Aujourd’hui, c’est une réalité. L’accouchement par césarienne ne cesse de gagner du terrain partout dans le monde. Au Maroc, les chiffres ne sont pas un indicateur. En raison du manque d’infrastructures dans certaines régions, les hôpitaux enregistrent un très faible taux de césarienne. En revanche, dans les grandes villes, et en particulier dans les cliniques privées, le taux de césarienne est nettement plus élevé. Elle est même devenue très tendance. «Je suis enceinte de trois mois. C’est ma première grossesse. C’est pourquoi je commence déjà à m’inquiéter pour l’accouchement même si c’est encore loin. Avant, je me disais que l’accouchement par voie basse était l’idéal. Mais avec tout ce que j’entends autour de moi, je commence à changer d’avis. Je crois que je vais opter pour une césarienne. De plus, toutes celles que je connais l’ont fait, pourquoi pas moi ?» confie Ghita, 27 ans.
Nombreuses sont les femmes qui optent pour la césarienne. D’après l’étude de la CNOPS sur les accouchements durant la période 2007-2011, les accouchements par césarienne sont passés de 36% en 2007 (8 476 actes) à 50% en 2011 (12 691) du nombre total des accouchements effectués. En revanche, l’accouchement par voie basse a régressé en passant de 64% (15 400 actes) à 50% (12 944 actes). Selon la même étude, cette tendance haussière des césariennes est également perceptible en termes des dépenses. En 2007, elles ont représenté 62% des dépenses totales d’accouchement contre 75% en 2011. Les dépenses d’accouchement par voie basse ont chuté de 38 à 25%.
Beaucoup de facteurs ont fait de la césarienne la «solution parfaite» pour un accouchement de nos jours. Du côté des cliniques, une naissance par césarienne rapporte plus d’argent qu’un accouchement normal. Cela va de soi, anesthésie, chirurgie, chambre, prestations d’hôtellerie… c’est une opération qui est rentable tout comme les autres. D’après les témoignages, certaines cliniques ont recours à la césarienne, même contre la volonté de la patiente. Et ce ne sont pas les arguments qui manquent pour le médecin. «On a imposé une césarienne à ma femme à la dernière minute alors que tout allait bien durant les neuf mois de grossesse (aucun problème, aucune fausse alerte, bassin suffisamment large…). Le jour de son accouchement, nous nous sommes rendus à la clinique pour un simple contrôle. Et là, on a décidé de la retenir pour qu’elle mette bébé au monde immédiatement.
Durant son séjour à la clinique, on nous a donné trois excuses différentes : la position à terme du bébé est trop haut, bassin trop étroit, absence d’ouverture du col de l’utérus. Mais en réalité, c’est de l’arnaque», raconte Mourad d’un air furieux. «Ma femme a souffert terriblement à cause de cette opération. Elle a également mal vécu cette expérience parce qu’elle était contente et convaincue, pendant toute la période de ma grossesse, qu’elle allait accoucher normalement», poursuit-il.
Même si, en général, ce sont les cliniques ou les médecins qui poussent les patientes à accoucher par césarienne, parfois ce sont les femmes qui demandent à mettre au monde leur bébé de cette façon. Cette pratique est devenue populaire parce que tout simplement c’est un mode d’accouchement qui suit le rythme accéléré imposé par l’évolution et le progrès de notre système de vie.
«Notre vie actuellement est sous l’emblème de “la maîtrise et du contrôle”. Pourquoi perdre des heures à attendre la délivrance s’il existe un moyen de l’avoir en une vingtaine ou une trentaine de minutes ? Pourquoi rester à la merci des contractions qui peuvent survenir à tout moment s’il y a moyen d’éviter cela ? Une femme enceinte peut actuellement programmer, en coordination avec son obstétricien, le jour et même l’heure de son accouchement. C’est ce que j’ai fait d’ailleurs pour l’accouchement de mes deux enfants», affirme Houria, 32 ans. «Avec mon mari, nous avons discuté et décidé confortablement du moment de la naissance de nos enfants. Et ça c’est bien passé», ajoute-t-elle.
Aujourd’hui avec la césarienne, l’accouchement et la naissance d’un enfant peuvent faire objet d’un programme, tout comme les tâches quotidiennes du couple. En outre, certaines femmes choisissent l’accouchement par césarienne pour des raisons financières. Grâce au remboursement de l’assurance, ce mode d’accouchement coûte moins cher que l’accouchement par voie basse. «Dans le cas d’un accouchement normal, nous offrons à la maman une somme de 1 000 dirhams comme cadeau de félicitations sur toute la période de la grossesse.
Alors que dans le cas d’une césarienne, nous remboursons les frais de l’opération à hauteur de 80% comme nous le faisons pour toutes les autres interventions chirurgicales», selon une société d’assurances. Quoi qu’il en soit, un accouchement garde toujours son côté affectueux et émotionnel et présente un instant de bonheur et de délivrance.
