Le Matin : Vous êtes le président du jury de cette édition du Festival international du film de Marrakech. Qu'est-ce que cela signifie pour vous ?
Francis Ford Coppola : C’est un grand honneur pour moi d’être président du jury dans un Festival qui s’est forgé au fil des années une identité propre à lui et qui figure aujourd’hui en bonne place dans l’agenda des événements de cinéma à l’échelle internationale. Mon histoire avec le Festival international du film de Marrakech ne date pas d’hier. Je garde de bons souvenirs de cet événement qui m’a rendu un grand hommage en 2002 et m’a invité à donner une master class en 2010. J’ai noué une grande amitié avec ce Festival.
Vous avez visité plusieurs pays et connu leurs cultures. Que représente le Maroc pour vous ?
C’est un beau pays avec une belle histoire millénaire. Le Royaume du Maroc fait partie de mes endroits préférés au monde. Ma grand-mère paternelle est née en Afrique du Nord (en Tunisie, plus exactement), et je me souviens très bien des histoires qu'elle me racontait. Ces affinités personnelles et familiales, ajoutées au fait que le Maroc fut le premier pays à reconnaître les colonies américaines en tant que nation indépendante, me font sentir tout à fait le bienvenu.
Quel rôle pourrait jouer le cinéma dans la situation mondiale actuelle ?
La situation actuelle est déchirante à plus d’un titre. En grandissant, j’ai découvert que les gens qui dirigent le monde sont ceux qui contrôlent les arts. Cela était vrai à l’époque médiévale quand le pape et les riches aristocrates le faisaient à travers le mécénat et les dons. C’est pareil avec le cinéma aujourd’hui. Pour changer le monde, le cinéma doit être libéré de toute influence et de la mainmise de certaines personnes. C’est en faisant des films que nous pouvons nous battre contre les horreurs de ce monde.
Quid de votre prochain film ?
Mon prochain film sera fort probablement le dernier que je vais tourner. Il s’appelle «Distant Vision», une saga italo-américaine qui se déroulera sur trois générations. C’est un projet que je compare au téléfilm allemand en deux parties «Les Buddenbrook» sur le déclin de la famille de Thomas Mann, réalisé par Heinrich Breloer. Dans «Distant vision», il s’agira également de trois générations d’une même famille. Il portera sur la naissance, l'âge d'or et le déclin de la télévision à la suite de l'arrivée de l'Internet. Et comme je l’ai toujours dit, il n’y aura plus de film, ni de télévision, mais il y aura le cinéma qui continuera à vivre partout, tout le temps et qui demeure capable de tout.
