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Printemps arabe : Quel avenir pour la Tunisie et l’Égypte ?

Printemps arabe : Quel avenir pour la Tunisie et l’Égypte ?
Les deux premiers pays à avoir porté le flambeau du Printemps arabe sont dans la tourmente.

Le Printemps arabe a eu des conséquences douloureuses pour la Tunisie et l’Égypte. La Tunisie, berceau du Printemps arabe déclenché par l’immolation le 17 décembre 2010 du jeune Tunisien Mohammed Bouazizi, a vu le départ du dictateur Ben Ali le 14 janvier 2011. Suite à des élections qui ont lieu le 23 octobre 2011, le Parti islamiste Ennahda a été déclaré victorieux en remportant 89 sièges sur 217 de l’Assemblée constituante.
Le gouvernement tunisien fut formé d’une coalition regroupant outre le Parti Ennahda, Ettakatoul et le parti du Congrès, dont le leader Moncef Marzouki fut élu Président de la République. Le parti islamiste au pouvoir n’a pas pu juguler la grave crise économique qui a frappé l’économie tunisienne après la révolution. De plus, il ne s’est pas montré ferme vis-à-vis des salafistes tunisiens, et a procédé à de nombreuses nominations dans ses rangs de gouverneurs de provinces et de responsables des autorités locales. Il a tenté également une islamisation rampante, notamment à l’Université Manoubi où il a voulu séparer dans les cours les garçons et les filles, permettre à ces dernières de porter le niqab (voile islamique) et interdire certains enseignements de philosophes français.

La situation politique s’est aggravée en 2013 par l’assassinat d’opposants, Chokri Belaïd en février et Mohamed Brahimi en juillet. Une situation délétère s'est installée dans le pays sans aucune amélioration de la situation économique, du fait de la baisse drastique de la productivité, du tourisme et des investissements directs étrangers.

Sortie de crise en Tunisie

Pour sortir de la grave crise politique qui menaçait le pays, le dialogue national a été entamé en octobre 2013 sous l’égide du puissant syndicat tunisien l’UGTT. Après de multiples tractations, Mehdi Jomâa, ministre de l’Industrie du gouvernement en exercice a été désigné comme Premier ministre le 14 décembre 2013, afin de constituer un gouvernement de technocrates en vue de préparer les élections législatives et présidentielles. Enfin, le 9 janvier 2014, le Premier ministre islamiste Ali Larayedh a présenté la démission de son gouvernement.

Entretemps, l’Assemblée constituante a entériné quelques articles qualifiant la Tunisie d’État civil, garantissant la liberté de conscience et le libre exercice du culte, et établissant l’égalité hommes-femmes devant la loi et la parité obligatoire pour les listes des candidats aux élections.
On ne peut que se féliciter de l’adoption de ces premiers articles de la Constitution, et rendre hommage aux partis progressistes tunisiens et à la société civile d’avoir résisté de toutes leurs forces à la vague islamiste.
Les défis pour la Tunisie restent nombreux : formation du nouveau gouvernement, organisation des élections législatives et présidentielles, finalisation du texte de la Constitution, retour de la sécurité individuelle et collective, instauration de la justice transitionnelle et règlement des problèmes socio-économiques. On ne peut que souhaiter avec confiance bonne chance au pays frère la Tunisie pour relever ces défis le plus rapidement possible.

L'Égypte prise en otage entre l'armée et les islamistes

La situation en Égypte n’est guère plus réjouissante après le déclenchement de la Révolution en janvier 2011 et le départ de Hosni Moubarak en février 2011. Comme en Tunisie, c’est le Parti islamiste des Frères musulmans qui a gagné les élections et qui a porté au pouvoir le Président Morsi en juin 2011.
Ce dernier a fait adopter en décembre 2012 une nouvelle Constitution conforme aux idéaux des islamistes. Comme dans le cas tunisien, le gouvernement islamiste n’a pas pu juguler la grave crise économique qui a frappé l’économie égyptienne après la révolution, de même qu’il a tenté d’opérer une islamisation rampante dans tous les secteurs de la société.
Il s’en est suivi, fin juin 2013, de violentes manifestations anti-islamistes qui ont donné le prétexte à l’Armée égyptienne pour démettre le Président Morsi, le 3 juillet 2013, et désigner Adly Mansour comme Président intérimaire de la République. Ce fut alors au tour des islamistes de déclencher dès juillet 2013 des manifestations condamnant le coup d’État militaire et réclamant le retour de Morsi à la présidence de la République.

Le gouvernement intérimaire, sous l’égide de l’Armée, a désigné une Commission constitutionnelle qui a établi une révision de la Constitution redonnant des pouvoirs importants à l’armée, notamment la possibilité de traduire des civils devant la justice militaire. Cette Constitution fera l’objet d’un référendum les 14 et 15 janvier 2014.
Entretemps, le général Sissi, qui a demis le Président Morsi, a déclaré qu’il serait candidat aux élections présidentielles si l’armée et le peuple égyptien le souhaitaient.
Les résultats de référendum des 14 et 15 janvier 2014 seront déterminants pour la suite des événements en Égypte. Si la consultation populaire est positive et massive, cela ouvrira la voie à la candidature du général Sissi. Alors que les islamistes du Parti Al Nour ont décidé de voter positivement, les Frères musulmans ont préconisé le boycott du référendum.

Contrairement au cas tunisien où un certain consensus a pu être trouvé entre islamistes et modernistes, en Égypte il y a une véritable rupture entre l’Armée et les islamistes dans une société égyptienne très divisée.
L’avenir de l’Égypte inspire plus de pessimisme que celui de la Tunisie. 

Par Jawad Kerdoudi : 

Président Institut marocain des relations internationales (IMRI)

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