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Des milliards de dollars échappent au Maroc

Tous les spécialistes le confirment : le Maroc doit absolument accélérer le processus d’introduction de la finance islamique. Des banques et fonds spécialisés sont prêts à investir dans des pays arabes à fort potentiel d’investissement.

Des milliards de dollars échappent au Maroc
Selon les participants à la conférence, dans un contexte où l’assèchement des liquidités se fait de plus en plus sentir sur les marchés monétaires, plusieurs banques commerciales commencent à faire appel aux instruments de financement islamique.

Le Maroc doit faire vite. Des opportunités d’investissement estimées en milliards de dollars lui échappent tant qu'il ne dispose pas de l’environnement réglementaire et juridique pour l’introduction de la finance islamique. Le constat est de Mohamed El Baltaji, président du directoire de l’Association égyptienne de la finance islamique. Le spécialiste, qui intervenait lors de la conférence internationale sur la finance islamique organisée à Marrakech (12-13 décembre), affirme que le marché de l’investissement dans certains pays du Golfe, dont les Émirats arabes unis et le Koweït, est saturé.

Du coup, les banques et fonds spécialisés dans la finance islamique sont prêts à faire fructifier leurs investissements évalués à des milliards de dollars dans des pays arabes à fort potentiel d’investissement. Pour lui, le Maroc ne doit aucunement rater ce filon. El Baltaji assure qu’à l’instar des pays où la finance islamique connaît son âge d’or, le Maroc doit baser sa stratégie sur trois fondamentaux pour développer ce marché. D’abord, mettre une place, un cadre juridique efficace.
Ensuite, concevoir des produits financiers adaptés à son environnement socio-économique. Enfin, disposer de ressources humaines qualifiées. «Cette dernière composante est très importante, car, si vous regardez les expériences réussies notamment aux Émirats arabes unis, vous allez constater que ce pays accorde une grande importance aux ressources humaines», développe-t-il. À côté de cela, il va falloir, poursuit-il, mettre en place un comité Sharia qui veillera à la conformité des produits financiers offerts par les banques islamiques avec les principes de la Sharia. Question de rassurer la clientèle sur la crédibilité des offres mises sur le marché. Résultat : «tous les secteurs de l’économie pourraient profiter de la finance islamique au Maroc. Ce qui doperait en conséquence la croissance du pays», estime le spécialiste.
Pour Abdelilah Nghaizi, consultant associé du cabinet Islamic finance consulting, depuis l’apparition de la finance islamique, les banques du Golfe n’ont pas désespéré de solliciter la Banque centrale marocaine pour une implantation dans le Royaume. Seulement, elles ont été refroidies, estime le consultant. Comment expliquer cette réticence ? À en croire Nghaizi, à chaque fois que cette question est posée, la réponse des officiels Marocains est de dire que le problème réside dans la non-conformité des opérations de la finance islamique avec la loi bancaire nationale, en l’occurrence les opérations de financement participatif et leur corollaire, le principe du partage des pertes et des profits. «Autrement dit, les opérations de la finance islamique se trouvent hors champ d’application de la loi bancaire marocaine», explique-t-il. Nghaizi affirme par ailleurs que Bank Al-Maghrib ne pourra pas continuer, indéfiniment, dans ce qu’elle qualifie de politique d’accommodement. Son analyse : «un jour, ses capacités de refinancement seront épuisées. Et irrémédiablement, il faudra une soupape de financement».

Le Maroc, futur hub francophone de la finance islamique

Aujourd’hui, le projet de refonte de la loi bancaire est presque bouclé. Son entrée en vigueur est annoncée pour 2014. «Le texte en projet attise l’appétit des investisseurs du Golfe. Il apporte plusieurs nouveautés notamment la possibilité laissée aux banques et sociétés de financement conventionnelles d’exercer en totalité ou en partie l’activité de banques participatives, sous réserve, toutefois, de l’obtention d’un agrément spécifique. Il introduit également l’institution des dépôts d’investissement que les banques participatives sont habilitées à recevoir et dont la rémunération est convenue à l’avance avec la clientèle. Sans oublier l’intégration de la Mudaraba à la liste des produits de financement commercialisables comprenant déjà l’Ijara, la Murabaha et la Musharaka, tout en laissant la voie ouverte à de nouveaux produits», détaille notre consultant. Pour lui, s’il est entériné par le Parlement, ce projet de loi devrait constituer un tournant décisif dans l’institutionnalisation, en bonne et due forme, de la finance islamique au Maroc et baliser le terrain à l’entrée de nouveaux acteurs sur le marché financier national. «Ce qui devrait amplement contribuer à la concrétisation de l’ambition des pouvoirs publics de faire du Maroc le premier hub financier et économique dans la région de l’Afrique du Nord et de l’Ouest», affirme-t-il.

Hub francophone de la finance islamique, voilà un concept qui fait craquer les pays européens notamment la France. «Les opérateurs financiers de l’Hexagone s’intéressent beaucoup à la possibilité de disposer d'un hub francophone de la finance islamique qui leur est proche géographiquement. D’autant plus que ce marché offre des opportunités en or aux investisseurs européens dans un contexte marqué par un assèchement des liquidités», confirme Alain Pithon, secrétaire général d’Europlace Paris. Pour lui, si le Royaume veut réussir haut la main le développement de la finance islamique, il doit absolument concevoir un modèle adapté à son environnement économique, juridique et social. «De toute façon, je ne doute pas de l’efficacité du modèle qui sera adopté par le Maroc. Je suis certain qu’il sera efficient et efficace. D'ailleurs, la loi sur la titrisation adoptée dernièrement par le pays est citée en exemple dans plusieurs pays de l’UE, dont la France», souligne le SG d’Europlace. 


Les émissions de sukuk pèsent 131 milliards de dollars dans le monde

Selon le cabinet iCompétences, organisateur de l'événement, dans un contexte où l’assèchement des liquidités se fait de plus en plus sentir sur les marchés monétaires, plusieurs banques commerciales commencent à faire appel aux instruments de financement islamique pour lever des capitaux ou encore financer leurs projets. Un constat que confirme d’ailleurs Alain Pithon. «Plusieurs banques européennes s’intéressent aux émissions des sukuk notamment dans les pays du Golfe pour pouvoir résoudre les problèmes d’assèchement des liquidités. Ce sont des milliards de dollars à ne pas rater», avance-t-il. Et c’est d’autant plus vrai quand on sait par exemple que les émissions des sukuk pèsent plus de 131 milliards de dollars en 2012, selon iCompétences. «Grâce à leurs caractéristiques spécifiques, transparence des contrats, tangibilité des actifs et disponibilité des liquidités, la finance islamique a réussi à mieux faire face à la crise financière internationale», assure un consultant d'iCompétences. Un propos que corrobore El Baltaji en avançant que pas moins de 1 000 institutions bancaires ont laissé des plumes pendant cette crise, alors qu’aucune des 800 banques islamiques opérant dans plus de 60 pays n’en a subi les effets.
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