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L’invalidité des malades réduite de moitié en vingt ans

Une étude hollandaise, publiée dans la revue du Collège américain de rhumatologie (ACR), redonne espoir aux malades atteints de polyarthrite rhumatoïde. En effet, selon les chercheurs, l’invalidité des patients aurait été réduite de moitié en vingt ans, en particulier grâce à des diagnostics de plus en plus précoces et à des thérapeutiques plus performantes, leur offrant une meilleure qualité de vie.

L’invalidité des malades réduite  de moitié en vingt ans
La polyarthrite rhumatoïde peut devenir très invalidante et douloureuse.

«La polyarthrite rhumatoïde (PR) est une maladie auto-immune où le système immunitaire s’attaque principalement aux articulations, se manifestant par des gonflements douloureux au niveau des mains, poignets et genoux et sous des formes plus ou moins graves et invalidantes», rappelle Khadija Moussayer, présidente de l’AMMAIS (Association marocaine des maladies auto-immunes et Systémiques).
Son évolution est imprévisible. Elle se fait sur des décennies, avec des périodes de rémission. En règle générale, la maladie tend à s’aggraver, à atteindre et endommager de plus en plus d’articulations. Au quotidien, elle empêche les personnes qui en sont atteintes d’accomplir des gestes simples de la vie de tous les jours comme «se brosser les dents, se coiffer, faire sa toilette, ouvrir une bouteille d’eau, éplucher un légume, verser du thé... Elle est aussi responsable d’arrêt de l’activité professionnelle dès les trois premières années de la maladie (45% des malades)», poursuit Fadoua Allali, rhumatologue-podologue. À un stade avancé, la maladie peut atteindre d’autres organes tels que les poumons, les yeux et le cœur. Si elle n’est pas correctement traitée, la polyarthrite rhumatoïde peut devenir très invalidante et douloureuse. «Ce rhumatisme peut aboutir à un handicap important et à une diminution de l’espérance de vie de dix ans», nous expliquait la même source, il y a quelques mois.

Mais une étude hollandaise vient revoir à la hausse ce dernier chiffre, au plus grand bonheur des médecins et de leurs patients. En effet, une étude dirigée par Dr Cécile Overman, de l’Université d’Utrecht, aux Pays-Bas, a mesuré l’évolution de ses conséquences sur une population de 1 151 patients entre 1990 et 2011 : des personnes âgées de 17 à 86 ans ont été évaluées au moment du diagnostic et durant trois à cinq ans. Il en ressort que le pourcentage des personnes atteintes d’anxiété, de dépression et de handicap physique est passé respectivement de 23%, 25% et 53%, il y a vingt ans, à 12%, 14% et 31% maintenant. Les souffrances de tous ordres des malades ont donc été réduites de moitié ces vingt dernières années.
Ont contribué à ce phénomène, selon les chercheurs, un diagnostic plus précoce, des traitements plus agressifs employés dès le stade initial de la maladie avec notamment le développement des médicaments immunosuppresseurs et de nouveaux produits biologiques – les biothérapies – ainsi qu’un meilleur encadrement des malades faisant appel aux psychothérapies et à l’incitation à un bon équilibre diététique et à la pratique d’activités physiques.

Le Dr Overman va jusqu’à estimer que les personnes atteintes auront dans vingt ans «une qualité de vie similaire à n’importe quel individu en bonne santé, si les avancées continuent à évoluer de la même façon».
Au Maroc, les patients bénéficient aussi de l’amélioration de cette prise en charge même si ces bons résultats ne sont pas au même niveau qu’en Europe. Le seul souci, et il est de taille, réside en effet dans l’accès pour tous à ces thérapies, auxquelles bon nombre doit encore renoncer, en partie ou en totalité, faute de moyens financiers.

En effet, «entre 180 000 à 300 000 marocains sont touchés par la PR ; moins de 20% d’entre eux bénéficient d’une prise en charge adéquate», précise le Dr Moussayer. Les traitements, excessivement onéreux, peuvent être évités grâce au dépistage précoce qui permet de stopper l’évolution de la maladie à moindres coûts et de récupérer rapidement une bonne qualité de vie. À titre d’information, la thérapie en début de maladie coûte 1 500 dirhams par patient et par an sous Méthotrexate (un traitement de fond remboursé par la CNSS) alors qu’à son stade critique le traitement est bien plus onéreux : «comptez entre 60 000 et 250 000 dirhams par an et par patient, non pris en charge par les différents organismes de santé». Ce traitement représente une lourde charge pour les individus, leur famille ainsi que la société, d’où l’intérêt de sensibiliser le public au diagnostic précoce. «Au Maroc, nous avons encore des difficultés pour la prise en charge de certains de ces traitements», conclut la spécialiste. 


Explications 

Pr Fadoua Allali,Rhumatologue-podologue

«La maladie est plus fréquente chez les femmes»

Qu’est-ce que la polyarthrite rhumatoïde (PR) ? Quels en sont les symptômes et les complications ?
La polyarthrite rhumatoïde est un rhumatisme caractérisé par une inflammation des articulations qui deviennent douloureuses, gonflées et déformées. Non traité, ce rhumatisme peut aboutir à un handicap important et à une diminution de l’espérance de vie de dix ans.

Qu'est-ce qui cause cette maladie ?
Il s’agit d’un désordre immunitaire, de cause inconnue. L’organisme fabrique des anticorps qui attaquent les articulations et les détruisent. Il y aurait des facteurs génétiques qui interviennent dans la maladie.

Quelles sont les personnes touchées par cette maladie ?
Tout le monde peut être touché. La maladie est plus fréquente chez les femmes (4 femmes/1 homme). Elle survient entre 35 et 50 ans en général. Les études que nous avons réalisées à l’hôpital El Ayachi de Salé (hôpital spécialisé dans ce type de rhumatisme) montrent que les femmes au Maroc en sont touchées à un âge plus précoce (10 ans avant, c'est-à-dire entre 25 et 50 ans).

Quelles répercussions sur la vie du patient au quotidien ?
Sur une centaine de patients, la polyarthrite rhumatoïde représente un énorme poids social. Elle est responsable d’un handicap important pour les activités journalières les plus banales (se brosser les dents, se coiffer, faire sa toilette, ouvrir une bouteille d’eau, éplucher un légume…). Elle est aussi responsable d’arrêt de l’activité professionnelle dès les trois premières années de la maladie (45% des malades). Elle est également responsable d’une augmentation du taux des divorces (30%) ainsi que du taux d’abandons scolaires, notamment chez les petites filles souvent déscolarisées pour s’occuper de leurs mères malades (19%).

Quels sont les chiffres et statistiques relatifs à cette maladie au Maroc ?
La prévalence de la maladie est de 1-2% soit entre 300 000 et 600 000 cas au Maroc. C’est un chiffre très important vu le handicap que peut engendrer la maladie.

Y a-t-il des traitements ?
Heureusement oui. Il y a de nombreux traitements de la PR qui empêchent la progression de la maladie. On en distingue 2 catégories. Premièrement les traitements classiques, dont le chef de file reste le Méthotrexate, et les biothérapies qui sont de nouveaux traitements ayant révolutionné la prise en charge de cette pathologie.
Ils permettent non seulement l’arrêt des symptômes cliniques, mais préviennent aussi la destruction articulaire.
Le problème de ces traitements est leur coût : entre 60 000 et 250 000 dirhams/an. Ces traitements doivent être pris en charge par la sécurité sociale.
En France, le budget des biothérapies dépasse les 1 milliard d’euros par an. Au Maroc, nous avons encore des difficultés pour la prise en charge de certains de ces traitements.



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