«Esquisses d’artistes» est une exposition imaginée par l’artiste-peintre Nawal Sekkat, qui regroupe une quarantaine d’artistes marocains (et internationaux) de renoms autour du thème de l’esquisse. Ce que la peintre qualifie chaleureusement de «diner entre amis» rassemble 120 pièces uniques, sorties tout droit des ateliers et prêtes à révéler au grand jour les plus intimes des secrets.
Le public pourra, entre autres, découvrir les œuvres de : Omar Bouregba, Khalid Nadif, Mohamed Melehi, Mahi Binebine, Mohamed Mourabiti, El Mehdi Mofid, Mounat Cherrat, Guido Palmero, Malika Agueznay, Nawal Sekkat….
Jean-Pierre Mouilleseaux, historien en art, définit l’esquisse comme étant la «forme première d'une œuvre. Elle est la vision originelle matérialisée par le dessin, la peinture ou le relief. Fruit de l'imagination, l'esquisse ne répond à un souci ni de présentation ni d'achèvement puisqu'elle n'est, en principe, que l'état préliminaire d'un projet, destiné à demeurer dans l'atelier de l'artiste».
Autrement dit, l’esquisse est bien plus pure et bien plus révélatrice que n’importe quelle œuvre. Destinée à l’artiste lui-même, l’esquisse représente l’idée imaginée à l’état brut. Elle révèle aussi les doutes, les questionnements et les hésitations ressentis par l’artiste au cours du processus de création de l’œuvre.
Lorsque l’on compare les esquisses de certaines œuvres très connues avec l’œuvre finie, on note que chez certains artistes, l’esquisse et l’œuvre ne sont pas très éloignées. Chez d’autres, on peut véritablement observer la censure qui s’est immiscée entre l’esquisse et l’œuvre finie. C’est d’ailleurs l’un des grands avantages de l’esquisse d’être dénué de toute censure, de toute intervention de la morale ou de la conscience. C’est aussi l’occasion de découvrir le travail préliminaire de l’artiste et le chemin parcouru.
À ce propos, Nawal Sekkat pense déjà à une exposition qui relierait les esquisses aux œuvres finies…
Questions à : Nawal Sekkat Artiste-peintre
«Une esquisse est plus accessible qu’une œuvre finie»
Vous êtes parmi les artistes qui participent à cette exposition et plus encore, vous êtes l’initiatrice du projet. D’où vous vient cette idée si originale ?
J’ai organisé l’évènement, mais je suis une artiste parmi les artistes et en tant que telle, on voit des choses qui ne sont pas visibles de l’extérieur. Il arrive que l’on ait trop d’idées et pas assez de recul pour pouvoir en tirer un projet intéressant. C’est là qu’on fait appel à des personnes extérieures qui nous aident à faire le tri. Donc, après plusieurs étapes, l’idée d’une exposition d’esquisses a émergé et lorsque je l’ai proposée à mes amis artistes, ils ont accueilli cette idée à bras ouverts et je les remercie énormément pour cela.
Quels sont les objectifs d’une telle exposition et que va-t-on y découvrir ?
Chaque artiste a sa propre notion d’esquisse. Une esquisse chez l’un peut-être une œuvre aboutie chez l’autre et vice versa. Cette exposition a deux objectifs : présenter des œuvres réfléchies qui traduisent les différentes périodes par lesquelles passent les artistes. Et montrer les différentes personnalités des artistes qui ont été totalement libres d’exposer leur propre notion d’esquisse. L’exposition réunit des artistes de plusieurs nationalités (marocains, français, espagnols, italiens) et présente soit des esquisses de projets futurs, qui verront le jour dans quelques mois, soit des esquisses réalisées dans les années 70, des carnets de croquis. Toutes les pièces exposées sont uniques et signées par les artistes.
Qu’est-ce qui distingue alors l’esquisse de l'œuvre finie ? Qu-e peut-elle exprimer de plus ?
Une esquisse est plus accessible qu’une œuvre finie, du coup ça suscite l’intérêt de nouveaux collectionneurs. Notre objectif était avant tout de promouvoir l’art et d’y faire adhérer de nouvelles personnes. Certains pensent, à tort, que les grandes signatures sont inaccessibles, mais avec les esquisses, on leur prouve le contraire. Les artistes ne vendent pas leurs esquisses au même tarif qu’une œuvre, car ils n’ont jamais pensé qu’un jour quelqu’un s’y intéresserait. Mais le fait que l’œuvre ne soit pas «finie» ne lui enlève pas de sa valeur, au contraire, il s’agit là du nectar de la création. D’ailleurs, en Europe, les esquisses d’artistes font la joie des collectionneurs depuis très longtemps, donc pourquoi pas au Maroc ?
