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«L’intégration industrielle est au cœur de notre stratégie énergétique»

L’intégration industrielle progressive permettra petit à petit d’accélérer l’appropriation des technologies de valorisation des ressources énergétiques renouvelables et le développement d’un tissu industriel national en mesure d’accompagner les grands chantiers et d’assurer la compétitivité requise à l’export. Le pays est déjà passé de 7 à 35% d’intégration industrielle dans les projets éoliens.

«L’intégration industrielle est au  cœur de notre stratégie énergétique»
Abdelkader Amara, ministre de l’Énergie, des mines, de l’eau et de l’environnement PH. DR

Le Matin Eco : Quelle place occupe l’intégration industrielle locale dans les énergies renouvelables au Maroc ?
Abdelkader Amara : La stratégie énergétique nationale accorde une place de choix aux énergies renouvelables. Le Maroc s’est ainsi fixé pour objectif d’atteindre 42% de sa puissance électrique installée à base d’énergie renouvelable à l’horizon 2020 : hydraulique : 2.000 MW, solaire : 2.000 MW et éolien : 2.000 MW. Et dans ce cadre, l’intégration industrielle progressive permettra petit à petit d’accélérer à l’appropriation des technologies de valorisation des ressources énergétiques renouvelables et au développement d’un tissu industriel national en mesure d’accompagner les grands chantiers des énergies renouvelables et d’assurer la compétitivité requise à l’export.
Et pour adopter et mettre en œuvre l’intégration industrielle dans le projet éolien intégré, l’ONEE, avec l’assistance de ses conseillers internationaux -juridique, financier et technique-, s’est basé notamment sur l’étude des benchmarks associés aux démarches similaires entreprises au cours des dernières années par d’autres pays. L’ONEE s’est aussi basé sur les démarches d’intégration industrielle proposée par les candidats, de manière volontariste, dans le cadre de la préqualification du projet ainsi que sur le retour d’expérience des parcs éoliens déjà réalisés ou en cours. Dans le projet du parc éolien 150 MW de Taza, qui représente la première phase du programme éolien intégré, l’intégration industrielle représente une composante importante où une compensation industrielle minimale de 30% a été exigée.

Qu’en est-il de la deuxième phase du programme éolien ?
Concernant la deuxième phase du programme éolien intégré de 850 MW dont l’appel d’offres vient d’être lancé par l’ONEE, l’intégration industrielle est présente par le biais d’investissements directs liés notamment au développement d’une capacité de fabrication locale de composants des aérogénérateurs, les tours, les pales, etc. Cela permettra le transfert de savoir-faire dans l’exploitation et la maintenance des parcs éoliens, l’acquisition en local de biens et services, la création d’emplois directs et indirects durables.
L’analyse de retour d’expérience dans le domaine de l’éolien à travers les parcs éoliens réalisés ou en cours, durant les dix dernières années, a montré que malgré la taille relativement faible des projets développés comparativement à la taille du programme (850 MW), la composante locale est passée de 7% environ à plus de 35%. Et ce, en l’absence de toute exigence spécifique en matière d’intégration industrielle. Cette augmentation s’explique principalement par le développement de la fabrication des tours au Maroc ainsi que par certains composants électriques.

Quelle est, aujourd’hui, votre stratégie pour accélérer l’intégration industrielle et le transfert de technologie dans l’éolien et le solaire ?
Les énergies renouvelables présentent pour notre pays des avantages en termes de sécurité énergétique, de limitation des gaz à effets de serre, mais aussi en termes de création d’emplois. Les opportunités d’affaires dans ce secteur industriel sont multiples et je me réjouis de souligner que nous sommes passés de 7 à 35% d’intégration industrielle dans nos projets éoliens.
L’intégration industrielle est donc au cœur de notre stratégie énergétique. C’est l’objectif de l’offre industrielle marocaine incitative qui a été mise en œuvre afin de promouvoir la fabrication locale des équipements de production d’énergie à partir de sources renouvelables et ceux qui assurent une utilisation plus rationnelle de l’énergie, grâce à une aide financière du fonds de développement énergétique. À cette offre s’ajoutent les avantages d’ores et déjà accordés par l’État en matière d’incitation à l’investissement, notamment pour les projets situés dans la zone Clean-Tech du technopôle d’Oujda.

Quelles sont les actions menées et/ou prévues pour créer une filière industrielle en énergie renouvelable compétitive dans notre pays ?
Nous sommes persuadés que la politique des pôles de compétitivité engagée par le gouvernement aura un impact très positif sur l’économie et l’industrie. Elle va créer une dynamique forte et prometteuse en amenant de grands groupes, PME, universités et centres de recherche à nouer des liens étroits et à développer des projets communs. Autour des PME, qui sont au cœur de cette stratégie, se développera une logique de clusters pour lesquels l’État apportera un accompagnement personnalisé afin de les aider à atteindre l’optimum économique.
La réalisation des clusters, notamment solaires et éoliens, permettra à notre pays de développer des filières locales compétitives et de se positionner parmi les leaders dans le domaine des énergies renouvelables au niveau régional. Ainsi, le premier cluster industriel pour la filière solaire a été lancé le mois d’avril dernier. Ce cluster réunit des professionnels et des entreprises exerçant dans les segments d’activités, notamment les industries métallurgiques, mécaniques et électromécaniques, électriques, électroniques et énergies renouvelables. Il permettra de dynamiser et de soutenir le développement de marché des différentes applications solaires en coordination avec les parties prenantes et avec la participation des acteurs liés à la conception, la fabrication, la distribution, l’exploitation et la maintenance de composants ou de projets énergétiques solaires ainsi que les acteurs de la formation, la recherche et le développement.
Par ailleurs, outre le projet d’ouverture du marché électrique moyenne tension de sources renouvelables, le ministère vise la mise en place des bases juridiques et réglementaires pour l’utilisation à grande échelle du photovoltaïque résidentiel et tertiaire connecté au réseau basse tension (BT). Ces deux chantiers donneront, sans conteste, une impulsion aux PMI-PME intéressées par le développement au Maroc de projets d’énergies renouvelables de petites et moyennes capacités.

Le tissu industriel marocain dispose-t-il des atouts nécessaires pour accompagner les programmes de développement des énergies renouvelables, sans risques de renchérissement du prix du kWh ni pour la qualité ?
Le Maroc, qui a érigé l’intégration industrielle comme une politique publique de développement de l’industrie nationale, connaît actuellement l’émergence du marché des énergies renouvelables, qui bénéficie d’une politique volontariste de l’État destinée à en favoriser la croissance. Ce marché représenterait dès 2016 un marché annuel additionnel pour la FIMME de plus 2,4 milliards de DH.
Face à une demande croissante, les filières des industries marocaines liées de près et de loin au développement de ce marché des énergies renouvelables doivent se développer et intégrer la chaîne de valeur. Elles sont appelées, de ce fait, à mettre à niveau leurs capacités de production et leurs ressources humaines afin qu’elles puissent répondre aux exigences de ce marché. Ces industriels peuvent également bénéficier de l’apport de l’expertise étrangère via l’attraction des investissements directs étrangers. Des études réalisées par la Banque mondiale montrent que le tissu industriel marocain existant permet d’atteindre, moyennant une spécialisation technologique, un taux d’intégration locale de 30% à l’horizon 2015 et de 50% en 2020, sans risque de renchérissement du prix de production de l’électricité.

Quels sont alors les secteurs et les métiers qui sont appelés à jouer le plus grand rôle dans cette intégration industrielle aux niveaux solaire et éolien ?
Les industriels marocains regroupés au sein de la Fédération nationale de l’électricité, de l’électronique et des énergies renouvelables - FENELEC - et de la Fédération des industries mécanique et métallurgique – FIMME -, qui sont d’ailleurs des membres importants du cluster industriel pour la filière solaire, ont un grand rôle à jouer dans cette intégration industrielle.
Les filières des industries mécanique et métallurgique s’avèrent essentielles au développement de ce marché applicatif -fonderie, travail de la tôle, mécanique générale et traitement de surface principalement- et peuvent logiquement jouer le rôle de levier en intégrant la chaîne de valeur des industries des énergies renouvelables.

Revenons sur les incitations publiques, quelles sont ces mesures mises en place pour encourager les entreprises et les entrepreneurs locaux à investir dans les énergies renouvelables pour les besoins nationaux et à l’export ?
Pour soutenir la production privée de l’énergie à partir de sources d’énergie renouvelables, la Société d’investissement énergétique - SIE - a été créée dans le cadre du Fonds de développement énergétique - FDE -, qui est doté d’un milliard de dollars. Cette société a pour mission, outre l’accompagnement du plan national de développement des énergies renouvelables à haute qualité environnementale, l’appui des développeurs désireux d’investir dans des projets visant l’augmentation des capacités de production énergétique, la valorisation des ressources énergétiques renouvelables et le renforcement de l’efficacité énergétique.
Par ailleurs, et pour encourager l’implantation d’industries de fabrication de composants dans les filières des énergies renouvelables, le Maroc a mis en place une Offre Maroc Énergies renouvelables qui s’articule autour de 3 volets : infrastructures, capital humain et incitations. Dans ce cadre, une importante assiette foncière d’environ 2.000 hectares est mobilisée au profit des activités industrielles avec des prix de location de terrains aménagés attractifs. Les entreprises établies au sein de ces zones seront exonérées de la TVA et des droits de douane, de la patente pendant les 15 premières années et de l’IS sur les cinq premiers exercices puis soumises à un taux fixe de 8,75% sur 20 ans. Les projets industriels installés pourront également bénéficier de mesures d’appui à l’investissement et du libre rapatriement des bénéfices et des capitaux.
Des aides à l’investissement financées à travers le FDE sont octroyées dans le cadre de cette offre. Il s’agit de subventions à hauteur de 10% du coût d’acquisition des biens d’équipement neufs, plafonnées à 20 millions de DH, environ 2 millions d’euros. Enfin, des aides à la formation, à l’embauche et à la formation continue des employés sont également octroyées à ces entreprises selon les profils à l’embauche, et ce durant une période de 3 ans. Par ailleurs, et pour la promotion des chauffe-eaux solaires, le ministère travaille actuellement sur la finalisation du modèle financier d’un programme national qui vise l’installation d’une surface cumulée de 1.700.000 m² de panneaux solaires à l’horizon 2020.

Réussir l’intégration industrielle exige notamment le renforcement de la R&D ainsi que le développement des compétences et de la formation. Quel est votre plan d’action sur ces volets ?
L’innovation a toujours été, à mon sens, un enjeu capital du développement. C’est une composante majeure pour notre stratégie énergétique, qui accorde une priorité aux projets innovants, à la création de nouveaux métiers à forte valeur ajoutée, et aux produits et procédés novateurs à même de permettre à notre pays une meilleure maîtrise technologique des filières énergétiques renouvelables. C’est d’ailleurs l’une des raisons d’être de l’Institut de recherche en énergie solaire et en énergies nouvelles - IRESEN - sous tutelle du ministère de l’Énergie, des mines, de l’eau et de l’environnement. Il a pour mission, entre autres, de consolider et de mettre en réseau nos capacités de recherche et développement sur des thèmes ciblés, notamment liés à l’industrialisation et au développement de solutions et de filières technologiques innovantes, en accompagnement à nos projets intégrés dans ces domaines. Et pour renforcer nos compétences humaines, nous avons entrepris, en collaboration avec le département de la Formation professionnelle, la réalisation des études préparatoires à la création de trois Instituts de formation aux métiers des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique - IFMEREE - à Oujda, Tanger et Ouarzazate et l’élaboration d’un plan de formation continue au profit des formateurs.

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