Les universités françaises ont de plus en plus de mal à boucler leurs budgets. Elles voient leurs recettes fondre et leurs dépenses augmenter. Les universités du pays, dont les dotations pour 2015 n'ont pas été annoncées, cherchent des financements et redoutent qu'on accapare leurs réserves. Puiser dans les fonds de roulement, autrement dit dans les économies des facs : l'idée émise par Bercy et reprise par le ministère de l'Enseignement supérieur a provoqué un tollé il y a deux semaines dans le monde universitaire. Selon l’AFP, la Conférence des présidents d'université (CPU) et la Conférence des directeurs des écoles françaises d'ingénieurs (CDEFI) ont dénoncé le caractère périlleux du projet, un véritable hold-up financier. Du coup, le ministère de l'Enseignement supérieur a commandé un rapport sur la trésorerie de chacune des 73 universités françaises, dont les conclusions n'ont pas encore été dévoilées. «Vider les réserves stratégiques dont la vocation est de financer des projets d'investissement dans l'équipement et l'immobilier, ce n'est pas une façon de gérer les budgets. C'est une aberration», souligne le vice-président de la CPU, Gérard Blanchard, cité par l’AFP. Si le ministère recourt aux réserves, cela ne ferait que «pousser les universités à investir plus et plus vite pour diminuer leurs trésoreries», affirme-t-il à l'AFP.
Pour lui, les fonds de roulement ne pourront pas être d'une grande aide puisqu'ils représentent 1,4 milliard d'euros, dont seuls 350 à 400 millions seraient en réalité mobilisables, sur les 13 milliards d'euros de budget annuel des universités. Il n'y a donc aucun «intérêt à fragiliser les universités», déjà bien secouées. Évolution croissante du nombre d'étudiants, vieillissement de la masse salariale de plus en plus coûteuse... Depuis leur autonomie instaurée par la loi du 10 août 2007, elles peinent à voter leurs budgets chaque année, ou sont contraintes de faire preuve d'ingéniosité pour trouver des fonds. «La pression devient forte pour chercher d'autres moyens de financement», confirme Hugo Harrari Kermadec, membre du syndicat Snesup et maître de conférence à l'ENS Cachan. «Les universités doivent trouver des moyens puisqu'on leur demande d'être autonomes, de se lancer dans de grands projets et d'être visibles à l'international», souligne-t-il. Notons que «plusieurs options s'offrent alors à elles comme l'augmentation des frais d'inscription pour les étudiants étrangers, voire à terme des frais plus élevés pour des formations plus prestigieuses», redoute ce syndicaliste. À titre d'exemple, sur le plateau de Saclay, le campus au sud de Paris qui réunira prochainement Polytechnique, HEC, les universités Paris-Orsay et Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, «on peut imaginer que des diplômes communs entre certains établissements coûtent beaucoup plus cher que des diplômes standard», craint-il.
