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L’heure a sonné pour le «business vert»

Un forum sur la production propre aura lieu le 21 mars prochain à Skhirat, en présence d’Al Gore.

L’heure a sonné pour le «business vert»
À l’issue du Green Economy Forum, un livre blanc sera édité.

Un Forum de l’économie «verte» (Green Economy Forum) aura lieu le 21 mars prochain à Skhirat. «L’économie verte a pris le pas sur le développement durable. Ce changement est intervenu, lorsque les pouvoirs publics se sont rendu compte que ce dernier ne peut se réaliser sans le secteur privé», a lancé un des initiateurs de cette rencontre internationale.

Ce rendez-vous du «business vert», organisé par la société Menatec (Middle East North Africa Technologies) en partenariat avec l’Office national d’électricité et de l’eau (ONEE), la Confédération générale des entreprises marocaines (CGEM), l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), DESERTEC, le ministère de l’Énergie, des mines, de l’eau et de l’Environnement et le cabinet Pricewaterhouse Coopers, se déroulera sous la Présidence d’Honneur de Son Altesse Royale La Princesse Lalla Hasnaa et la présence d’un invité de marque : le 45e vice-président des États-Unis et Prix Nobel de la Paix 2007, Al Gore. Ce forum présentera une plate-forme de réflexion et d’échange ainsi qu’une autre consacrée aux opportunités «vertes». Cette dernière réunira patrons marocains avec leurs homologues étrangers. Quelque 500 participants étranges sont attendus, selon les organisateurs.

Ces derniers ont mis en avance les grands chantiers nationaux en matière de développement durable (Plan solaire, Plan éolien, Maroc Vert, Plan halieutique, Charte nationale de l’environnement et du développement durable, etc.) pour expliquer l’opportunité d’organiser ce forum du business «vert» au Maroc. «Al Gore n’aurait pas accepté de venir s’il n’avait pas confiance dans l’engagement du Royaume dans l’économie verte», a ajouté un des organisateurs.

À l’issue du Green Economy Forum, un livre blanc sera édité. Ce document réunira les différentes conclusions et recommandations en matière d’axes de développement.
Si l’État a pris les devants en matière de développement durable, il n’est pas de même pour le secteur privé.
Sur ce registre, quel est le bilan national de la croissance «verte» ? «Le premier constat, c’est que malgré les efforts déployés par les différents ministères et les programmes nationaux (programme national des déchets ménagers, plan d’assainissement liquide, vision touristique 2020, transport urbain propre avec la mise en service des lignes de tramway, etc.), nous ne disposons pas aujourd’hui d’une véritable politique nationale et globale avec des objectifs fixés et des mesures précises qui peuvent nous renseigner par exemple qu’à l’horizon de 2020 nous aurons créé tel nombre d’emplois “verts”, tel investissement et éviter telle quantité de carbone et telles ressources à exploiter.

Ces éléments devraient constituer en principe les bases d’une politique publique orientée vers la croissance “verte” en perspective de l’application de la loi-cadre portant Charte de l’environnement et de développement durable qui constituera sans doute un nouveau référentiel de développement au Maroc», a répondu Hassan Chouaouta, président de l’Association marocaine des experts en gestion des déchets et en environnement. Et d’ajouter : «Il faut noter aussi qu’une politique de croissance “verte” n’a de chance d’être concrétisée que si l’arsenal juridique est bien renforcé dans divers secteurs (énergie, déchets, carrières, protection du littoral, etc.) et que les textes sont appliqués avec un système d’évaluation et de contrôle environnemental qui malheureusement reste le maillon faible de notre politique dans presque tous les domaines.

En l’absence de textes réglementaires, de contrôle environnemental et d’incitations ou de sanctions, les initiatives “vertes” du secteur privé restent, soit volontaires par ce qu’il y a une prise de conscience, soit obligatoires, si la société fait partie d’un groupe international ou liée commercialement à des partenaires, qui exigent un tel engagement. Et en témoigne, le nombre limité notamment d’entreprises certifiées management environnemental ISO 14001 ou responsabilité sociale d’entreprise (RSE)».

Le retard des patrons marocains à s’engager dans la croissance «verte» ne doit nullement les décourager, mais au contraire les inciter à réfléchir. Car aujourd’hui, il y a un «avant» et un «après» Rio+20. Ce sommet de la terre et du développement durable qui s’est déroulé en juin dernier a appelé tous les États à s’engager le plus rapidement dans la croissance «verte». La présence d’Al Gore à Skhirat pourrait aussi favoriser la prise de conscience des décideurs marocains à l’instar de ce qui s’est passé pour les parlementaires français, lors de la projection de son documentaire «Une Vérité qui dérange».

Dans cette course pour la croissance «verte», le Maroc possède des acquis. Depuis des années, il n’a cessé de tester plusieurs expériences en matière de production propre, telles que l’initiative GRECO «Compétitivité verte» qui vise à engager les entreprises méditerranéennes à intégrer l’environnement en tant qu’élément stratégique de rentabilité à moyen et à long terme. Toujours sur ce registre, il est noté également le projet de transfert des meilleures technologies environnementales dans le sud de la Méditerranée (MED TEST).
Il y a aussi le projet «Chemical leasing» (CL), un concept introduit au Maroc en collaboration avec l’Autriche. Selon ce mode de production, le fournisseur d’un produit chimique devient un prestataire de services et vend les fonctions assurées par son produit. Par exemple, une société qui fabriquait un produit de traitement d’eau avant d’adopter le CL, devrait fournir l’eau traitée après sa conversion au CL.
Pour ce qui est des zones industrielles «vertes», «il existe aujourd’hui huit gestionnaires (association et société) qui ont intégré le Collectif des zones industrielles pour l’environnement. Un projet qui s’inscrit dans le cadre du Programme de gestion et de protection de l’environnement (PGPE)», a noté Abdellaziz Mrani, conseiller à la coopération technique allemande (GIZ).

Autre concept de développement durable adopté, l’analyse économi
coenvironnementale (Meso), qui propose une évaluation chiffrée de la dégradation environnementale pour chaque secteur économique ou communauté urbaine.
Le Maroc s’est aussi engagé dans le Mécanisme de production propre (MDP) qui découle du Protocole de Kyoto. Même s’il n’a pas récolté de grands bénéfices via cet instrument anticarbone, le Royaume a accumulé des acquis dans ce domaine.
Si les organisateurs de ce forum ont répété que l’économie «verte» ne se résume pas seulement aux énergies renouvelables, il reste néanmoins que c’est dans ce secteur où le Maroc a réalisé des progrès. «Le Maroc s’est engagé depuis l’an 2000 dans le développement à grande échelle de l’énergie éolienne. Il possède aujourd’hui une puissance éolienne de près de 280 MW.
Huit mois après l’adoption de la nouvelle stratégie énergétique en mars 2009, le Plan solaire marocain a été annoncé. C’était le 2 novembre 2009. Cette date peut être considérée comme une date charnière dans la politique énergétique nationale en marquant le passage des énergies renouvelables du statut de simple option à celui de première priorité.

Le plan solaire marocain prévoit la construction d’une capacité de production d’électricité utilisant l’énergie solaire de 2 000 MW entre 2015 et 2019 avec un coût estimé à 70 milliards DH», a expliqué une source proche de ce dossier. Et d’ajouter : «Trois mois après l’annonce de ce projet, la loi de création de l’Agence marocaine de l’énergie solaire (MASEN) a été adoptée et deux autres lois ont suivi. Il s’agit de celle relative à l’Agence de développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique (ADEREE) ainsi que celle visant les énergies renouvelables». Concernant l’éolienne, GDF Suez et son partenaire, Nareva Holding, ont récemment annoncé la construction du parc éolien de Tarfaya avec une puissance de 300 MW. 


Avis d’expert : Youssef Belkhadir, patron de Menatec

«Les joint-ventures Nord-Sud, clé de voûte de l’économie verte»

Vous dites que le développement de l’économie «verte» se fera via des joint-ventures. Quels sont vos arguments ?
A l’heure actuelle, le bloc des pays du Nord assume la part la plus importante des investissements requis pour le développement de l’économie «verte» et des technologies afférentes.
Le bloc des pays du Sud est lui détenteur d’une base d’actifs naturels (solaire, éolien, hydraulique, biomasse, etc.) qui est nécessaire à la croissance «verte» du bloc des pays du Nord. Il me paraît évident que les joint-ventures (JV) Nord-Sud seront la clé de voûte du développement de l’économie «verte». Le Maroc capitalise déjà sur la mise en place de JV «Nord-Sud» dans le cadre de l’implantation de ses plans solaire et éolien. Dans le futur, nous assisterons à la réalisation de plus en plus de JV «Sud-Sud» qui auront un rôle primordial à jouer dans l’émergence «verte» des pays en développement.

L’économie «verte» devra recourir à des financements innovants. Lesquels ?
La mobilisation des ressources financières pour l’émergence du modèle économique «vert» requiert différents types de montages qui nécessitent des castings d’acteurs financiers ayant une vison à long terme et dont les passifs ne sont pas exigibles à court terme. De ce fait, de nouveaux services financiers doivent émerger pour répondre aux mutations induites par le modèle économique «vert». Je pense que les partenariats publics-privés (PPP) méritent une attention particulière, car ils représentent des outils financiers de choix pour véhiculer des capitaux d’amorçage nécessaires aux projets verts. Néanmoins, les PPP nécessitent un cadre favorable à leur mise en place et sont sensibles notamment aux problématiques de partage des risques.

Dans cette transition écologique, vous dites que des entreprises doivent
démarrer maintenant, d’autres peuvent attendre. Quels sont les secteurs qui doivent se lancer sans attendre ?
Tous les secteurs du tissu économique doivent se mobiliser pour faire de la transition «verte» un succès réel. A mon avis, les secteurs de l’agriculture, de la construction et de la mobilité seront des leviers de croissance incontournables pour promouvoir la transition «verte». Je tiens à préciser que la réussite de la transition «verte» ne sera pas seulement commerciale, mais aussi organisationnelle et sociologique.

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