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Politiques publiques : l'instance nationale d’évaluation enterrée ?

Les Faits : L’Association marocaine d’évaluation mène actuellement une étude de benchmarking pour fournir au gouvernement une base d’expériences réussies dans l'évaluation des politiques publiques.

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L’Association marocaine d’évaluation (AME) appelle le gouvernement à accélérer la réforme des dispositifs d’évaluation des politiques publiques. Selon Ahmed Bencheikh, président de l’ONG, malgré l’adoption du principe constitutionnel de l’évaluation des politiques publiques (article 70 de la Constitution), sa traduction sur le terrain connaît encore de nombreuses limites. Exemples, l’absence de dispositifs institutionnels d’évaluation au sein de la Primature et du Parlement chargés d’apprécier objectivement les stratégies sectorielles de développement en cours ou émergentes (Plan Maroc vert, Halieutis, Émergence industrielle...), les difficultés d’accéder aux données et informations pour réaliser des évaluations indépendantes et fiables et la méconnaissance des exigences de la démarche évaluative, ses normes et standards, particulièrement l’indépendance et la crédibilité.

Rôle de plaidoyer

Bencheikh, qui s’exprimait lors d’une rencontre le 23 octobre à Rabat, formule plusieurs recommandations au gouvernement. Pour lui, il faut combler rapidement le déficit juridique en termes de pratique d’évaluation des politiques publiques par l’institution parlementaire. «La Constitution a certes institutionnalisé cette mission pour le pouvoir législatif. Sauf qu’il va falloir définir les contours juridiques et organisationnels de cette mission en promulguant un texte de loi clair et subtil», insiste le président de l'ONG.

L’Association, qui affirme jouer un rôle de plaidoyer pour promouvoir auprès des autorités la culture et la pratique de l’évaluation des politiques publiques selon les standards internationaux, mène actuellement une étude internationale à laquelle prend part l’Inspection générale des finances. Objectif, dresser un benchmark sur la pratique de l’évaluation dans plusieurs pays pour mettre à la disposition du gouvernement les expériences réussies. «L’étude devrait permettre à l’État marocain de s’inspirer des expériences en la matière et concevoir à la lumière de ce benchmark le dispositif institutionnel adéquat pour évaluer les politiques publiques. La Tunisie, par exemple, a créé en mars dernier l’Instance nationale d’évaluation des politiques publiques. Une institution autonome qui devrait noter de manière indépendante l’efficacité des politiques sectorielles menées par le gouvernement», explique Bencheikh. À l’en croire, Najib Boulif, actuellement ministre délégué auprès du ministre de l’Équipement chargé du Transport, lui avait confié en 2012, alors qu'il était encore aux Affaires générales, que le gouvernement faisait mûrir le même projet. C’est-à-dire mettre en place une Instance nationale d’évaluation. Le projet aurait été mis en stand-by avec le départ de Najib Boulif du ministère, nous confie-t-il.

Que devient le projet ? Nous avons tenté de contacter le successeur de Boulif, Mohamed El Oufa, mais en vain. L’ONG compte organiser à partir de fin novembre prochain huit forums régionaux consacrés au débat sur la pratique de l’évaluation sur le plan régional. «Notre objectif est de sensibiliser les élus locaux, les ONG et les autorités locales à l’importance du concept, surtout que le Maroc a décidé de procéder à une régionalisation avancée. Nous comptons sur notre pouvoir d’influence qui a fait ses preuves lors de l’instruction de la Constitution en 2011», fait valoir Bencheikh. En effet, l’Association avait remis à la Commission consultative chargée de la révision de la Constitution un mémorandum pour la constitutionnalisation de l’évaluation des politiques publiques. «Parce que l’action publique concerne directement la vie des gens, son évaluation doit être érigée en bien commun. Reconnaître l’évaluation comme bien commun aura pour avantages un meilleur pilotage de l’action publique et une bonne allocation des ressources budgétaires, particulièrement en période de crise. Mais le plus important des avantages que l’on peut tirer de l’institutionnalisation de l’évaluation est la légitimation même des politiques publiques, puisque les gouvernants seront politiquement responsables et redevables de leurs actions. L’évaluation contribuera mieux à la satisfaction de la demande sociale», avait recommandé l’Association dans son mémorandum. Notons que l’ONG marocaine vient de recevoir une distinction internationale pour son action délivrée par EvalPartners.

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