Éco conseil : Quelles sont les spécificités de la procédure du licenciement collectif par comparaison au licenciement individuel ?
Omar Fatemi : Le licenciement individuel concerne un seul salarié, il peut ainsi être pour motif personnel ou économique. Par contre, le licenciement collectif qui concerne plusieurs salariés ne peut survenir que dans des cas précis prévus par le Code du travail. Le licenciement pour motif économique est régi par les articles 66 à 71 du Code de travail. L’article 66 du Code impose ainsi à tout employeur qui entendrait licencier tout ou partie des salariés pour un motif, notamment, structurel, technologique ou économique de respecter des conditions d’ordre public, dont des conditions de fond qui se résument en réalité aux motifs du licenciement qui s'identifient dans «les motifs technologiques, structurels ou pour motifs similaires ou économiques». Selon la doctrine marocaine, le Code du travail ne précise guère les contours de ces motifs et il semblerait que le législateur entend en laisser le contrôle et l'appréciation aux autorités locales et aux tribunaux. La doctrine considère également que la diminution du personnel constitue l’élément caractéristique du licenciement pour motif économique. En effet, tout licenciement pour motif économique est un licenciement qui tend vers la diminution du nombre des salariés au sein de l’entreprise. L’article 67 du Code du travail impose, par ailleurs, à l’employeur de justifier le motif du licenciement d’une partie ou de l’ensemble des salariés.
Comment se fait le contrôle d’une telle procédure ?
Vu l’importance et l’impact du licenciement collectif sur la stabilité et la sécurité de l’emploi, le Code du travail impose à l'employeur une obligation d'information des institutions représentatives des salariés au sein de l’entreprise, et ce, préalablement à l’enclenchement du processus du licenciement. L'employeur doit porter sa décision de licenciement à la connaissance des délégués des salariés et, le cas échéant, des représentants syndicaux de l'entreprise. Il doit, en même temps, leur fournir tous renseignements nécessaires y afférents, y compris les motifs du licenciement, ainsi que le nombre et les catégories des salariés concernés ainsi que la période dans laquelle il entend entreprendre ce licenciement. Une obligation de concertation avec les délégués des salariés et les représentants syndicaux, s’ils sont présents au sein de l’entreprise, ou le comité d’entreprise le cas échéant, pèse alors sur l'employeur. Ce dernier est tenu d'engager des concertations et des négociations en vue d'examiner les mesures susceptibles d'empêcher le licenciement ou d'en atténuer les effets négatifs. Il peut être envisagé, par exemple, le reclassement des salariés visés par la mesure de licenciement, dans d'autres postes. Ces concertations et négociations sont obligatoirement sanctionnées par un procès-verbal. En outre, l’employeur est tenu d’observer, sous peine de l’application d’une sanction pénale, une procédure tendant à l’obtention d’une autorisation administrative.
Comment protéger les droits des salariés ?
Le licenciement d’une partie des salariés est sujet à l’autorisation du gouverneur de la province ou de la préfecture du lieu où se trouve l’entreprise concernée. Ce dernier agit en qualité de président d'une commission provinciale qui statue sur les demandes des licenciements pour motifs technologique, structurel ou économique. Le gouverneur assure le contrôle de l'opportunité et de la motivation de la décision de licenciement, dès lors qu'elle a pour conséquence la compression du personnel. Il ne peut autoriser ledit licenciement si celui-ci est dicté par des motifs autres que ceux visés ci-dessus. Cette autorisation doit intervenir dans un délai de deux mois à compter de la date de la présentation de la demande par l'employeur au délégué. Nous précisons que le silence conservé pendant une période de 60 jours par la commission susvisée équivaut à un rejet. Par ailleurs, la demande d’autorisation doit être assortie de tous les justificatifs nécessaires et du procès-verbal de concertation et de négociations avec les représentants des salariés, ainsi (i) qu’un rapport comportant les motifs économiques, (ii) l'état de la situation économique et financière de l'entreprise et (iii) un rapport établi par un expert-comptable ou par un commissaire aux comptes.
Il découle des dispositions de l’article 78 du Code de travail que l’inobservation de la procédure ci-dessus exposée est sanctionnée par une amende de 10.000 à 20.000 DH.
