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Le gouvernement ouvre le dossier des pensionnaires de «Bouya Omar»

Une étude menée par le ministère de la Santé sur «la problématique de la violation des droits des malades mentaux dans le mausolée de Bouya Omar» confirme les constats alarmants dressés depuis de longues années par la société civile et les médias.

Le gouvernement ouvre le dossier des pensionnaires de «Bouya Omar»
Le tristement célèbre mausolée de Bouya Omar.

Le gouvernement a enfin décidé d’ouvrir le dossier des malades mentaux du fameux mausolée de Bouya Omar, situé dans la province de Kelaat Sraghna. À court terme (un à deux ans), un centre médico-social sera créé avec une gestion indépendante pour protéger les malades et procéder à leur insertion sociale. La prise en charge de ces personnes est devenue plus qu’urgente. En témoignent les résultats accablants de l’étude menée, entre août et décembre 2014, par le ministère de la Santé avec plusieurs partenaires institutionnels.

Les conclusions de cette enquête, supervisée par 20 psychiatres, confirment les constats sur les pratiques inhumaines à Bouya Omar, qui sont d'ailleurs dénoncées à cor et à cri par les médias et les militants associatifs depuis de longues années. 88% des 711 pensionnaires sont atteints de troubles psychotiques, dont 99% sont schizophrènes. 9,4% des malades sont atteints de troubles de l’humeur et 2,9% des troubles de la personnalité. 70% des cas d’hébergement ont été sollicités par les familles dépassées par les troubles de comportement de leurs proches et par leur violence. Face à la problématique de la carence de prise en charge des maladies mentales, les parents abandonnent leurs enfants : 24% des malades ne reçoivent aucune visite familiale. 70% des cas ne sont pas traités médicalement. 23% se trouvent dans un mauvais état. Les signes du mauvais traitement sont apparents sur 19% des pensionnaires. 97% des pensionnaires sont des hommes. 86% d’entre eux sont célibataires, 12% sont analphabètes et 5% ont un niveau universitaire.

Quelque 55 personnes «hébergent» les malades. Le coût mensuel d’hébergement est de 786 dirhams. Le montant annuel récolté est estimé à 8 millions de dirhams. Ainsi, «le malade mental est le moteur économique local», pour reprendre les termes de l’étude. Une grande partie consommait la drogue avant son internement au sanctuaire : 16% prenaient des médicaments destinés à traiter des maladies mentales sans prescription médicale, 55% consommaient le cannabis, 5% la cocaïne et 4% l’héroïne.

Pour faire face à cette situation dramatique, l’étude préconise de mener des campagnes de sensibilisations outre la création du centre médico-social dont la capacité d’hébergement serait de 120 lits. Le coût global de ce centre (construction et équipement) est estimé à 25 millions de dirhams. Le plus grand défi, selon l’étude, est de pouvoir persuader les habitants locaux de l’intérêt du changement, de mettre à disposition les ressources humaines nécessaires et d’assurer la coordination entre les différents intervenants.

À moyen terme, l’objectif est d’héberger les malades mentaux dont l’état est «stable» au sein de leurs familles tout en garantissant la continuité des soins. Il s’agit aussi de définir avec précision les conditions d’ordre juridique et organisationnel de l’offre de soins et de mettre en place un cahier des charges portant sur la qualité des soins.
À long terme, l’idée est d’élargir l’offre de soins en matière de santé mentale. Quelques projets ont déjà été réalisés. Trois hôpitaux régionaux dédiés à la santé psychique et mentale sont en cours de construction à Agadir, Kénitra et Kelaat Sraghna. L’Hôpital psychiatrique de Berrechid est en cours de réaménagement. Quatre centres de médecine psychique et mentale seront intégrés dans les hôpitaux publics de Khénifra, Khouribga, El Jadida et Azilal. Quelque 80 psychiatres sont en cours de formation. 

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