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La charrette, championne toutes catégories

Les faits À Mohammedia, la charrette sillonne jour et nuit, en toute liberté, les boulevards de la ville, partageant la chaussée avec les véhicules automobiles. Un moyen qui rencontre beaucoup de succès auprès des usagers résidant le plus souvent dans les bidonvilles et les quartiers périphériques de la Ville des fleurs, qui grandit de jour en jour, méritant à juste titre son surnom «la petite Casa».

C'est un paradoxe que se partagent de nombreuses villes au pays, surtout les agglomérations les plus peuplées. Il s'agit du recours à la charrette comme moyen pour se déplacer au lieu des taxis et des bus qui ne sont pas à la portée de toutes les bourses, et ce, malgré l'inconfort de ce mode de transport d'un autre âge. Les charrettes sont partout dans les quartiers populaires et tout le long des grandes artères de la ville de Mohammedia, notamment Al Massira, Al Bradaâ, Chehaouta et Chanti Jedid. Et pour cause, une course à bord d'une charrette coûte trois fois moins cher qu'un taxi, abstraction faite de la distance. Pour le prix modique de 2 dirhams, une personne peut ainsi parcourir la ville de bout en bout.

D'où l'engouement visible des gens pour ce moyen de transport en commun accessible tant financièrement que pou sa disponibilité. Pas besoin, en effet, d'attendre trop longtemps, comme c'est le cas dans les arrêts de bus, pour voir une charrette à l'horizon. Le seul hic, c'est de trouver une place, car le plus souvent les charrettes sont archicombles, transportant jusqu'à dix personnes, pour une capacité réelle de trois places. Le cocher, jouant au cow-boy, trouve toujours le moyen pour caser une personne de plus, avant de démarrer sur les «chapeaux de sabots».

On assiste alors à une véritable course sur l'asphalte, à telle enseigne que les charrettes rivalisent de vitesse avec les voitures. Ce qui provoque une véritable anarchie dans la circulation déjà mal en point à cause de l'étroitesse des chaussées et du comportement incivique des motocyclistes et des piétons. Ne disposant ni de clignotants, ni d'assurance et encore moins de dispositifs de sécurité, aussi élémentaires soient-ils, les charrettes font leur loi.

Un véritable capharnaüm. Surtout en ces temps de vacances où la ville de Mohammedia enregistre une grande affluence des vacanciers. Et quand survient un accident, le cocher n'a qu'à détacher son cheval et prendre la fuite au galop. De mémoire de pompier, on évoque la survenue de plusieurs accidents ou encore des cas d'incendie de charrette transportant des produits hautement inflammables.
Interrogés par la Map, certains usagers inconditionnels de ce mode de transport semblent fatalistes, ne redoutant aucunement l'éventualité d'un accident ou d'une chute, car, pour eux, l'essentiel c'est de pouvoir se déplacer à moindre coût, quand bien même le péril serait grand. Les chauffeurs de taxi se montrent tout autant résignés face à cette déferlante, estimant, malgré leur désarroi, que c'est une manière comme une autre de gagner son pain tout en jetant la responsabilité sur les autorités qui devraient intervenir pour mettre fin à cette anarchie.

Des triporteurs en motos taxis

Pour Hassan, chauffeur de Taxi syndiqué, le problème ne se résume pas seulement à cela, évoquant la concurrence déloyale des conducteurs des triporteurs transformés en motos taxis, alors que la loi leur interdit cette pratique. Mais devant la tolérance des autorités, le nombre des charrettes a explosé et celles-ci font désormais partie du décor de la ville. Ce qui devrait inciter les responsables locaux à prendre le taureau par les cornes pour remédier à la situation. D'abord, en menant des campagnes de sensibilisation auprès des usagers et aussi en proposant des alternatives aux propriétaires des charrettes sans négliger pour autant le volet répressif ou, tout au moins, imposer une interdiction stricte pour que les cochers ne s'aventurent pas dans certains axes de la ville.

D'aucuns pensent, par ailleurs, que ce mode de transport disparaîtra certainement avec l'éradication des bidonvilles. Mais cela risque de prendre du temps, beaucoup de temps au vu de la complexité du problème et de la cadence du programme de lutte contre l'habitat insalubre à Mohammedia.Comble de l'ironie, les passagers de la charrette ne semblent pas pour autant incommodés par ce mode de transport puisque le voyage se déroule dans une ambiance bon enfant. On se marre et on chante de telle manière qu'on a l'impression d'assister au passage d'une «Hdya», ce cortège de mariage très courant dans les quartiers populaires. Enfin, la charrette soulève la question de la mobilité dans une ville qui ne cesse de prendre de l'essor, et dont les chaussées sont endommagées sur quelques axes et certains ronds-points sont particulièrement dangereux à négocier.

S'étendant sur une superficie de 278 kilomètres carrés, la ville de Mohammedia compte 321 375 habitants (recensement 2004), dont 70% de population urbaine. La ville et ses cinq communes (Aïn Harouda, Chellalate, Beni Ykhlef, Sidi Moussa Al Majdoub et Sidi Moussa Ben Ali) disposent d'une flotte de petits taxis, au nombre de 380 ainsi que 560 grands taxis, auxquels s'ajoutent une trentaine de bus et autant de charrettes, si ce n'est plus ! ) 

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