arrivent à accepter ces soldes, à «la marocaine».
Les consommateurs peuvent-ils avoir réellement confiance en ces soldes ?
Sincèrement non. Le principal perdant dans l’affaire des soldes au Maroc est le consommateur au vu et au su du ministère de l’Industrie, du commerce et des nouvelles technologies, autorité compétente, censée veiller à l’application de la loi. Or, depuis la promulgation de cette loi et jusqu’à ce jour, aucune association relevant de la FMDC n’a constaté le contrôle des fonctionnaires de ce ministère.
Comment le consommateur peut-il être protégé contre «les arnaques» des soldes et des promotions ?
La solution réelle est le boycottage de cette ineptie commerciale. Car, certaines enseignes peu connues profitent de la période des soldes pour liquider tous leurs fonds de boutique, mettant sur les rayons tous les stocks invendus des saisons précédentes ou achetés comme friperies (balle).
D’autres gonflent les prix quelques jours avant le début des soldes, pour les casser à nouveau, donnant l’illusion de soldes. Toutefois et heureusement, certaines enseignes organisées en groupes pratiquent les soldes dans les vraies règles de l’art, même s’ils restent inaccessibles pour le commun des mortels à savoir le consommateur moyen.
