Un triste souvenir. Il y a dix ans, cinq attentats avaient secoué la métropole casablancaise. Ils ont été perpétrés par 14 islamistes radicaux, tous de nationalité marocaine, originaires du bidonville Thomas. Depuis ce vendredi noir, le Royaume a décidé de mener un combat sans merci contre ce fléau. Aujourd’hui, la lutte contre le terrorisme est ainsi à l’ordre du jour sur toutes les tables de discussion dans la région de l’Afrique du Nord, compte tenu de la crise qui sévit actuellement au Mali et qui a nécessité l’intervention militaire française. Les autorités au Maroc ne baissent donc pas la garde et restent très vigilantes. En atteste le nombre des opérations de démantèlement des cellules terroristes annoncé par le ministère de l’Intérieur. Les attentats du 16 mai ainsi que celui perpétré en 2011 à Marrakech ont poussé l’État à se doter d’instruments légaux pour combattre le terrorisme. Sur le volet juridique, le Royaume a déployé de grands efforts pour lutter contre le terrorisme et le blanchiment d’argent. On peut citer notamment la loi relative à la lutte contre le blanchiment d’argent, ainsi que le financement des activités terroristes, modifiant et complétant le Code pénal et la loi contre le blanchiment.
Conformité aux normes internationales
Adopté lors de la dernière session extraordinaire du Parlement, le texte vise en premier lieu à se conformer aux normes internationales. Notons que l’adoption de ce texte a été faite dans l’urgence du fait que le Maroc était appelé à répondre à ses engagements vis-à-vis du Groupe d’action financière internationale (Gafi). L’objectif de cette nouvelle législation est de mettre à niveau la réglementation relative à la lutte contre le blanchiment d’argent et au financement des activités du terrorisme, et ce, dans la mesure où la définition du financement du terrorisme, prévue par le dispositif juridique national, ne s’accordait pas avec les exigences du Gafi qui recommandait au Maroc d’inclure la criminalisation du financement du terrorisme.
Toujours sous cet angle, il faut souligner que quelques jours après les attentats du 16 mai 2003, le Parlement marocain avait été amené à adopter, dans l’urgence, une loi antiterroriste afin de durcir la législation pour mieux combattre ce fléau par la force de la Loi. Ce texte a d’ailleurs été un des piliers de la stratégie sécuritaire au Maroc. Un autre pilier concerne l’approche sécuritaire en elle-même. Après les événements tragiques en question, la mise à niveau des organes sécuritaires s’est avérée nécessaire avec évidemment un déploiement plus accru des forces de la police. Parallèlement aux volets sécuritaires, les efforts déployés par l’État pour contrer le terrorisme et l’extrémisme religieux ont touché d’autres domaines parmi lesquels figure la réforme du champ religieux dont l’objectif est de «prémunir le Maroc contre les velléités d’extrémisme et de terrorisme et préserver son identité qui porte le sceau de la pondération, la modération et la tolérance», comme l’a souligné S.M. le Roi Mohammed VI dans son discours du 20 avril 2004. Outre la dimension religieuse, la promotion de la situation économique et sociale de la population est aussi à l’ordre du jour.
L’idée est de combattre la pauvreté, souvent qualifiée de terreau fertile à la violence et au terrorisme. En effet, l’État s’est montré conscient de cette donne ainsi que de la nécessité de favoriser une justice sociale et économique pour contrer ce fléau. Ainsi, les bidonvilles ont été sous les projecteurs. D’ailleurs, les programmes et les stratégies du ministère de l’Habitat ont fait de la lutte contre les bidonvilles leur cheval de bataille. Quant à l’inclusion économique et sociale des couches vulnérables, elle se traduit notamment par le grand chantier du Royaume l’INDH qui vise à soutenir la population défavorisée afin qu’elle s’intègre dans la société.
questions à : Jawad Kerdoudi, président de l’Institut marocain des relations internationales
«Il faut accroître le niveau de vigilance»
Quel regard portez-vous sur les attentats tragiques du 16 mai ?
Je déplore toujours ces tragédies. Ces actes n’ont servi à rien, pratiquement à rien. D’ailleurs, cela n’a induit aucune conséquence sur la scène politique. La seule chose positive que je constate est l’attention portée à ces quartiers sombres de Casablanca et la prise de conscience de la situation de la population qui y habite. Je pense qu’à Sidi Moumen il y a beaucoup de projets qui ont été réalisés de même que pour la promotion de l’emploi des jeunes.
A-t-on tiré des leçons utiles ?
Oui. La preuve, c’est qu’en dix ans, et excepté l’attentat perpétré à Marrakech en 2011, nous n’avons été confrontés à aucun acte terroriste d’une telle ampleur. Le Maroc n’a cessé de renforcer sa législation en vue de se protéger. Aujourd’hui, il faut que notre pays se focalise sur le développement de l’éducation. C’est très important.
Avec le dispositif sécuritaire et juridique mis en place, le pays est-il à l’abri des manœuvres terroristes ?
Personne n’est à l’abri de manœuvres terroristes, surtout dans le contexte mondial actuel marqué par les conflits et le terrorisme. À cela s’ajoute, bien évidemment, la crise économique qui pousse les gens vers des actes qui peuvent prendre la voie du terrorisme. Il s’agit d’accroître le niveau de vigilance. Outre les organes sécuritaires, la société civile et les citoyens en général sont appelés à rester attentifs pour protéger notre pays contre ce fléau.
