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Il n’y aura pas foule «Derrière les portes fermées» de Mohammed Ahed Bensouda

Ce mercredi 15 janvier, «Derrière les portes fermées», le dernier long métrage de Mohammed Ahed Bensouda fera son entrée dans les salles marocaines. Bien qu’il s’attaque à un sujet poignant, celui du harcèlement sexuel, le film n’émeut pas aux larmes et ne fait pas l’unanimité. Un pitch simpliste qui n’exploite pas le potentiel d’un thème aussi fort que le harcèlement et une interprétation superficielle et peu convaincante.

Il n’y aura pas foule «Derrière les portes  fermées» de Mohammed Ahed Bensouda
Samira (Zineb Obeid) face au nouveau directeur général Mourad Kaddouri (Karim Doukkali).

Avec un thème aussi profond que celui du harcèlement sexuel, l’affiche promettait une heure et demie d’émotion et de réflexion sur ce sujet brûlant et au cœur de l’actualité… mais en vain. C’est l’histoire de Samira (Zineb Obeid), une Casablancaise très sexy qui voit son train-train quotidien bouleversé par l’arrivée d’un nouveau directeur à la tête de l’entreprise qui l’emploie. Un certain Mourad Kaddouri (Karim Doukkali), pistonné par un haut fonctionnaire et pervers à souhait.

Dès la première apparition à l’écran, le sourire de prédateur et les yeux affamés de Mourad Kaddouri tuent le suspens d’un coup, d’un seul. Si le film ne nous émeut pas, il nous donne curieusement envie d’enfiler des gants de boxe pour un match en trois rounds face à cet obsédé sexuel. Tout le monde a démasqué le personnage, tout le monde sauf Samira. Soit son mètre vingt de jambes l’empêche de voir les choses sous le même angle que nous, soit elle est étonnamment naïve ? Enfin, lorsqu’elle finit par soupçonner le directeur d’infâmes intentions, elle est rassurée par sa collègue et soi-disant amie. Ce ne sera donc pas pour cette fois.

Après des heures d’observation à travers les stores de son bureau, Mourad Kaddouri convoque la jolie Samira dans son bureau et la couvre de compliments, une première fois, puis une deuxième, jusqu’à ce qu’il lui avoue son envie imminente d’avoir une relation sexuelle avec elle. «Rien qu’une seule fois et je te laisse tranquille», oh un pervers raisonnable, voyez-vous cela… La belle refuse et signe ainsi son autodestruction dans l’entreprise. Agacée par le calvaire que lui fait vivre son supérieur, Samira se confit à son mari Mouhcine (Ahmed Saguia) qui n’a définitivement pas le tempérament d’un marocain, mais plutôt d’un moine tibétain. Exit l’envie de découper cet homme en rondelles pour donner la viande au vendeur de chawarma du coin, Mouhcine serre les dents et tente avec sa femme de faire tomber légalement ce pervers sexuel. Ils se rendent ensemble dans une association de défense des droits des femmes pour découvrir que finalement, ils n’ont aucun moyen judiciaire de stopper cet homme. Sur le point de perdre son travail, Samira met en place un plan machiavélique. Elle accepte les avances de son supérieur et part avec lui dans sa villa estivale. Une fois sur place, elle prétexte une brève escapade aux toilettes pour faire entrer la femme de Mourad Kaddouri qui découvre le vrai visage de son époux. Victoire pour Samira qui rejoint son mari dans la voiture et célèbre plus tard son triomphe avec les membres de l’association qui n’ont rien fait pour elle…

Morale de l’histoire : avec un mari compréhensif et une paire de talons hauts, vous pouvez venir à bout d’un pervers dégoûtant ! Si Mohammed Ahed Bensouda souhaitait dédramatiser le quotidien de nombreuses femmes à travers le monde, le challenge est réussi. Trop de pudeur, des répliques vides et des rôles surjoués, «Derrière les portes fermées» minimise les dommages psychologiques générés par le harcèlement sexuel. Samira se sait être l’objet du désir de son directeur, mais craint davantage pour son travail que pour sa vie. Pis encore, face à lui, elle reste de marbre et ne donne pas l’impression d’être effrayée une seule seconde, où est le réalisme ? Mohammed Ahed Bensouda s’est montré tellement pudique que son film manque cruellement de crédibilité et de profondeur. Il s’empare d’un sujet poignant pour en faire un film familial diffusable sur la plage horaire du dimanche après-midi. Mieux vaut ne pas aborder le harcèlement sexuel que d’en parler si légèrement, mauvais choix pour Bensouda qui n’avait visiblement pas l’intention de nous toucher aux tripes… 

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