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L'Inde, en pleine croissance démographique, lutte contre la malnutrition

L'Inde, en pleine croissance démographique,  lutte contre la malnutrition
Si l'Inde connaît une croissance économique robuste, elle est en retard par rapport à ses voisins plus pauvres en termes de lutte contre la malnutrition.

À la vue d'un nouvel enfant très maigre flirtant avec la ligne rouge des grilles de poids, le docteur Om Prakash sait qu'il va devoir agir vite pour éviter un drame. «Les enfants sévèrement malnutris peuvent mourir dans un délai de quelques heures à quelques jours», dit le médecin, de permanence dans une unité hospitalière pédiatrique de soins intensifs de l'État du Bihar, le plus pauvre d'Inde. «Se nourrir est l'impératif numéro un pour la santé de tous. Et quand ce n'est pas le cas, toutes les fonctions du corps sont touchées», explique-t-il.
Le service de 30 lits de l'hôpital de Darbhanga est peuplé d'enfants au ventre gonflé et aux yeux enfoncés, signes d'un retard de croissance dû à la malnutrition. Si l'Inde connaît une croissance économique robuste, le géant asiatique est en retard par rapport à ses voisins plus pauvres en termes de lutte contre la malnutrition.
Le rapport Global Nutrition Report pour 2015 montre que le taux de malnutrition baisse en Inde, mais que plus de 40 millions d'enfants souffrent d'un retard de croissance pour cette raison.

Ces enfants, s'ils survivent, vont être plus fragiles, avec un système immunitaire et un cerveau affectés.
La sous-nutrition en Inde touchait 39% des enfants de moins de cinq ans en 2014, contre 48% en 2006, selon ce rapport réalisé par l'institut américain International Food Policy Research Institute (IFPR), alors que le taux est en moyenne de 24% dans le monde.
Rachitiques et recroquevillés sur eux-mêmes, les enfants hospitalisés à Darbhanga sont pesés dans des bacs de plastique bleu vif, habituellement utilisés pour le transport de l'eau ou la lessive.

L'alimentation normale,«une calamité»

Ils sont nourris avec une préparation spéciale de lait et de sucre dosée selon leur poids. «Ce serait une calamité de les nourrir normalement. Nous leur donnons une alimentation plus digeste et avec moins de calories», explique le médecin. «Nous augmentons progressivement la quantité et passons ensuite à une nourriture partiellement solide, puis à la nourriture locale».
«La gravité de leur maladie va déterminer leur durée d'hospitalisation», poursuit-il. «Chaque enfant reste sept à dix jours minimum, mais certains peuvent rester trois semaines».
Zalumun Khatoon connaît les dangers auxquels est exposé son petit-fils de quatre ans, Shahadat Hussein, qui pèse huit kilos, soit moitié moins que le poids normal d'un enfant de son âge. «Il a pris un traitement pendant neuf mois. Ensuite, il a eu de la fièvre et a commencé à perdre du poids», explique la grand-mère.
Les efforts pour éradiquer la malnutrition sont compliqués par la croissance rapide de la population indienne, qui devrait dépasser la Chine d'ici 2022, selon l'ONU. Le Bihar, qui compte 104 millions d'habitants, a l'un des taux de croissance les plus élevés du pays avec quatre naissances par femme en moyenne.

Planning familial

Ces femmes, souvent pauvres et illettrées, sont elles-mêmes mal nourries et leur manque d'éducation les pousse à fréquemment nourrir leur enfant avec du lait de vache ou de buffle plutôt que de les allaiter, ce qui renforce les risques de maladie, selon les médecins.
Purnima Jha, directeur du centre de planning familial Janani, souligne que la situation du Bihar est aggravée par les résistances traditionnelles et l'absence de toute connaissance en matière de planning familial.
«Nous ne pouvons forcer personne à être stérilisé, aussi devons-nous éduquer et dire qu'avoir deux enfants, c'est bien», dit M. Jha. «L'éducation doit se faire à la base. Il faut enseigner la contraception au collège et au lycée».

Le service hospitalier spécialisé du Bihar a été créé l'an dernier avec le soutien de l'ONG française Médecins sans frontières (MSF) et les autorités espèrent disposer d'un service de lutte contre la malnutrition dans chaque hôpital public de l'État dans un proche avenir.
Jagdish Prasad, directeur général des services de santé du gouvernement indien, estime que le recul du taux de malnutrition a été obtenu en partie grâce à la création de tels services.
«Des centres de malnutrition ont été créés en différents endroits du pays pour que tout patient souffrant de malnutrition puisse être soigné», dit M. Prasad.

Lors de la visite de l'AFP à Darbhanga, le service était débordé par des enfants âgés de six mois à cinq ans, dont 50% souffraient de malnutrition sévère. L'ampleur du problème a été mise en évidence par une étude de l'ONG britannique Save the Children, qui estime que la malnutrition pourrait coûter 46 milliards de dollars à l'Inde d'ici 2030.
Le succès à long terme dépend des efforts pour éduquer les mères à l'alimentation et l'hygiène, estime pour sa part le médecin du Bihar.
«Les éduquer est plus important que donner un médicament. La malnutrition seule ne tue pas, mais le taux de mortalité de chaque maladie augmente avec la malnutrition», dit-il.

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