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Ces vilains défauts que l'on doit combattre !

Les faits : Des «je sais tout», des «critique tout», des «laisse tout à la dernière minute», l'indifférence en cas de besoin, la curiosité, la non-ponctualité… tant d’étiquettes collées aux Marocains.

Ces vilains défauts que l'on doit combattre !
Le «tberguig» est présent dans tous les milieux sociaux.

Les Marocains et leurs mauvaises habitudes, on pourrait en parler pendant des heures. En effet, il parait que certains défauts sont typiquement marocains. Et souvent même si l’on reconnait que ce qu’on fait n’est pas bien, on a du mal à s’en débarrasser.

Curiosité excessive ou «tberguig»

Le «tberguig» nous entoure de partout. Si l’on ne devient pas «berguag» (mouchard), on en subit. À la rue, au sein des familles ou encore au bureau des gens se plaisent à épier et guetter nos faits et gestes. Tout le monde s’en plaint, mais peu s’empêchent de le pratiquer. Les voisins épient leurs voisins, les collègues épient leurs collègues, les commerçants connaissent par cœur «la vie» de leurs clients et l'étale à qui le veut, les concierges rapportent aux curieux tout ce qu'ils connaissent des habitants de la résidence... le «tberguig» est également présent dans tous les types d’entreprises, le collègue «berguag» est sans doute le moins digne de confiance. Ragots et rumeurs sont son terrain de chasse préféré. Mauvaise langue, il use de sa sympathie apparente pour récolter un maximum d’informations qu’il rapporte à son gré aux autres collègues comme aux patrons férus des bruits de couloir. D’après les spécialistes, les gens ne trouvent ni de satisfaction ni même leur tranquillité que lorsqu’ils sont informés sur quelqu'un qui est de leur entourage professionnel ou faisant partie de leur voisinage. Car on vit dans une société qui cherche à connaître les détails sur tout un chacun qui en fait partie, et les gens n’aiment pas être dans l’ignorance de ce qui fait le bonheur et le malheur des autres (voisin, collègue...) dans leur environnement.

Les «je sais tout»

Beaucoup de Marocains ont tendance à être des «je sais tout». Dans les cafés, dans les réunions de famille, au boulot… ils adorent se montrer au courant de tout. Ils affirment sans cesse avoir raison et s’empressent de donner leur avis à la moindre occasion. «Lors des sorties entre amis, nous ne pouvons pas nous empêcher de parler chacun plus fort que l’autre et nous lancer dans des débats animés pour épater la galerie», avoue Othmane, 26 ans. D’après les spécialistes, ceci s’explique par le fait que les Marocains ont vraiment le sentiment d'être exceptionnels et qu’ils méritent une attention et une reconnaissance particulières. Ils ont l’impression d’être meilleurs que tout le monde, d’avoir tout vu, tout fait et surtout tout réussi partout où ils sont passés.

Tout laisser à la dernière minute

Un grand nombre de Marocains préfèrent reporter ce qu’ils ont à faire à une date ultérieure bien qu’ils soient conscients qu’un petit empressement ne serait que bénéfique. «Je suis du genre à laisser tout ce que j’ai à faire jusqu’à la 90e minute comme on dit dans le langage sportif. Je me promets de changer cette mauvaise habitude à chaque fois que je tombe dans des situations frustrantes sauf que je n’y arrive jamais», lance Achraf, 30 ans. À la veille de Aïd Al-Adha, tous les commerces, les grandes surfaces… été envahis par les gens qui ont tous laissé «les courses de la fête» jusqu’aux dernières heures qui précèdent Al-Aïd.
Certaines personnes trouvent que laisser tout à la dernière minute peut avoir des avantages. «Faire tout à la 90e minute n’est pas toujours négatif. Personnellement, je trouve que cela me permet souvent de me démarquer par rapport aux autres. Le premier qui arrive n’est pas toujours le mieux servi.
De plus, lorsqu’il s’agit de faire les courses, faire le choix de rester en dernier peut s’avérer un choix intelligent. Par exemple, pendant Aïd Al-Adha, celui qui achète le mouton pendant les derniers jours paye souvent moins cher», affirme Hamid.

Les hypercritiqueurs

Au Maroc, presque tout le monde a le sens de la critique dans le sang. Que ce soit dans une fête de mariage, à l’achat d’un nouvel appartement, au boulot ou même à la maison, critiques et jugements fusent de partout. On dirait que la critique est notre spécialité. «C’est un Marocain, qu’est-ce que tu crois ?» «Jamais le Maroc ne pourra évoluer à cause de “k7el rass”»… Ce sont des phrases dites par des Marocains, qui se critiquent eux-mêmes. Ceci peut paraître aberrant, mais il s’agit bel et bien de la réalité de notre société. Une réalité qui nous rappelle une hypocrisie présente dans une société à tendances paradoxales, voire même schizophrènes.

La non-ponctualité

C’est connu ! Les Marocains et la ponctualité font deux. Ils ont souvent du mal à arriver à l’heure. En effet, le rendez-vous marocain a une mauvaise réputation. Il est connu pour être un des pires rendez-vous qui existe. «Je suis Marocain et j’avoue avoir des défauts comme tout le monde, mais il y a une mauvaise habitude qui touche la majorité écrasante des Marocains et qui m’énerve beaucoup : c’est la non-ponctualité.
Arriver à l’heure au Maroc relève presque du domaine de l’impossible. Si l’on a décidé d’arriver un jour X à une heure X à l’endroit X, on se doit d’y être à l’heure fixée et non pas 30 min (en moyenne) après ! Il ne manquerait plus qu’on arrive une journée, voire une semaine après !
Si l’on sent et que l’on sait qu’on est incapable de respecter un rendez-vous, pourquoi en fixe-t-on ?» fustige Hanâa. 


Avis du spécialiste

Mohssine Benzakour, psychologue

«Le comportement agressif»

J'aimerais tout d'abord désigner toutes ces «mauvaises habitudes» par une seule appellation : «Le comportement agressif», et ce pour les raisons suivantes : Sur le plan scientifique, l'agression fait référence à tout comportement physique ou verbal dirigé vers une personne avec l'intention de nuire. Or l'agression renvoie à un comportement et non à une émotion. Le comportement agressif est toujours orienté vers une personne et l'agression se définit toujours par l'intention de nuire. Pour la psychologie sociale, l’agression présupposerait toujours la présence de frustration, et la frustration provoquerait toujours l'agression. La frustration est un état psychologique qui résulte de l'impossibilité d'atteindre ses objectifs. L'intensité de l'agression serait ainsi proportionnelle à la frustration. L'expression de l'agression aurait un effet cathartique, libérateur. La cible privilégiée de l'agression est la source de la frustration. Cependant, en l'absence de cette source, le comportement agressif sera déplacé vers d'autres cibles, les boucs émissaires. Connaissant la nature des rapports entre les différentes hiérarchies au Maroc (parentales, professionnelles, politiques, administratives...), la frustration est monnaie courante. Mais bien que celle-ci puisse favoriser des comportements agressifs, elle ne leur donne pas toujours lieu. La frustration incite à l'agression uniquement lorsqu'elle suscite une émotion de colère. La relation entre frustration et agression n'est pas linéaire puisqu'un taux important de frustration peut provoquer la résignation plutôt que la colère. La résignation ne provoque pas de comportement agressif.

La frustration, même lorsqu'elle suscite de la colère, augmente la tendance à être agressif, mais ne déclenche pas forcément ce comportement. Ceci explique pourquoi la majorité des Marocains frustrés adoptent ce que vous avez appelé de «mauvaises habitudes».

La question est : pourquoi ne recourent-ils pas à l'agression ? Les facteurs déclencheurs du comportement d'agression seraient liés à des facteurs environnementaux appelés indices externes facilitateurs. Ces indices peuvent être liés aux personnes présentes (cibles possibles de l'agression), à la situation dans laquelle le sujet se trouve, aux objets présents. Ce qui veut dire que les Marocains essaient de chercher leur équilibre à travers les mécanismes de défense. L'organisme humain est plein de ressources pour s'ajuster aux diverses situations auxquelles il est confronté. Il trouve toujours la capacité de s'adapter pour rétablir l'équilibre dans les situations générant de l'anxiété. Lorsque la pression de l'anxiété devient trop forte et ne peut être soulagée par des méthodes réalistes, la personne a recourt à des méthodes irréalistes : ce sont les mécanismes de défense. Techniquement parlant, tous les mécanismes de défense sont des réactions névrotiques.

Ce sont des processus de pensées inconscients qui réorientent une émotion. L'émotion liée à un événement ou à une idée est dissociée de sa source puis laissée libre (comme dans l'angoisse) ou rattachée à un autre objet (comme lorsqu'on fait passer sa colère sur un membre de la famille après avoir subi une humiliation dans son travail). Ainsi, ces «mauvais comportements» sont en réalité de la «colère», de la «compensation», de la «dénégation», de la «dévalorisation de soi», de l'«exagération»... Pour nous en sortir, nous avons besoin d'affronter nos angoisses, de nous affirmer, de dire clairement et objectivement nos pensées afin de pouvoir échanger dans le respect de l'autre et dans la paix. Enfin, précisons que ce n'est pas une spécificité marocaine, mais une forme de réaction à une réalité de frustration et de non-équilibre.



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