Encore associée aux seniors, la maladie de Parkinson touche pourtant aussi les personnes en âge de travailler. Comme bon nombre de maladies neurodégénératives ou d’ordre psychiatrique (comme l’autisme ou les troubles envahissants du développement), on constate un retard au diagnostic, de l’ordre de 3 ans après l’apparition des premiers signes. Au-delà du tremblement, qui touche «seulement» 64% des malades, les symptômes les plus fréquents sont la lenteur de mouvement (88%), la sensation de raideur (85%), les difficultés à écrire (79%) et les douleurs (73,5%).
«C’est comme si j’avais un corps de Peugeot 103 avec un moteur de Harley. Je veux avancer, je vibre, mais je n’avance pas», ironise Abdelhamid, 62 ans. «À cela s’ajoutent les troubles cachés, non moteurs, qui ne sont pas négligeables et varient d’un sujet à l’autre. Le patient pourra ressentir une fatigue proche de l’épuisement, troubles urinaires, troubles digestifs, crampes, constipation, une sudation plus importante… ainsi que des déficiences cognitives et physiques qui vont influer sur son moral : isolement, anxiété, dégradation de l’image de soi, dépression…», explique le Dr Bouchra Elmoutawakil, neurologue à l’Hôpital Ibn Rochd de Casablanca. Les traitements peuvent parfois entraîner des effets secondaires gênants, qui vont des mouvements incontrôlés pour la moitié des patients aux troubles addictifs, en passant par les hallucinations visuelles. Une fois le diagnostic posé, la maladie évolue lentement, mais, jusqu’à ce que les médicaments perdent leur efficacité.
Ce qui peut avoir des répercussions dans l’activité professionnelle du patient où les symptômes de la maladie (notamment la lenteur, les difficultés de concentration, les troubles de la parole) représentent une entrave à l’exercice de leur fonction. Certaines doivent alors négocier avec leur employeur pour une réduction de leur temps de travail. Quand leur âge est avancé, elles peuvent prétendre à un départ en retraite anticipée, alors que d’autres se font tout bonnement remercier. «Moi, j’ai arrêté de travailler. Quand on se retrouve au chômage, on sait que l’on aura du mal à retrouver un emploi avec cette maladie évolutive même si physiquement on s’en sent capable», témoigne Rachida, diagnostiquée depuis ses 50 ans.
La vie sociale n’en est pas moins chamboulée. Si la maladie rapproche le couple ou les enfants, c’est surtout hors du cadre familial que l’impact est le plus important, en raison, notamment, de la perte d’autonomie qu’entraîne la maladie de Parkinson : le cercle d’amis se rétrécit. «Si des amis viennent chez moi à l’improviste il faut toujours leur préparer un petit quelque chose : un tajine ou du thé au minimum. Mais pour nous, malades, c’est Parkinson qui décide s’il va nous laisser tranquille ou si on va tout renverser sur les invités…», poursuit Rachida.
Les patients peuvent faire appel à leur conjoint, du moins quand il s’agit d’un homme. Mais pour les patientes, ce n’est pas aussi rose. «On n’a encore jamais vu un homme faire le ménage, en tout cas aussi régulièrement que nous, ni préparer le repas. Heureusement, j’ai encore une fille à la maison qui m’aide, car nous n’avons pas les moyens d’engager une femme pour s’occuper de moi», conclut-elle finalement.
Explications : Bouchra Elmoutawakil, Neurologue à l’Hôpital Ibn Rochd de Casablanca
«ll existe une légère prédominance masculine»
Qu’est-ce que la maladie de Parkinson ?
C’est une maladie de cause encore indéterminée liée à une perte neuronale. Habituellement, elle touche la personne âgée de plus de 55 ans, mais des formes juvéniles existent. Le déficit de dopaminergique résultant de la perte neuronale de la substance noire perturbe le fonctionnement du striatum, d’où les signes moteurs de la maladie de Parkinson.
Quelle tranche de la population est concernée ?
Selon les estimations mondiales, 150 personnes sur 100 000 sont touchées par cette maladie qui est liée à l’âge et qui en constitue le principal facteur de risque. Ainsi, l’incidence serait de 0,3 pour 1 000 sujets de 55-65 ans et passerait à 4,4/1 000 chez les plus de 85 ans. Il existe une légère prédominance masculine. Celle-ci serait expliquée par une plus grande exposition aux toxiques par la gent masculine.
Quels symptômes doivent alerter ?
Le signe principal de la maladie est l’akinésie (diminution globale de la motricité). Elle est souvent décrite comme une fatigue, une faiblesse, une incapacité à effectuer un mouvement, ou de faire deux actions simultanément, un engourdissement…
Le gène se manifeste à l’habillage, l’écriture (micrographie), à la marche (pas raccourcis, balancement des bras diminué). Le deuxième signe de la maladie est la rigidité décrite par la personne comme une tension musculaire ou une sensation de raideur ou de douleur musculaire. Elle se répartit aussi bien sur les membres que sur la colonne vertébrale, les hanches, les épaules. C’est cette rigidité qui donnera au cours de l’évolution une attitude fléchie des membres et cette attitude penchée en avant du corps. Le tremblement contrairement à l’idée populaire n’est pas le signe principal. Il peut même être absent. Il apparait au repos et disparait au mouvement. Toutefois, il peut persister à l’action s’il est ample. Le tremblement augmente par les émotions, les efforts de concentration ou les conversations.
Peut-on en guérir ?
Le mécanisme de la maladie étant basé sur une mort neuronale et les neurones étant des cellules qui ne se renouvellent pas, la maladie est alors irréversible, du moins à l’heure actuelle. La stratégie thérapeutique s’oriente alors vers un traitement de substitution afin de compenser les stocks de dopamine dans le cerveau.
Comment prévenir la maladie ?
C’est une question à laquelle on ne pourra répondre qu’une fois que la ou les causes de la maladie seront connues. Pour le moment et à l’instar d’un bon nombre d’affections dégénératives, adopter une bonne hygiène de vie et une alimentation équilibrée et saine de façon à réduire le stress oxydatif qui est évidemment une façon de réduire le risque.
