Menu
Search
Jeudi 18 Avril 2024
S'abonner
close
Jeudi 18 Avril 2024
Menu
Search
Accueil next Cinéma

L’AGEF relance le débat sur le leadership féminin

La question de l’égalité entre l’homme et la femme s’invite de plus en plus dans les débats, s’imposant presque, vu l’importance qu’elle revêt en tant que vecteur essentiel du développement de notre société. Nul ne peut nier les avancées réalisées en la matière, mais, de l’avis des spécialistes, beaucoup reste à faire pour réduire les disparités qui persistent.

L’AGEF relance le débat sur le leadership féminin
L’approche genre et la diversité dans l’entreprise font débat au sein de la l’AGEF.

En entreprise, le leadership féminin peine à se frayer un chemin à travers des obstacles presque infranchissables, dressés sciemment pour freiner son ascension vers des postes de responsabilité. De ce fait, les femmes désirant accéder au top management se trouvent obligées de fournir beaucoup plus d’efforts que leurs homologues masculins pour prouver leur mérite et parvenir enfin à briser le fameux plafond de verre. Et c’est justement le thème sur lequel s’est penchée l’Association nationale des gestionnaires et formateurs des ressources humaines (AGEF), lors d’un dîner-débat organisé mercredi dernier à Casablanca, en partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer (KAS), et dont le mot d’ouverture a été donné par Abdelkerim Guergachi, président de l’AGEF.

Par la suite, le Dr Ellinor Zeino, chargée de projets à la KAS, a précisé que la problématique d’inégalités entre les sexes est directement liée à la vie professionnelle et qu’elle apparaît moins pendant le parcours académique où les performances des femmes sont reconnues et peuvent même être supérieures à celles des hommes. On aurait tendance à croire que les disparités n’existent que chez nous, mais on est presque rassuré par les chiffres présentés par Mme Zeinou qui prouvent que les inégalités ont la peau dure même aux pays occidentaux. «En Allemagne, en 2013, seulement 11% des postes des directoires parmi les sociétés cotées en bourse sont occupés par les femmes. Et ce chiffre faible a déjà doublé pendant les deux dernières années». Selon Mme Zeinou, plusieurs facteurs expliquent ces disparités, à savoir la double charge travail/famille, le manque de volontarisme dans les situations concurrentielles, les stéréotypes défavorisant ancrés dans les relations sociales, en plus de l’évaluation inégale des compétences hommes/femmes par les employeurs. Néanmoins, une fois bien établies dans les rapports de pouvoir, les femmes obtiennent la possibilité d’être acceptées, respectées et reconnues comme équivalentes, affirme-t-elle avant de s’interroger sur la meilleure approche pour réduire, voire détruire les disparités, serait-ce «les quotas des femmes ou l’engagement volontaire des employeurs ? Les programmes de coaching pour les femmes ou plutôt une sensibilisation des hommes ? Ne serait-il pas pertinent que les employeurs profitent des qualités individuelles et exploitent les compétences riches de chacun d’une manière optimale, indépendamment du sexe de l’âge, de l’origine ?»
Pour sa part, Zakia Hajjaji, DRH de Méditel, a axé son intervention sur la question de la diversité en entreprise, qu’elle a qualifiée de critique et stratégique. Et d’ajouter que bien que la mise en place des quotas et de la politique de la diversité ait contribué à réduire les disparités, elle n’est pas arrivée à bout des préjugés. De plus, généralement, au cours de la période où se construisent les plans de succession et les pools de talents (autour de la trentaine), la femme a d’autres priorités qui la rendent moins visible dans le radar des talents. Pour enjamber ces obstacles, Mme Hajjaji propose de mener des actions en amont, notamment au niveau de la formation où il faudrait sensibiliser les étudiantes sur des métiers qui sont considérés comme exclusivement masculins, surtout pour les métiers d’ingénierie où peu de femmes s’aventurent. Elle a aussi appelé à construire des réseaux féminins forts, solides et solidaires.

De son côté, l’ancien ministre de l’Emploi, Jamal Aghmani, a rappelé les avancées déjà réalisées en faveur de la promotion de l’égalité, concrétisées par le lancement de la première stratégie nationale de lutte contre la violence à l’égard des femmes, l’adoption de la charte nationale sur l’image de la femme dans les médias, l’adoption du code de la famille, ou encore l’adoption de liste nationale aux élections législatives de 2003. Lors de sa mission gouvernementale. Aghmani a mené diverses actions en faveur de l’approche genre, notamment la désignation d’une responsable au cabinet pour le suivi du dossier, la réalisation d’un diagnostic audit genre, une première au sein d’u ministère, et le lancement d’un plan d’action à moyen terme, entre autres.

En outre, le ministère avait réussi à enregistrer un nombre important de postes de responsabilité, notamment dans le département Emploi où le nombre de femmes responsables a atteint les 75%. Il a, par ailleurs, confirmé l’engagement des femmes dans les postes de responsabilité, «je dirai que les femmes sont plus responsables que nous les hommes», a-t-il affirmé et de conclure : «il est vrai que le Maroc d’aujourd’hui n’est pas celui d’hier, mais il reste beaucoup à faire pour changer les mentalités.» En réponse à une question posée par le «Matin Emploi» à M. Aghmani concernant justement ce changement de mentalités et les moyens politiques pour remédier à cet état de fait, l’ancien ministre a évoqué l’éducation comme moyen de base pour inculquer les valeurs de l’égalité entre les sexes, une éducation dispensée au sein de la famille ou dans le système scolaire, axée essentiellement sur le respect des droits de la femme. Et qui serait mieux placé que Amina Bouayach pour parler des droits de la femme, un domaine qu’elle maitrise parfaitement grâce à une longue et riche expérience acquise tout au long de son parcours de militante. En effet, l’actuelle secrétaire générale de la FIDH a salué la prise de conscience sur la question des droits de la femme grâce aux initiatives de bon nombre d’instances et d’organismes. Mme Bouayach a préféré élargir le débat au-delà de l’égalité des sexes, pour parler d’une notion plus générale, à savoir la diversité.
Elle constate que l’affirmation du principe de l’égalité homme-femme n’a pas eu l’impact escompté sur le changement, que ce soit au niveau culturel, social ou comportemental. Partant de ce constat, la lutte pour la mise en place du principe de la diversité a démarré, «On est passé de la notion d’égalité qui était la lutte pour neutraliser la différence à la mise en place d’une notion plus globale qui est la diversité pour valoriser la différence, c’est cela le changement le plus important» a-t-elle affirmé.

Dans une déclaration au «Matin Emploi», Mme Bouayach a donné son opinion sur la «discrimination positive», une notion, qui a été élaborée au niveau international de manière à briser directement les comportements discriminatoires, est une mesure limitée dans le temps, en attendant que la société se familiarise avec la présence des femmes dans les postes de responsabilité. Elle pense aussi que plusieurs sociétés sont parvenues à démarrer le processus d’égalité et de parité grâce à la mise en place cette disposition.
Enfin, la journaliste et chercheur en sociologie Sanae El Aji a attiré l’attention sur le fait, qu’en entreprise, on pose toujours aux femmes la question sur l’état matrimonial, alors que ce n’est jamais le cas pour leurs homologues masculins. «La femme est, en effet, cantonnée dans un rôle subalterne, jugée incapable de s’occuper de sujets «sérieux», déplore-t-elle sur un ton ironique, mais qui n’a rien enlevé au sérieux de la question des stéréotypes. Le débat a été, par la suite, ouvert pour les participants à cet évènement qui ont pu partager leur ressenti par rapport aux questions de la diversité, de l’égalité du genre et du leadership féminin.
Et c’est sur cet échange que s’est clôturé le dîner-débat de l’AGEF, qui sera, on l’espère, un prélude à d’autres évènements de ce genre sur la question du genre.

Lisez nos e-Papers